Se penchant sur la sempiternelle problématique des migrations, notamment au Sahel, Alia Fakhry chercheuse en migration et analyste politique estime que les efforts financés par l’Union européenne encouragent les gouvernements du Sahel à donner la priorité à la protection des frontières plutôt qu’à celle des personnes en déplacement. Dans un rapport qu’elle a effectué sur le sujet et intitulé « Au-delà des frontières : Impacts des interventions de l’UE sur les migrations au Sahel », elle y montre comment depuis 2015, les partenaires européens financent des interventions au Sahel pour aider des pays tels que le Niger, le Burkina Faso et le Mali à renforcer leurs capacités à réguler et contrôler les flux migratoires. Selon la consultante auprès de groupes de réflexion et d’organisations internationales sur les questions relatives aux dynamiques et aux politiques migratoires en Europe, en Afrique du Nord, au Sahel et en Méditerranée occidentale, ainsi que sur la coopération entre l’Union européenne et l’Afrique en matière de migration, à travers ces interventions, l’Union européenne a créé des précédents et encouragé des politiques axées sur la sécurité qui consolident les intérêts des gouvernements du Sahel en la matière et affaiblissent la capacité des organisations régionales et continentales à établir des cadres migratoires globaux. Le rapport est publié par l’Institut d’études de sécurité africain (ISS).
Dans ce rapport, Alia Fakhry a d’emblée estimé que le chef de la diplomatie de l’Union européenne (UE), Josep Borrell, a déclaré lors d’une interview en 2020 que « la frontière de l’Europe ne se trouve pas en Méditerranée, mais au sud du Sahel ». Cette déclaration explique pourquoi l’UE et ses États membres ont considérablement accru leur engagement en matière de migration au Sahel au cours de la dernière décennie.
L’attention portée par les Européens aux migrations dans le Sahel n’est pas nouvelle. Mais elle s’est intensifiée, d’abord en 2011 à la suite d’une crise sécuritaire régionale qui s’est développée à partir du centre du Mali, et plus encore après 2015, lorsque l’Europe a connu un afflux en provenance de la Méditerranée. Depuis 2015, les partenaires européens financent des interventions au Sahel dans le but de renforcer les capacités des États à réguler et contrôler les migrations afin de réduire les flux migratoires vers le nord qui traversent la région du Sahel. Des initiatives telles que le Fonds fiduciaire d’urgence de l’UE pour l’Afrique (FFUE pour l’Afrique) (dont les principaux bénéficiaires sont le Niger, le Burkina Faso et le Mali) ont mis davantage l’accent sur le renforcement des composantes du secteur de la sécurité chargées du contrôle des migrations.
Des recherches suggèrent que cette logique d’intervention a entraîné plusieurs conséquences négatives complexes dans la région. On observe notamment une augmentation de l’insécurité et de l’instabilité5, une perturbation des moyens de subsistance et une modification des pratiques de contrebande et des routes de migration.
Cette approche a également mis en danger la vie des migrants et détérioré les relations déjà fragiles entre les populations et les États de deux années de pandémie mondiale et d’un manque d’élan politique, les mouvements migratoires du Sahel vers la Méditerranée ont continué à faire l’objet d’une grande attention.
Malgré les critiques, l’approche de l’UE en matière de migration au Sahel a été considérée comme une réussite reproductible et son modèle reste inchangé. À la suite d’une augmentation des arrivées irrégulières dans l’UE à la fin de l’année 2022, l’UE a publié un plan d’action pour la Méditerranée centrale. Ce plan réaffirme l’importance de la coopération avec les pays d’origine et de transit des migrants en Afrique du Nord et au Sahel, en particulier le Niger.
