Olivier Corten, chercheur associé au Groupe de recherche et d’information sur la paix et la sécurité (GRIP) s’est penché sur la crise au Niger. Le chercheur a d’abord rappelé le contexte de la situation. « Le mercredi 26 juillet 2023, aux environs de 8 heures du matin, le président de la République du Niger, Mohamed Bazoum, s’apprête à quitter sa résidence pour se rendre à son palais. La garde nationale l’en empêche sur les ordres du général Abdourahamane Tiani. Selon plusieurs sources concordantes, la France, qui dispose d’environ 1 500 soldats sur place, aurait été sollicitée pour intervenir dans les premières heures de la journée par Hassoumi Massaoudou, ministre des Affaires étrangères, et par Midou Guirey, commandant de la garde nationale. Le président Bazoum s’y oppose, privilégiant la carte des négociations. Aux environs de minuit, cependant, dix gradés en tenue militaire apparaissent à la télévision nationale pour annoncer la fin du régime et la constitution d’un « Conseil national pour la sauvegarde de la patrie », qui contrôle désormais l’essentiel du territoire et des institutions. Le 28 juillet, Tiani se proclame président de la République du Niger », a fait savoir Olivier Corten, dans l’étude qu’il a faite intitulée « La crise du Niger et les perspectives d’intervention militaire : que dit le droit international ? » et publiée par le GRIP.
Selon Olivier Corten, ce coup d’État a été très largement dénoncé à l’échelle internationale : le Secrétaire général des Nations unies (ONU), l’Union africaine (UA), l’Union européenne (UE), ainsi que des pays aussi différents que l’Algérie, le Kenya, les États-Unis, la France ou la Russie critiquent le putsch. Le 26 juillet 2023, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) – dont le Niger est un des membres fondateurs – condamne, elle aussi, cette « tentative de prise de pouvoir par la force ». Il faut dire que, selon plusieurs conventions et textes en vigueur sur le continent africain, les changements anticonstitutionnels de gouvernement sont contraires au droit international et passibles de sanctions. Dans le cas du Niger, la CEDEAO a considéré que celles-ci pouvaient prendre la forme d’une intervention militaire : le 30 juillet, elle se déclare prête à « [p]rendre toutes les mesures nécessaires, […] pour assurer le rétablissement de l’ordre constitutionnel en République du Niger » et précise que « lesdites mesures peuvent inclure l’usage de la force ».
Pour le chercheur, cette déclaration a suscité des commentaires variés et pas toujours concordants. Le 8 août 2023, le Mali et le Burkina Faso ont, quant à eux, envoyé une lettre à l’ONU dénonçant la CEDEAO qui, « en rupture totale avec la légalité internationale et la ́ légitimité, a fait le choix de privilégier les mesures coercitives, y compris le recours ́ à la force armée, contre un pays souverain ». L’Algérie, la Guinée, le Cap-Vert et la Russie ont également exprimé des doutes en ce sens. Il faut, en effet, rappeler que la Charte de l’ONU interdit le recours à la force dans les relations internationales, à l’exception des cas de légitime défense et des interventions autorisées par le Conseil de sécurité de l’ONU et sans préjudice d’une opération militaire menée avec le consentement de l’État concerné.
D’après l’auteur, si au moment où ces lignes sont écrites, aucune intervention militaire n’a eu lieu et ne se profile à brève échéance, la question de la légalité d’une telle action a été peu commentée dans la presse. Pourtant, les menaces répétées de la CEDEAO demandent que certains points soient clarifiés. Bien que la CEDEAO n’ait pas précisé quel serait le fondement d’une telle intervention, les deux arguments juridiques qui pourraient être avancés doivent, l’un comme l’autre, susciter les plus nettes réserves. Cet Éclairage montre qu’une organisation régionale ne peut intervenir militairement sur le territoire d’un de ces États membres sans autorisation du Conseil de sécurité et qu’elle ne peut pas, non plus, se fonder sur le consentement du président déchu Bazoum. En guise de conclusion, il explique que, au-delà de la violation de la Charte de l’ONU, une intervention de la CEDEAO créerait un dangereux précédent selon lequel une organisation régionale (voir un groupe d’États) aurait le droit de déclencher un conflit au nom de sa propre conception de ce qui constitue une juste cause. C’est, en d’autres termes, le délitement du régime encadrant le recours à la force armée qui est en jeu ; délitement dont les conséquences ne sont pas que théoriques.
