Avant-hier, le président de la République de Russie, Vladimir Poutine a reçu le président des Émirats arabes unis Mohammed Al Nahyan. La rencontre s’est tenue au palais Konstantinovsky.
Cette visite du président des EAU a eu lieu quelques jours après l’entretien téléphonique entre Poutine et le prince héritier d’Arabie Saoudite Mohamed bin Salman Al Saud. C’était le 22 Septembre, à l’initiative de la partie saoudienne. Les deux hommes ont évoqué «les questions de coordination russo-saoudienne afin d’assurer la stabilité du marché mondial du pétrole ont été examinées. Les deux parties ont salué les efforts déployés dans le cadre de l’OPEP Plus et ont confirmé leur intention de continuer à adhérer aux accords conclus ». Le prince héritier Mohammed bin Salman avait informé que lors du Forum international «Semaine russe de l’énergie» qui a débuté hier à Moscou, «l’Arabie saoudite sera représentée à un niveau décent».
Les questions énergétiques sont au cœur de tous les échanges entre les plus grands membres de l’OPEP. D’abord, le président des Etats Unis, Joe Biden a tenté d’intervenir auprès des autorités saoudiennes pour une augmentation de la production du pétrole sur le marché mondial. Comprenant le jeu de l’Administration Biden, Vladimir Poutine a voulu prendre le contrepied du président américain en engageant des négociations avec l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis, respectivement 2e et 7eproducteur mondial de pétrole. L’Iran 5e producteur mondial et la Chine 8e mondial sont en phase avec la Russie.

Sur la question de l’énergie, le président russe a voulu être précis lors de la visite du président des Emirats Arabes Unis. Dans sa déclaration devant son hôte, le président russe dira : «nous travaillons activement dans le cadre de l’OPEP Plus. Je connais votre position, nos actions, nos décisions ne sont dirigées contre personne, nous ne nous rassemblons pas et ne le faisons pas de manière à créer des problèmes pour quiconque. Nos actions visent à créer la stabilité sur les marchés mondiaux de l’énergie, afin que les consommateurs d’énergie et ceux qui sont engagés dans la production, fournisseurs des marchés mondiaux, se sentent calmes, stables et confiants. Pour que l’offre et la consommation soient équilibrées. Par conséquent, nous répondons toujours aux besoins du marché, essayons de le rendre adéquat aux événements qui se déroulent ».
Par ailleurs, hier, lors du Forum International de la Semaine russe de l’énergie, le président Poutine est largement revenu sur la crise énergétique et les conflits entre la Russie et l’Europe autour du gaz. Il dira que «l’économie mondiale dans son ensemble et le secteur des carburants et de l’énergie connaissent, franchement, une crise aiguë associée à la dynamique instable des prix des ressources énergétiques, au déséquilibre de l’offre et de la demande, ainsi qu’aux actions franchement subversives des acteurs individuels du marché qui sont guidés uniquement par leurs propres ambitions géopolitiques, recourent à une discrimination pure et simple sur le marché et, si cela ne fonctionne pas, détruisent simplement l’infrastructure des concurrents ».
Il a par ailleurs évoqué le sabotage des gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2. Pour lui, « il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un acte de terrorisme international visant à saper la sécurité énergétique de tout un continent. La logique est cynique – détruire, bloquer les sources d’énergie bon marché, priver des millions de personnes, de consommateurs industriels de gaz, de chaleur, d’électricité et d’autres ressources et les forcer à acheter tout cela à des prix beaucoup plus élevés ».
Il a insisté à dire que «l’attaque contre Nord Streamsest devenue un dangereux précédent. Il montre que tout objet d’une importance critique des infrastructures de transport, d’énergie ou de communication est aujourd’hui menacé, quel que soit l’endroit dans le monde où il se trouve, par qui il est géré, posé sur le fond marin ou sur terre, sur terre ». Le président russe a aussi alerté sur les risques «des tentatives de saper le gazoduc Turkish Stream » par l’Ukraine.
De l’avis de Poutine, «il est désormais possible, en effet, d’imposer aux pays européens un gaz liquéfié naturel à grande échelle en provenance des États-Unis, dont la compétitivité est nettement inférieure à celle du gaz russe par gazoduc. Après tout, les prix du GNL américain sont beaucoup plus élevés, c’était bien connu de tout le monde avant, et maintenant encore plus, mais il y a des risques supplémentaires, en plus des indicateurs de prix. Les risques sont que tout cela soit très instable et que toutes les fournitures puissent « flotter » vers d’autres régions du monde. Et nous l’avons vu, soit dit en passant, et tout récemment, lorsque les pétroliers américains transportant du GNL vers l’Europe tournaient à mi-chemin et changeaient de destination parce que les vendeurs de GNL se voyaient offrir un prix plus élevé ailleurs. Dans le même temps, les intérêts des acheteurs européens ont été ignorés ».