La propagation du conflit depuis le centre du Mali vers le Niger et le Burkina Faso voisins, l’intensification des attaques contre les civils, la militarisation de la région et les conflits locaux liés aux ressources ont abouti à une situation d’insécurité généralisée qui entraîne des déplacements de population inédits. Le HautCommissariat des Nations Unies pour les réfugiés
(HCR) estime que le conflit au Sahel a conduit plus de 2,5 millions de personnes à se déplacer au cours de la
Au moment de l’interview de 2020, Josep Borrell et la Commission de l’Union européenne préparaient le lancement d’un nouveau partenariat avec l’Afrique qui incluait, entre autres priorités, la promotion de « partenariats équilibrés, cohérents et globaux en matière de migration ». Si la nouvelle stratégie a souffert de dernière décennie, dont 2,1 millions à l’intérieur de leur propre pays (PDI). Diverses raisons se recoupant parfois, mais font souvent face à des risques de protection similaires.
L’approche de l’UE en matière de migration au Sahel repose sur l’idée selon laquelle l’instabilité alimente la migration irrégulière, mais elle n’aborde pas la crise inédite des déplacements forcés qui découle de cette instabilité dans la région. Dans un contexte où les crises sécuritaires, politiques et de déplacement se chevauchent, le présent rapport conclut que l’approche de l’UE en matière de migration au Sahel est inadéquate.
Par le passé, l’engagement de l’UE au Sahel a créé des précédents qui ont encouragé les États du Sahel à adopter des politiques migratoires axées sur la sécurité conformes aux intérêts de leurs gouvernements en la matière. Ces politiques ont également été rendues possibles par l’incapacité des organisations régionales et continentales à établir des cadres migratoires globaux.
À mesure que le conflit s’intensifie, les déplacés internes entreprennent des voyages plus longs pour se réinstaller plus loin de leur région d’origine, traversant parfois les frontières nationales. Par exemple, un nombre croissant de personnes déplacées en provenance du sud du Burkina Faso et du Mali se retrouvent dans les États côtiers de la Côte d’Ivoire et du Ghana15.
Dans le même temps, la mobilité régionale reste un mode de vie pour de nombreux habitants du Sahel. Les commerçants transfrontaliers, les travailleurs saisonniers, les communautés transhumantes et d’autres personnes en quête d’opportunités dépendent du passage des frontières pour assurer leur subsistance. Les données indiquent que plus de 80 % des immigrants vivant en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale sont originaires d’un autre pays de la région16. Cela illustre la nature mixte des schémas de mobilité au Sahel : un certain nombre de personnes se déplacent à l’intérieur ou au-delà des frontières17, avec différents statuts juridiques et pour
à la migration de transit dans la région du Sahel central ne s’arrêteront probablement pas là. Au contraire, les menaces perçues à l’origine de ces politiques n’ont fait qu’augmenter (conflits armés, déplacements massifs, activités terroristes), surtout dans un contexte d’instabilité politique croissante. Il est donc primordial de faire le bilan des récentes interventions en matière de migration dans la région afin d’éclairer l’élaboration des futures politiques.
Le présent rapport évalue l’approche de l’UE en matière de migration et son influence sur les développements politiques dans la région du Sahel. L’analyse se concentre sur la période après 2015, qui a vu une intensification de l’engagement de l’UE dans la région. La recherche est basée sur une série d’entretiens menés avec des décideurs nationaux et des praticiens de la migration à Niamey (Niger) et à Dakar (Sénégal) ; des entretiens à distance avec des bailleurs de fonds
externes ainsi que des experts internationaux et régionaux ; et une discussion d’experts en ligne organisée selon la règle de Chatham House en avril 2023. La liste complète et anonyme des entretiens réalisés dans le cadre de cette recherche est disponible en annexe. Le rapport répond aux questions suivantes :
- Quelle est l’approche de l’UE en matière de migration au Sahel ?
- Comment l’UE a-t-elle influé sur l’élaboration des politiques migratoires au Sahel ?
- Dans quelle mesure l’approche de l’UE est-elle adaptée à la dynamique migratoire actuelle dans la région ?
Le présent rapport examine au préalable l’approche de l’UE en matière de migration au Sahel. Il analyse ensuite l’influence de l’UE sur les cadres politiques régionaux en matière de migration et les effets du renforcement des frontières sur la mobilité régionale. Puis il étudie la situation des réfugiés et des personnes déplacées au Sahel, ainsi que les solutions à la crise actuelle. Le rapport se termine par une série de recommandations à l’intention des décideurs européens et africain.