L’illégalité de sanctions militaires adoptées par une organisation régionale sans autorisation du Conseil de sécurité
Olivier Corten dira à ce titre : Créée en 1975, la CEDEAO est avant tout une organisation de coopération économique entre États d’Afrique de l’Ouest. Au fil des années, elle se voit dotée de nouvelles compétences, notamment en matière de sécurité. Ainsi, le 10 décembre 1999, ses membres adoptent le Protocole sur le mécanisme de prévention, de gestion, de règlement des conflits, de maintien de la paix et de la sécurité (dit « Protocole de Lomé » du nom de la capitale togolaise où il a été signé). Ce dernier prévoit à ses articles 3 et 25 que, « en cas de renversement ou tentative de renversement d’un Gouvernement démocratiquement élu », un mécanisme impliquant « la constitution et le déploiement, chaque fois de besoin, d’une force civile et militaire pour maintenir ou rétablir la paix dans la sous-région » pourra être mis en œuvre. Quelques années plus tard, le 17 février 2012, la CEDEAO adopte un nouveau texte, l’Acte additionnel portant régime des sanctions à l’encontre des États membres qui n’honorent pas leurs obligations vis-à-vis de la CEDEAO. Ce texte évoque l’« imposition de la paix ou la restauration de l’ordre constitutionnel par l’utilisation de la force légitime ». Ces dispositions marquent la transformation de la CEDEAO d’une organisation de type économique à une organisation de sécurité régionale pouvant théoriquement prendre des sanctions de type militaire. L’organisation dispose même d’une force permanente à cette fin : la Force en attente de la CEDEAO (FAC).
Mais ces sanctions peuvent-elles, pour autant, être mises en œuvre sans autorisation du Conseil de sécurité de l’ONU ? La question semble tranchée par l’article 53 § 1 (chapitre VIII) de la Charte de l’ONU qui prévoit qu’« aucune action coercitive ne sera entreprise en vertu d’accords régionaux ou par des organismes régionaux sans l’autorisation du Conseil de sécurité ». Le principe selon lequel une organisation régionale ne peut intervenir militairement, y compris sur le territoire d’un de ses États membres, sans le consentement de l’ONU n’a d’ailleurs pas été remis en cause. L’article 83 § 2 du Traité révisé de la CEDEAO garantit, au contraire, que « dans le cadre de la réalisation de ses objectifs, la Communauté coopère également avec l’Organisation de l’Unité africaine
[aujourd’hui connue comme l’UA], le système des Nations unies, ainsi qu’avec toute autre organisation internationale ». De même, le Protocole de Lomé stipule que « conformément aux dispositions des chapitres VII et VIII de la Charte des Nations unies, la CEDEAO informera les Nations unies de toute intervention militaire effectuée dans le cadre des objectifs du présent Mécanisme ».
Au vu de ces dispositions, il est difficile de conclure que les États ouest-africains aient entendu s’émanciper du système de la Charte de l’ONU. Un telle émancipation n’aurait, en tout état de cause, pas été possible et ce pour deux raisons. D’une part, selon l’article 103 de la Charte de l’ONU, le Charte prévaut sur tous les autres accords internationaux en cas de contradiction. D’autre part, les règles relatives au recours à la force établies dans la Charte de l’ONU sont considérées comme « impératives », c’est-à-dire qu’aucun État ne peut y déroger, notamment par la conclusion de traités (comme le Protocole de Lomé, par exemple). Autrement dit, les accords de la CEDEAO ne prévalent pas sur la Charte de l’ONU et n’auraient, par ailleurs, pas pu prétendre y déroger.