Le président russe a dévoilé toute la disponibilité de son pays à fournir du gaz à l’Europe. Il a indiqué : «Je voudrais également vous rappeler qui est venu en aide à l’Europe à ce moment-là et a envoyé des fournitures de gaz supplémentaires sur le marché européen – la Russie. Cependant, les dirigeants de ces pays préfèrent ne pas s’en souvenir. Au contraire, ils considèrent qu’il est possible de nous reprocher un « manque de fiabilité ». Refusons-nous d’approvisionner? Nous sommes prêts à fournir et à fournir l’ensemble du volume dans le cadre de contrats. Nous fournissons l’ensemble du volume dans le cadre des contrats. Mais si quelqu’un ne veut pas prendre notre produit, qu’avons-nous à voir avec cela? C’est votre décision ».
Il a poursuit en rappelant : «Si nous arrivons à une décision commune avec les Européens de fournir du gaz par la branche survivante – et là une branche de Nord Stream 2, apparemment, a survécu … Malheureusement, nous ne sommes pas autorisés à inspecter cette branche, mais la pression dans le tuyau demeure. Peut-être qu’il est endommagé d’une manière ou d’une autre, nous ne le savons pas, parce qu’ils ne sont pas autorisés, comme je l’ai dit, à être examinés, mais la pression demeure, ce qui signifie, apparemment, qu’il est en état de fonctionnement. Sa capacité est de 27,5 milliards de mètres cubes par an, soit environ huit pour cent de toutes les importations de gaz en Europe ».
Il a répété en disant «nous ne limitons personne à quoi que ce soit, y compris la nécessité de fournir des volumes supplémentaires en automne et en hiver ».
Revenant sur les contrats, Poutine a souligné que «selon les estimations des experts, ce n’est que cette année que le mécanisme de tarification au comptant du gaz entraînera des pertes pour l’Europe d’un montant de plus de 300 milliards d’euros, soit environ deux pour cent du PIB de l’EUROzone. Ils auraient pu être évités si des contrats à long terme liés au pétrole avaient été utilisés ». Il a ensuite indiqué que «les professionnels s’assoient tous et comprennent de quoi je parle: la différence entre le marché au comptant et les prix des contrats à long terme est de trois, quatre fois. Et qui l’a fait ? Le sommes-nous? Ils l’ont fait eux-mêmes. En fait, ils nous ont imposé une telle façon de négocier. Simplement, en fait, ils ont forcé Gazprom à passer en partie à un lien vers le marché au comptant, et maintenant ils se refroidissent. Eh bien, c’est de leur faute ».
Le président russe a aussi déclaré que «rien que l’année dernière, la masse monétaire dans l’UE a augmenté d’environ un billion d’euros. Mais le problème est que que fera l’Europe de cet argent? Il va – tout comme d’autres biens, y compris les produits alimentaires – ramasser du gaz sur le marché mondial. Par conséquent, d’autres pays, principalement des pays en développement, devront payer trop cher pour ces ressources énergétiques ».
Selon Poutine, «la ressource qui arrive sur le marché européen est vendue littéralement à un prix triple, comme je l’ai déjà dit, et secoue l’inflation le long de la chaîne – dans la zone euro, elle a déjà atteint dix pour cent. Les Européens ordinaires souffrent : en un an, leurs factures d’électricité et de gaz ont plus que triplé. La population, comme au Moyen Âge, a commencé à s’approvisionner en bois de chauffage pour l’hiver ».
Se défendant d’être responsable d’une telle situation, le président russe a indiqué que les européens essayent«constamment de blâmer quelqu’un pour leurs propres erreurs, en l’occurrence la Russie. Nous devons nous blâmer nous-mêmes – je tiens à le souligner à nouveau ». Il a aussi précisé que cette situation n’est pas liée « aux actions dans le cadre d’une opération militaire spéciale en Ukraine, dans le donbass – pas du tout. C’est le résultat de politiques énergétiques malavisées au cours d’un certain nombre d’années précédentes. Un certain nombre d’années! ».
Au mois d’Aout 2022, le président Emmanuel Macron avait effectué une visite officielle en Alger. En début de cette semaine, Elisabeth Borne a effectué une visite en Algérie. Et les échanges porteraient sur des questions liées à l’énergie.
Au mois de Mai 2022, le chancelier allemand Olaf Scholz était en visite à Dakar. L’exploitation du gaz sénégalais a été au cœur des échanges avec le président sénégalais.
Michel DIOUF
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