L’approche de l’UE en matière de migration au Sahel
L’approche de l’UE au cours de la dernière décennie présente trois caractéristiques principales qui sont examinées ci-dessous :
- Il s’agit d’une vision axée sur les routes qui vise à stopper la mobilité vers le nord.
- Elle confond les politiques de sécurité et les politiques migratoires.
- Il s’agit d’une démarche basée sur le financement.
Stopper la mobilité en direction du nord
Une décennie de conflits au Sahel a modifié l’écosystème migratoire régional. La chute en 2011 du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi – qui a collaboré avec les pays européens pour stopper les départs de migrants – puis l’enfoncement du pays dans la violence ont poussé les travailleurs migrants à chercher refuge de l’autre côté de la Méditerranée. La propagation de l’insurrection violente depuis le centre du Mali vers le Burkina Faso et le Niger a provoqué une crise de déplacements sans précédent, avec plus de 2,5 millions de personnes déplacées au cours de la dernière décennie. Dans ce contexte, et face à l’augmentation des arrivées irrégulières en provenance de la Méditerranée centrale, l’UE et ses États membres ont cherché à renforcer les partenariats avec les pays d’origine et de transit afin de freiner la progression de la migration irrégulière le long des « routes migratoires ». En 2015, l’UE a réuni les chefs d’État africains lors du Sommet de La Valette et a déclaré que la gestion des migrations était une responsabilité partagée des « pays de transit et d’origine des migrants ». Le FFUE pour l’Afrique a été lancé pour financer des initiatives mises en œuvre par des organisations internationales et des agences des Nations Unies afin d’accroître les capacités des États en matière de gouvernance des migrations et de contrôle des frontières. L’objectif était de réduire la migration de transit dans des pays comme le Niger, le Tchad et le Mali. Les partenaires internationaux ont également adopté cette approche axée sur les routes car ils ont bénéficié d’un financement spécifique de l’UE. En 2015, le HCR a nommé un envoyé spécial pour la Méditerranée et alloué des fonds pour cibler les mouvements mixtes en Méditerranée centrale selon une approche régionale ou basée sur les routes.
L’approche de l’UE a généralement réduit les migrations irrégulières en Méditerranée centrale, en Italie et au Niger à partir de 2018
Les chercheurs décrivent cette démarche comme un « processus d’externalisation de la politique migratoire qui consiste en un transfert par l’Union européenne de la gestion de la politique migratoire aux pays d’origine et de transit ». Cependant, le processus d’externalisation n’est pas seulement le fruit des intérêts migratoires européens, mais aussi le résultat de négociations avec les pays partenaires.
Au Mali, par exemple, les autorités nigériennes ont refusé d’inclure la migration dans le mandat des deux missions civiles de l’UE24. En revanche, le Niger s’est montré intéressé par la coopération avec les partenaires de l’UE, principalement pour des raisons humanitaires liées aux financements européens. Et compte tenu de la faible diaspora nigérienne en Europe, le Niger n’était pas soumis aux pressions des gouvernements européens pour assurer le retour de ses ressortissants25. Les gouvernements de la région du Sahel sont également confrontés à des préoccupations sécuritaires qui requièrent une attention immédiate. L’ancien président du Niger, Mahamadou Issoufou, a justifié la coopération avec les acteurs internationaux par la nécessité d’empêcher les passeurs de migrants d’introduire des armes au Niger. L’ancien président Mohamed Bazoum considère quant à lui que les passeurs de migrants sont impliqués dans des réseaux criminels plus vastes liés à des groupes terroristes.
L’approche de l’UE dépend donc des évolutions des politiques nationales dans les pays partenaires, qui sont analysées ci-dessous. Les données disponibles sur les mouvements de transit et les arrivées irrégulières en Europe suggèrent que cette approche a réussi à réduire le volume de déplacements le long de la route de la Méditerranée centrale. Les arrivées irrégulières en Italie ont diminué en 2018 et les voyages de transit à travers le Niger ont également reculé de manière drastique.
