Les résultats des élections législatives du 31 juillet montrent une forte percée de l’opposition sénégalaise à l’Assemblée Nationale même si chaque camp réclame la majorité. En attendant la proclamation des résultats officiels, ce dossier met le focus sur certains députés qui composent la nouvelle opposition parlementaire.
Un des profils qui attire plus l’attention est l’ex-journaliste et consultant en communication, Pape Djibril Fall. Parti aux élections locales du dimanche 31 juillet, sous la bannière de sa propre liste le spécialiste dans l’analyse de la vie politique et sociale, était déjà connu pour sa passion « sans limite » pour le développement du Sénégal et de l’Afrique. Ce qui faisait déjà de lui, « le chroniqueur préféré des Sénégalais »
Si certains sont fascinés par l’intelligence ou le charisme de l’ex « jeune journaliste de TFM », d’autres sont séduits par sa façon de communiquer. Au petit écran, Pape Djibril Fall avait la capacité de toucher en plein cœur les téléspectateurs par la pertinence de ses analyses sur des sujets chauds de l’actualité. Sa discipline et sa sérénité lui ont permis d’atteindre le sommet dans toutes les classes d’âges de téléspectateurs sondées.
Une cote qui certainement explique son entrée brillante dans l’arène politique Sénégalaise. Si les résultats provisoires se confirment, Pape Djibril Fall siègera à l’Assemblée Nationale, en tant député de cette 14ième législature.
Sa coalition « les serviteurs/Marche Pour le Renouveau (MPR) », à peine née, a passé le cap des parrainages après un temps d’existence très court au moment où des partis et coalitions chevronnés se retrouvent sur la touche. Le début d’exploits politiques qui ne s’arrêteront certainement pas là et qui sans doute, feront de lui, un des députés « chouchous » du peuple Sénégalais. Surtout pour ceux qui exhortent une Assemblée de rupture.
Tout a commencé pour Pape Djibril Fall, en fin avril 2022. « Le journaliste chroniqueur Pape Djibril Fall du Groupe Futurs Média (GMS) se lance dans la politique et ira à la quête du suffrage des Sénégalais, lors des élections législatives du 31 juillet 2022 » informe la presse, à deux semaines du dépôt des parrainages. Selon plusieurs analystes politiques, il lui serait impossible de réunir le nombre de parrains. Et pourtant l’homme va surprendre tout le monde.
Le samedi 07 Mai 2022, la coalition qui a porté la candidature du journaliste Pape Djibril Fall a déposé sa liste de parrainage et sa caution à la Caisse de dépôt et de consignation. « Conformément à l’article L149-3 et R 76-4 du code électoral, la coalition les Serviteurs/MPR pour une Assemblée représentant enfin son peuple vient de déposer 54.800 parrains soit 0.7% du fichier général des électeurs en vue des législatives du 31 juillet, auprès de la Direction Générale des Élections ». Une prouesse qui a surpris tous les observateurs politiques. D’ailleurs, une brouille a juste éclaté avec Amsatou Sow Sidibé, cette dernière l’accusant d’avoir
« volé » la liste de parrains de son mouvement politique. Information que le nouveau chef de parti politique avait démentie.
Aujourd’hui, Pape Djibril Fall se réjouit de cette nouvelle victoire. « Chers militants de la coalition les Serviteurs, la campagne électorale et les élections législatives ont été excellentes grâce à votre dévouement et votre mobilisation sans failles ! Nous vous en remercions infiniment en vous réitérant que le travail ne fait que commencer ! Continuons la mobilisation » jubile le « nouveau député ». D’après lui, « les tendances montrent une forte percée de l’opposition sénégalaise dans le territoire comme dans la diaspora ». Ainsi, « la volonté du peuple doit être respectée » exhorte Pape Djibril Fall.

Guy Marius Sagna, « la voix des sans voix »
Un autre profil qui semble avoir sa place à l’Assemblée Nationale est la tête de liste de Yewwi Askan Wi à Ziguinchor. Jeune activiste, Guy Marius SAGNA est un personnage qui incarne de plus en plus la contestation des citoyens du mal-vivre et des mal-lotis. Une figure charismatique, débonnaire dont la montée en puissance n’était plus à démontrer. Aujourd’hui député, avec une majorité écrasante dans la capitale du Sud, Guy Marius Sagna a toujours joué un rôle de parlementaire avant même d’être élu par le peuple. Nombreux sont les combats qu’ils portent et qui lui valent des séjours répétitifs en prison.
Guerrier, tempérament impulsif, bouc-émissaire, on ne finit pas de peindre le héros des temps de la chaudière politique sénégalaise. Guy Marius Sagna est un personnage iconoclaste et déborde d’un charisme. On peut l’aimer ou pas. Guy Marius fait les choux gras des médias sénégalais. Leader intrépide, meneur d’homme qui avance, armé de son seul courage, portant sans gémir, ni pleurer, les doléances de millions de ses concitoyens, atterrés dans leur souffre-douleur. Le tout nouveau député de l’opposition incarne cette voix du peuple opprimé ou qui subit toutes les formes d’injustices. Un condensé de leur mal-vivre et leur mal-être. Un combat que beaucoup estiment noble, juste. Le supplice de ses concitoyens, il les porte et les brave avec courage et fière chandelle. De la récente hausse du prix de l’électricité jusqu’aux conflits fonciers qui déchirent et divisent des familles en passant par la galère des étudiants boursiers et autres formes d’injustices sociales, Guy Marius, la quarantaine consumée, est devenu, au gré des supplices, le héros qui incarne l’anti-bourgeoisie de la République, qui snobe, fouette et piétine parfois le peuple d’en-bas.