L’analyse de la pratique, bien qu’ambiguë, invite à la même conclusion. Deux précédents méritent, plus particulièrement, d’être mentionnés. En février 1998, la CEDEAO est intervenue militairement en Sierra Leone afin de rétablir Ahmed Tejan Kabbah, déposé quelques mois plutôt par le Conseil révolutionnaire des forces armées (AFRC), à la présidence21. Sans l’autoriser, le Conseil de sécurité avait approuvé l’opération dans plusieurs résolutions22. En l’espèce, la CEDEAO s’appuyait cependant sur un argument difficilement transposable à la situation actuelle au Niger : ses troupes étaient déjà présentes sur place avec le consentement de toutes les parties au conflits et avaient, au surplus, été attaquées par le pouvoir de Johnny Paul Koroma, issu du coup d’État23. Une autre pratique intéressante est celle de l’UA après l’élection contestée de Pierre Nkurunziza à un troisième mandat de président de la République du Burundi. Le 17 décembre 2015, le Conseil de paix et de sécurité de l’UA menace le pays d’une intervention s’il n’accepte pas le déploiement d’une force de maintien de la paix. À ce stade, l’UA semblait affirmer qu’elle avait le droit de prendre des mesures militaires indépendamment des procédures instituées par le Chapitre VIII de la Charte des Nations unies. Les semaines qui ont suivi ont montré qu’il n’en était rien. Devant le refus du Conseil de sécurité d’autoriser une intervention, l’UA renonce au nom de la nécessité de respecter la souveraineté et l’intégrité territoriale du Burundi.
Toujours selon Olivier Coerten, un dernier argument doit être examiné dans le cas spécifique du Niger : s’il ne l’a pas formellement autorisée, le Conseil de sécurité est loin d’avoir condamné la menace de recourir à la force émise par la CEDEAO. Dans une déclaration à la presse le 28 juillet 2023, il a même affirmé son « appui aux efforts faits par la CEDEAO, l’UA et les Nations unies » et « salué les déclarations par lesquelles ces organisations ont réaffirmé leur opposition à toute prise de pouvoir par des moyens anticonstitutionnels » 26. Cette déclaration ne pourrait-elle pas être interprétée comme une sorte d’autorisation implicite du recours à la force contre les putschistes ? Des arguments de ce type ont été évoqués à plusieurs reprises par le passé, que ce soit pour justifier l’intervention de l’OTAN au Kosovo en 1999 ou la guerre lancée par les États-Unis contre l’Irak en 2003.
Ces arguments n’ont cependant jamais été acceptés, le terme « autorisation » impliquant, par définition, une décision claire et non équivoque.
L’absence d’un droit d’intervention militaire fondé sur le consentement d’une autorité totalement dépourvue de pouvoir effectif
L’auteur indique dans une interview publiée le 3 août 2023 dans le Washington Post, le président déchu du Niger, Mohamed Bazoum, a fait la déclaration suivante : « En ces heures difficiles, j’appelle le gouvernement des États-Unis et l’ensemble de la communauté internationale à nous aider à restaurer l’ordre constitutionnel. » Peut-on déduire de cette déclaration une invitation justifiant une intervention militaire ? La question est cruciale car, sur le principe, un consentement juridiquement valide aurait pour effet de placer la situation sous l’angle de la coopération entre une organisation et l’un de ses États membres, et non plus de sanctions de la première contre le second. C’est cette représentation de la crise qui effleure dans certaines déclarations de la CEDEAO qui parlent d’une « tentative de coup d’État », comme si aucun changement de gouvernement n’avait effectivement eu lieu. Sur le site de l’organisation, Bazoum est d’ailleurs encore indiqué comme étant le chef d’État du Niger. Quant aux putschistes, ils ne représenteraient qu’eux-mêmes. C’est aussi conformément à cette vision des choses que la France refuse de traiter avec les nouvelles autorités du pays. Seul le président Bazoum est considéré comme juridiquement apte à se prononcer au nom du pays. Une demande d’aide de sa part pourrait, alors, justifier l’intervention.