Ces données sont toutefois difficiles à interpréter. Alors que les voyages de transit détectés à travers le Sahel et les arrivées sur les côtes européennes ont potentiellement diminué, le nombre d’arrivées en Libye et en Algérie reste inchangé. Selon un spécialiste des migrations mixtes, les changements de politique ont eu un impact sur les flux migratoires, mais « la Libye reste en grande partie une boîte noire [inconnue] » .
Les données disponibles pour évaluer le succès de cette politique sont fragmentaires. Malgré cela, l’approche de l’UE reste centrée sur la consolidation des frontières et la coopération transfrontalière le long des routes migratoires. L’UE a récemment dévoilé deux initiatives de l’Équipe Europe pour les routes de la Méditerranée centrale et occidentale. Elles rassemblent les projets et initiatives financés par l’UE et ses États membres le long de ces routes. De nouvelles initiatives de l’UE élargissent l’approche axée sur les routes pour favoriser la coopération entre le Sahel et les pays côtiers du golfe de Guinée afin d’accroître les capacités aux frontières et de ralentir la propagation des menaces pour la sécurité régionale.
Confusion entre les objectifs de sécurité et les intérêts en matière de migration
Les décideurs européens considèrent que les pays du Sahel central, à savoir le Burkina Faso, le Mali et le Niger, sont au centre d’un « arc d’instabilité » qui s’étend jusqu’au golfe de Guinée et aux rives de la Méditerranée. Si la stratégie de l’UE pour le Sahel reconnaît que « l’instabilité contribue également à la migration irrégulière », la lutte contre les flux migratoires indésirables a été un pilier central de l’engagement européen au Sahel. Cette attitude est d’autant plus marquée depuis 2015, année au cours de laquelle l’UE a connu une augmentation des arrivées. De fait, le pic de l’interventionnisme de l’UE en matière de sécurité au Sahel en 2016 coïncidait avec les intérêts en matière de migration.
Au cours de la dernière décennie, les pays européens ont multiplié les interventions politiques, militaires et civiles dans la région pour s’attaquer aux causes profondes de l’instabilité. Il en résulte un amalgame entre les menaces sécuritaires et la migration, ainsi qu’un chevauchement des mandats des outils de politique étrangère de l’UE au Sahel. Cela montre dans quelle mesure « les préoccupations sécuritaires déterminent également la formulation et la mise en œuvre d’autres volets de la politique étrangère de l’UE ».
Par exemple, la Mission de renforcement des capacités de l’UE au Niger (EUCAP) destinée aux forces de sécurité internes a vu son mandat élargi en 2016 pour inclure la lutte contre la migration irrégulière: « À l’époque, en 2016, tout le monde était mobilisé pour travailler sur la migration […] Ajouter la migration au mandat traduisait l’engagement politique sur la question »36. L’inclusion de la migration dans le mandat de la mission a permis d’augmenter les fonds alloués à la mission, même si les chercheurs estiment que l’EUCAP a enregistré des résultats limités sur le plan de la mise en œuvre. À la suite d’un récent accord entre l’EUCAP et l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex), la mission envisage de renforcer la formation à l’analyse des risques liés à la migration. Par ailleurs, les équipes d’enquête conjointes et les partenariats opérationnels conjoints réunissant les forces de l’ordre espagnoles et locales ont mené des enquêtes sur le terrain pour mettre fin aux activités de contrebande au Niger et au Mali. Au Mali, le Partenariat opérationnel conjoint (POC) renforce les capacités de la police et de la justice à engager des poursuites dans les affaires de contrebande et de franchissement irrégulier des frontières. Malgré la multiplication des initiatives en matière de migration et de sécurité dans les pays du Sahel, les interventions de l’UE souffrent d’un manque de coordination et de cohérence. Un spécialiste de la protection explique que l’EUCAP n’est pas représentée de façon régulière aux réunions du groupe de travail sur la migration organisées par le ministère de l’Intérieur du Niger. « Quant à Frontex, je ne sais même pas s’ils ont quelqu’un qui travaille ici [au Niger] ».