Son combat se résume « à délivrer le peuple des goulots qui l’étranglent ». Sans lever le moindre doigt. L’activiste a décidé de prendre les coups dans son dos.
Se définissant comme un militant de « la gauche anti-impérialiste et panafricaine », Guy Marius Sagna semble désormais s’habituer aux cellules du Sénégal. Originaire de Ziguinchor, élevé dans les quartiers populaires de Dakar, il a déjà connu de nombreuses garde-à-vue après des manifestations ou des sit-in. En 2011 et 2012, il milite au sein du Mouvement du 23-juin (M23), qui alimente la fronde contre le troisième mandat d’Abdoulaye Wade. Aujourd’hui officiellement élu par le peuple, le contestataire le plus populaire du prompteur de la scène politique du pays en ces temps qui courent, sera certainement un des parlementaires les plus suivis de cette nouvelle législature.

Ahmed Aïdara : des revues de presse à l’Assemblée… en passant par…
Comme Pape Djibril Fall, Ahmed Aïdara, est un journaliste qui s’est reconverti en homme politique. Le maire de Guédiawaye et désormais député de cette nouvelle législature fait également partie des profils de l’opposition qui attireront l’attention à l’Assemblée Nationale. « Moi, je suis journaliste, et mon ambition est de devenir maire de Guédiawaye. » Ces mots, Ahmed Aïdara les adresse à son professeur en stratégie d’entreprise. C’était à la fin de 2019, à l’Institut africain de management (IAM). Ahmed Aïdara y prenait des cours du soir et rêvait de décrocher un master en management.
À l’époque déjà, il n’était pas un étudiant comme les autres. Déjà au faîte de sa renommée, il présente tous les matins une revue de presse en wolof et anime l’émission à succès de faits divers Teuss ! sur Zik FM.
Deux ans plus tard, voilà Ahmed Aïdara à la tête de la mairie de Guédiawaye, l’une des plus grandes communes de la banlieue de Dakar. Une belle prise pour l’opposition : depuis 2014, cette ville de 330 000 habitants était dirigée par Aliou Sall, frère du président Macky Sall. Mais, à l’issue des élections locales du 23 janvier dernier, le maire sortant, qui portait les couleurs de Benno Bokk Yakaar a été défait par l’animateur-vedette, investi, par la coalition Yewwi Askan Wi.
Une victoire qu’Ahmed Aïdara a préparée pendant une longue date. En 2017, il avait lancé son propre mouvement, Guédiawaye Laa Bokk. « Il utilisait déjà beaucoup l’antenne pour parler des difficultés que rencontraient les populations, afin d’attirer l’attention des autorités ».
« On pensait que son mouvement était une initiative citoyenne, mais on s’est trompé. Il avait déjà ses objectifs », témoignaient ses anciens collègues.
Dès lors, à l’antenne, Ahmed Aïdara multiplie les diatribes contre le pouvoir et cible particulièrement le frère du président. Ses piques prennent de l’ampleur en 2019, au moment de l’affaire Petro-Tim, dans laquelle apparaît le nom d’Aliou Sall, directeur de la Caisse de dépôts et de consignations au moment des faits.
Aujourd’hui, ayant largement remporté le département de Guédiawaye sous la bannière de Yewwi Askan Wi, Ahmed Aidera aura l’opportunité de défendre d’une manière officielle les causes qui l’ont toujours tenu à cœur. Ses positions sans équivoque feront de lui, un député dont les débats seront certainement très attendus.
Un autre profil de l’opposition qui sera certainement remarqué dans cette législature est Thierno Alassane Sall tête de liste nationale de la Coalition AAR Sénégal. Membre fondateur de l’Apr, M. est un des principaux opposants du régime depuis 2017. Sa coalition qui se voulait la troisième voix, une alternative à la coalition au pouvoir Benno bokk Yaakaar et la principale force d’opposition, la grande coalition Yewwi-Wallu est sortie de ces joutes avec une mauvaise surprise, au vu des premiers résultats.
Toutefois, l’ancien ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement et ancien ministre de l’Énergie ne rendra certainement pas la tache facile à l’Etat au niveau de l’hémicycle.
Thierno Alassane Sall se définit comme « un universaliste qui cherche le progrès et la justice ». Il fait ses débuts politiques dans le parti de la gauche révolutionnaire, And-jëf, qui avait pour orientation « la laïcité, le socialisme, la démocratie, la justice sociale, l’équité, le respect des droits de l’homme et la coopération sur la base du respect mutuel et des avantages réciproques ». Il justifie la création du parti par le besoin d’apporter un nouveau souffle à la vie politique sénégalaise, avec une offre politique qui allie compétence, expérience et éthique. L’idéologie du parti s’inspire de la cosmogonie africaine tout en étant irriguée par des valeurs progressistes.
La République des Valeurs veut incarner le renouveau éthique et moral de la politique au Sénégal. Elle défend plusieurs idées. La République des Valeurs veut aussi agir pour la bonne gouvernance, qui permet d’exorciser le spectre d’une forme rédhibitoire de politique de la prédation qui vampirise l’État et entretient la corruption et les pratiques clientélistes. La République des Valeurs milite aussi pour la construction d’institutions fortes. Elle veut réinventer des utopies propres et des institutions politiques, sociales et économiques pour porter et réaliser la démocratie, la République, l’entreprise, l’éthique, la citoyenneté, la responsabilité, la gouvernance.
Pour faire advenir ce projet politique, la République des Valeurs s’adosse à un principe : « Réewum Ngor ».
Des profils qui entre autres, constituent une nouvelle force de l’opposition parlementaire.
Yaye Moussou TRAORE