Ce raisonnement se heurte, toutefois, à plusieurs obstacles : d’une part, un consentement clair à une intervention militaire de la CEDEAO peut difficilement être déduit de ses déclarations ; d’autre part, bien que refusant de démissionner et retenu au sein de sa résidence à Niamey, Mohamed Bazoum n’exerce plus, dans les faits, son autorité sur le territoire du Niger.
Il est, d’abord, loin d’être évident que Bazoum ait consenti à une opération militaire menée par la CEDEAO. S’il appelle la communauté internationale à « aider à restaurer l’ordre constitutionnel », il ne précise pas quels moyens il convient d’employer à cette fin. Or, pour être juridiquement valide et pouvoir donner lieu à une intervention armée, un consentement doit remplir plusieurs conditions : il doit être clairement établi, réellement exprimé (par opposition au consentement présumé) et spécifique (et non pas vague ou général) 32. En d’autres termes, lorsque des invitations à intervenir militairement sont exprimées, elles ne doivent laisser aucune place au doute.
Dans la pratique, les chefs d’État prennent généralement soin de préciser, outre les objectifs, les modalités de l’opération. À titre d’illustration, lorsque le président yéménite Hadi s’adresse aux États du Conseil de coopération du Golfe (CCG) en 2015, il leur demande « d’apporter un appui immédiat au Yémen, par tous les moyens et mesures nécessaires, y compris l’intervention militaire, pour protéger le Yémen ». On le constate, on est bien au-delà d’un appel à « l’aide » à la « communauté internationale ».
Au demeurant, souligne le chercheur, la décision de Bazoum de se référer à la Cour de Justice de la CEDEAO le 18 septembre 2023 afin que l’État du Niger soit « condamné au rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel », combiné avec son refus de solliciter l’aide de la France aux premières heures du coup d’État, suggèrent que le président déchu privilégie la voie diplomatique à l’option militaire.
Il ajoute qu’une autre limite de l’argument du consentement tient à la possibilité pour le président Bazoum de valablement formuler une invitation à une intervention militaire, alors qu’il ne dispose plus d’aucun pouvoir effectif. Comme l’a assez rapidement estimé l’UA, un coup d’État, et non une simple tentative, a eu lieu. Le pouvoir en place a été renversé et une nouvelle autorité, le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie, présidé par Tiani, a été mise en place. C’est d’ailleurs l’État du Niger, et non ses dirigeants agissant à titre privé, qui a été suspendu de l’UA le 22 août 2023 et qui fait l’objet de sanctions économiques diverses de la part de la CEDEAO. De même, le représentant de cet État à l’ONU est désormais celui nommé par le nouveau pouvoir en place. Tous ces éléments concourent à montrer que, bien qu’ils soient par ailleurs considérés comme illégitimes, ce sont les putschistes qui représentent l’État. Ce sont donc eux, également, qui ont le pouvoir d’accepter une opération militaire au Niger.
Si cette conclusion peut sembler cynique (particulièrement lorsque le gouvernement déchu a été démocratiquement élu), elle est, à nouveau, confirmée par la pratique. Les États montrent une grande réticence à se fonder sur une invitation d’une autorité qui, même considérée comme légitime, est totalement dépourvue de pouvoir effectif. Le cas du président Jean-Bertrand Aristide, renversé par un coup d’État en Haïti en 1993 et qui avait ensuite plaidé pour une intervention militaire extérieure, est significatif. Désirant donner suite à cette requête, les États-Unis se sont en effet assurés d’obtenir une autorisation du Conseil de sécurité de l’ONU avant d’entreprendre l’opération Uphold Democracy. Manifestement, le seul appel d’un président légitime mais déchu n’a pas été considéré comme suffisant pour fonder une intervention. Un exemple plus récent, et tout aussi instructif, est celui de l’intervention russe en Ukraine (et plus spécifiquement en Crimée) en 2014. À l’époque, Moscou s’est appuyé sur une demande formulée par le président de l’Ukraine, Viktor Yanukovych, renversé par ce que la Russie a considéré comme un « coup d’État ». Cette fois, le Conseil de sécurité n’a pas été saisi et n’a, a fortiori, pas donné son autorisation. L’opération militaire a dès lors été largement condamnée.