« Une gouvernance des migrations par le financement »
L’approche de l’UE en matière de migration au Sahel est souvent critiquée pour sa vision à court terme. Nombreux sont ceux qui affirment que l’UE a réduit « une crise multidimensionnelle […] à des préoccupations de sécurité étroites, davantage alignées sur les besoins européens à court terme que sur la recherche d’une solution durable à la crise au Sahel ». L’intervention de l’UE en matière de migration au Sahel repose certes sur des objectifs clairs, mais ceux-ci manquent de cohérence stratégique. Les actions de l’UE se traduisent donc par une somme de programmes, de projets techniques, de forums politiques et de canaux de financement qui ne correspondent pas à l’objectif de mise en œuvre d’une « stratégie intégrée de sécurité et de développement » pour la région. Par exemple, la situation actuelle d’urgence humanitaire qui se déroule dans le contexte d’une crise politique et sécuritaire aiguë devrait inciter les partenaires européens à revoir leur stratégie en matière de migration et de déplacement. Mais selon les praticiens de l’humanitaire et de la migration, les financements et l’attention politique accordés aux questions liées aux déplacements forcés (réfugiés et déplacés internes) sont insuffisants.
Les acteurs humanitaires indiquent avoir du mal à attirer l’attention des donateurs sur la crise des déplacements qui sévit dans différentes régions du Burkina Faso, du Mali et du Niger, en particulier la zone des trois frontières. Selon eux, l’attention politique se porte sur les mouvements vers le nord. Ceux-ci ayant diminué, le financement des initiatives en matière de migration a également reculé45. Les autorités nationales souhaiteraient également que les donateurs internationaux et européens investissent davantage dans les déplacements : « Nous essayons d’impliquer autant que possible les partenaires ». Cependant, en examinant les plans d’action stratégiques de l’UE pour le Sahel, la question du déplacement forcé des déplacés internes ou des réfugiés est rarement mentionnée comme une priorité, alors que l’objectif de lutte contre la migration irrégulière est cité à plusieurs reprises. En ce qui concerne la migration, le plan d’action régional de l’UE pour le Sahel 2015–2020 stipule que « l’UE devrait se concentrer sur les points suivants : 1) […] la migration irrégulière, la contrebande et le trafic d’êtres humains ; 2) […] la maximisation de l’impact des migrations et de la mobilité sur le développement; 3) la promotion de la protection internationale; 4) l’organisation de la mobilité et la migration légale ».
Comme l’a déclaré un spécialiste des migrations interrogé dans le cadre de ce rapport, « en chiffres absolus, l’UE cible un nombre relativement faible de migrants par rapport à l’ampleur des déplacements dans la région ». L’on pourrait donc avancer que l’UE assure la gouvernance des « migrations par le financement ». Comme l’expliquent Evangelia Tsourdi et al. dans un document d’information, le financement apparaît comme un « instrument non réglementaire essentiel qui assure le lien entre la formulation et la mise en œuvre des politiques ». En 2015, l’UE n’avait pas de programme de financement spécifique dédié à la gouvernance migratoire. Elle a alors créé le FFUE pour l’Afrique en vue de financer des initiatives sur les questions de migration dans son voisinage méridional en mobilisant un budget total de 7 milliards d’euros. Avec la fin du financement et des projets dans le cadre du FFUE pour l’Afrique, l’UE a décidé d’ancrer la gouvernance des migrations dans des canaux plus larges de financement du développement. Le nouvel instrument de voisinage, de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI – Europe dans le monde) vise à simplifier et à rationaliser les différents canaux de financement dédiés à la coopération internationale.
Sur une enveloppe totale de 79,5 milliards d’euros, 10 % doivent être consacrés à des initiatives en matière de migration (soit un budget équivalent à celui du FFUE pour l’Afrique). Les projets financés dans le cadre du FFUE pour l’Afrique ont été controversés, car nombre d’entre eux n’abordaient pas nécessairement les questions liées à la gouvernance des migrations, mais ciblaient ce que l’UE a appelé les « causes profondes des migrations et des déplacements ». Un fonctionnaire de la Commission estime qu’environ un tiers des projets financés dans le cadre du FFUE pour l’Afrique visaient des causes profondes dans un sens très large. Par ailleurs, en raison des critiques, l’IVCDCI utilise une nouvelle méthodologie pour attribuer les « financements liés à la migration ». Pour être financés dans le cadre de l’enveloppe « migration » de l’IVCDCI, les projets doivent avoir la migration comme objectif principal (représentant 100 % du budget du projet) ou objectif significatif (40 % du budget du projet).
Le renforcement des frontières nationales entrave les migrations régionales
Des cadres politiques régionaux sous influence : La migration au sein de la région du Sahel est en grande partie constituée de mouvements intrarégionaux. Les données suggèrent que plus de 80 % des immigrants vivant en Afrique occidentale et centrale sont originaires d’un autre pays de la région. En tant que telle, la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest57 (CEDEAO) est une pionnière de la libre circulation régionale en Afrique. Le protocole de 1979 sur la libre circulation, le droit de résidence et d’établissement permet aux citoyens de la CEDEAO de voyager sans visa dans la région. Le protocole de 1990 consacre en outre le droit d’établissement des commerçants.
Cependant, les protocoles de la CEDEAO n’ont jamais été pleinement mis en œuvre par les États membres, ce qui a rendu le projet de libre circulation régionale vulnérable aux ajustements motivés par des intérêts visant à ralentir la migration régionale. Cela explique pourquoi, bien que la mobilité transfrontalière soit une source importante de subsistance dans la région, la proportion de ressortissants de la CEDEAO installés de manière permanente dans un autre pays de la région n’est que de 3 %.
Selon Rahmane Idrissa, « le protocole de la CEDEAO fait figure de politique orpheline ». Par exemple, une grande partie des travaux de la CEDEAO sur les migrations depuis le milieu des années 2000 semblent découler de l’activisme de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) sous l’influence et le financement de l’UE. Le Dialogue sur les migrations pour l’Afrique de l’Ouest (MIDWA), un processus initié par l’OIM, en est un exemple. Au départ, il n’a pas suscité l’intérêt de la CEDEAO et traitait principalement de sujets dans l’intérêt des partenaires de l’UE. Un résultat concret figure dans l’Approche commune de la CEDEAO sur les migrations de 2008, qui stipule que « la gestion de la migration intrarégionale et vers l’Europe dans toutes ses dimensions était une priorité de l’organisation ».
Une tendance similaire peut être observée au niveau continental. L’Union africaine a élaboré de nombreux cadres migratoires qui dessinent sa vision pour le continent, notamment : le Cadre de politique migratoire pour l’Afrique, qui sert de base à des stratégies régionales telles que celle de la CEDEAO ; la Convention sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique (Convention de Kampala) ; le Plan d’action de Ouagadougou sur l’emploi, l’éradication de la pauvreté et le développement inclusif ; le Protocole relatif à la libre circulation des personnes, qui ne bénéficie pas du soutien politique des gouvernements nationaux.
Toutefois, ces cadres n’ont pas réussi à rationaliser les régimes migratoires afin d’encourager et de faciliter les migrations régionales. Pour expliquer le fossé entre la théorie et la pratique, les experts pointent du doigt le manque de financement, de capacités et de volonté politique des organisations continentales et régionales pour piloter les politiques de manière efficace. Les gouvernements nationaux portent également une part de responsabilité dans la faible mise en œuvre des cadres de migration régionaux et continentaux.
Selon l’auteure, les gouvernements du Sahel ont intérêt à contrôler la mobilité de groupes spécifiques de citoyens, en particulier ceux qui ont des moyens de subsistance mobiles ou nomades, comme les éleveurs et les travailleurs saisonniers. Ils ont également intérêt à réglementer les frontières nationales dans les régions qui sont isolées du reste du pays, ce qui entraîne des conflits entre les autorités centrales et les communautés locales.