Certes, la pratique n’est pas entièrement cohérente. Lorsque le président du Yémen, Abdrabbo Mansour Hadi, a été renversé par les rebelles Houtis, son appel (évoqué plus haut) aux États du CCG a généralement été considéré comme valable. De même, et pour revenir en Afrique de l’Ouest, l’opération menée en Gambie en 2017 pour soutenir le président fraîchement élu mais totalement dépourvu d’effectivité, Adama Barrow, a elle aussi été largement acceptée. Mais, dans ces deux cas, il faut souligner que le Conseil de sécurité avait clairement affirmé que l’autorité concernée était juridiquement habilitée à consentir à une intervention militaire extérieure.
Des discussions suivies avaient eu lieu à ce sujet au sein des Nations unies et, à défaut d’autoriser une intervention (une solution alors préconisée par la CEDEAO dans le cas de la Gambie), on a préféré conférer à une autorité légitime un droit d’appeler une organisation régionale à l’aide. Pour ce qui concerne le Niger, il est loin d’être évident qu’une telle habilitation ait été reconnue, aucune résolution sur le sujet n’ayant été adoptée.
Pour conclure, Olivier Corten a évoqué qu’il appelle « le délitement de l’interdiction du recours à la force et ses conséquences ». Et c’est pour dire que quel que soit l’argument que l’on retienne – droit d’intervention des organisations régionales ou fondé sur l’appel des autorités déposées –, l’accepter reviendrait à permettre à des organismes régionaux (la CEDEAO et l’UA en Afrique, l’OTAN en Europe et au-delà, l’Organisation du Traité de sécurité collective en Europe orientale, la Ligue des États arabes au Moyen-Orient ou encore le CCG dans le Golfe) de recourir à la force au nom de causes qu’ils désigneraient eux-mêmes comme « justes », notion subjective s’il en est.
A en croire le chercheur, si le rétablissement par la force d’un pouvoir démocratiquement élu et illégalement délogé par une junte militaire peut à première vue apparaître comme juste, la question s’avère, à la réflexion, plus complexe. D’abord parce que les effets d’une intervention au Niger sont difficilement prévisibles. Dans l’immédiat, l’annonce de la création d’une Alliance des États du Sahel entre Bamako, Ouagadougou et Niamey le 16 septembre 2023 illustre déjà les effets qu’une menace d’intervention (même non réalisée) peut générer. Au travers de cette alliance, ces trois États – tous sous le coup de sanctions de la CEDEAO depuis les coup d’État qui y ont successivement eu lieu en 2021, 2022 et 2023 – considèrent que « toute attaque contre la souveraineté et l’intégrité territoriale d’une ou plusieurs parties contractantes sera considérée comme une agression contre les autres parties ». Cette terminologie implique, comme ils l’ont indiqué à plusieurs reprises, que les deux voisins du Niger l’aideraient militairement s’il était visé par une opération militaire. Que l’intervention militaire de la CEDEAO ait lieu ou non, de tels événements témoignent d’une accélération de la fragmentation de l’espace sécuritaire ouest-africain et, à tout le moins, d’une recrudescence des tensions dans la région.
Enfin, estime l’auteur, une intervention militaire au Niger sans autorisation du Conseil de sécurité de l’ONU établirait un précédent aux conséquences déstabilisatrices. Les règles relatives au recours à la force s’appliquent à tous les États et à toutes les organisations sans distinction. Intervenir militairement sans y avoir le droit, c’est contribuer au délitement d’un ordre juridique qui s’est progressivement consolidé afin de prévenir, autant que possible, la guerre. Puisque tous les États sont théoriquement égaux, s’arroger le droit de recourir à la force armée sans égard pour la Charte de l’ONU, c’est reconnaître aux autres le droit d’en faire de même. La façon dont les précédents du Kosovo et de l’Irak ont été, et sont encore, mobilisés par la Russie pour justifier l’intervention en Géorgie en août 2008 et l’invasion de l’Ukraine en février 2022 montre que les impacts ne sont pas que théoriques…
Synthèse de Aminata DIARRA