Cette situation est souvent liée aux luttes postindépendance et à la construction nationale. Un exemple en est l’adoption de la loi 2015-36 au Niger relative à la migration irrégulière et à sa facilitation. Avec l’aide de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et de l’EUCAP Sahel Niger, le Protocole contre le trafic illicite de migrants par voie terrestre, maritime et aérienne a été transposé dans le cadre juridique du pays. Ce faisant, le Niger a créé un précédent en étant le premier pays de la région à adopter une législation ciblant spécifiquement le trafic de migrants.
La stratégie d’opérationnalisation a été élaborée par le Centre international pour le développement des politiques migratoires et la mise en œuvre dirigée par des équipes d’enquête conjointes redéployées en 2017, après un premier déploiement régional en 2011-1367. La loi, adoptée en mai 2015, reste très contestée et fait l’objet d’un processus de révision nationale dans le but d’apaiser les tensions entre les communautés régionales d’Agadez. Ces communautés ont été les premières touchées par la loi et les initiatives des autorités centrales. La loi sanctionne effectivement toutes les formes de trafic de migrants, qu’elles soient ou non liées à la criminalité transnationale organisée. De plus, elle criminalise la facilitation de la migration irrégulière, mais aussi les tentatives de migration irrégulière. Il s’agit d’un effort pour freiner les voyages vers l’Algérie et la Libye, en mettant l’accent sur le maintien de l’ordre dans la région d’Agadez, ce qui a eu des effets dramatiques sur l’économie locale.
La loi criminalise également la « sortie irrégulière » du Niger, une notion qualifiée par certains observateurs de fiction juridique, mais qui figure également dans la loi algérienne de 2008 sur la migration irrégulière. Cependant, selon les autorités nigériennes, la législation sert à protéger la circulation régionale dans la région de la CEDEAO.
Un autre exemple est la politique nationale de migration du Mali en 2014, formulée avec le soutien de l’OIM. Sur le papier, la politique établit un équilibre entre l’application de la loi et la protection. Cependant, dans les faits, sa mise en œuvre a été fortement influencée par des projets financés par l’UE et ses États membres qui visaient à renforcer les capacités aux frontières. Cette initiative coïncide avec les efforts déployés par le Mali pour juguler les réseaux criminels et terroristes qui entravent les mouvements transfrontaliers réguliers. Les forces de sécurité maliennes appliquent les lois antiterroristes pour intercepter les migrants et faire pression sur eux pour qu’ils versent des pots-de-vin. En conséquence, de nombreux étrangers tentent de se procurer de fausses cartes d’identité maliennes pour passer plus facilement en Algérie ou en Libye.
Des difficultés accrues aux frontières
Au cours de la dernière décennie, l’expansion du conflit régional et la perception croissante de la menace ont conduit les autorités nationales du Niger, du Mali et du Burkina Faso à faire l’amalgame entre le crime organisé, l’activisme des groupes armés et les déplacements des personnes. Le durcissement des mesures aux frontières a encore mis à l’épreuve les engagements nationaux en faveur de la libre circulation régionale inscrite dans le Protocole de la CEDEAO sur la libre circulation. Selon des recherches, les migrants considèrent les forces de sécurité et de police comme la plus grande menace au cours de leur voyage – devant les passeurs et les groupes armés. La raison en est que les migrants sont davantage exposés au personnel de sécurité, avec des conséquences négatives. Des cas d’extorsion à l’encontre de migrants sont signalés dans les trois pays du Sahel central.
Les interactions avec les forces de l’ordre ont par exemple conduit à la stigmatisation de groupes mobiles (personnes déplacées, éleveurs ou migrants). Les éleveurs, traditionnellement issus des communautés peules et fulani et perçus comme plus enclins à soutenir les groupes rebelles, sont souvent stigmatisés et discriminés par les forces de sécurité nationales. Beaucoup en viennent à emprunter des itinéraires et des points de passage qui échappent au contrôle des forces de sécurité et qui sont potentiellement plus dangereux. Cela a été particulièrement le cas pour les éleveurs et les commerçants transfrontaliers qui ont subi des pertes économiques en raison de la fermeture des frontières et des marchés imposée lors de la pandémie de COVID-19.
Alors que le Protocole de la CEDEAO sur la libre circulation devrait garantir la libre circulation des personnes dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, et malgré la promulgation de lois réprimant le trafic de personnes, les recherches montrent que le nombre de migrants ayant recours à des passeurs a augmenté. À titre d’exemple, les voyageurs en provenance des pays côtiers (Ghana, Togo, Côte d’Ivoire) bénéficient en théorie d’un accès facilité aux pays du Sahel central, mais il a été rapporté qu’ils ont recours à des passeurs depuis leur pays d’origine jusqu’à leur destination. Dans la région du Sahel central (Niger, Burkina Faso, Mali), les gens ont systématiquement recours à des passeurs pour voyager « parce qu’ils ont peu d’autres options pour naviguer dans le système ».
Au Burkina Faso, le rôle croissant des passeurs en tant que facilitateurs est également le résultat du conflit et du rétrécissement des zones contrôlées par le gouvernement. Les passages frontaliers sont devenus de plus en plus dangereux et difficiles. C’est également le cas dans le nord du Togo, dans le nord du Bénin et à la frontière entre le Niger et le Nigeria. Dans certaines de ces régions, les passages frontaliers sont facilités par les groupes armés qui contrôlent la zone frontalière.
Au Niger, au poste de contrôle du nord situé à l’extérieur de la ville d’Agadez, des migrants voyageant sans preuve d’identité auraient été placés en détention ou leurs biens auraient été confisqués par les autorités. Les ressortissants nigériens eux-mêmes sont contraints de payer des amendes et certains d’entre eux se rendant vers le nord, en direction de la Libye, auraient recours aux services de passeurs. Pour les observateurs, il s’agit là d’un effet secondaire de la loi nigérienne de 2015.
Selon un spécialiste de la protection, « les gens ont entendu parler de la loi et sont convaincus que le seul moyen pour eux de traverser est de faire appel à des passeurs ». Les forces de sécurité postées aux points de contrôle internes du Niger auraient repoussé à plusieurs reprises des personnes déplacées en raison de leur absence de moyens d’identification84. Les spécialistes de la protection actifs dans la région ont noté une augmentation du nombre de mineurs non accompagnés interceptés par les forces frontalières.
Dans la plupart des cas, ces mineurs ont été abandonnés au poste de contrôle par leur tuteur, qui craignait d’être confondu avec un passeur85. Pour éviter la confrontation avec les forces de l’ordre, les migrants ont recours à des itinéraires moins susceptibles d’être contrôlés – tels que l’itinéraire Tahoua-Ouest-Ingall-Assamaka au Niger ou l’itinéraire Douentza-Tombouctou au Mali. Ces itinéraires sont cependant souvent plus longs, moins bien entretenus et plus exposés aux groupes armés.
Augmentation des expulsions d’Afrique du Nord
Les expulsions d’Algérie et de Libye vers le Niger se sont intensifiées ces dernières années. Bien que la mobilité transfrontalière ait considérablement ralenti pendant la pandémie de COVID-19, le flux d’expulsions depuis l’Algérie est resté ininterrompu et a augmenté de manière significative88. Entre janvier et mars 2023 seulement, le groupe activiste Alarme Phone Sahara estime que plus de 10 000 personnes ont été renvoyées au Niger. En 2022, Médecins sans Frontières a enregistré plus de 36 000 expulsions à la frontière algérienne. Certaines expulsions auraient également été effectuées à la frontière malienne, bien que dans une moindre mesure. Enfin, un nombre limité de migrants sont également renvoyés de Libye vers la frontière nord du Niger.
Les expulsions depuis l’Algérie visent principalement les ressortissants nigériens en vertu d’un accord de retour Algérie-Niger de 2014. Cependant, un nombre croissant de ressortissants d’autres pays d’Afrique subsaharienne sont également concernés, bien qu’aucune donnée officielle ne soit publiée à ce sujet. Des arrestations massives de migrants sont pratiquées de manière systématique dans les villes côtières du nord de l’Algérie (les samedis, dimanches et lundis, selon les chercheurs locaux), à la suite desquelles les migrants sont conduits dans des centres de rétention en Algérie. Les expulsions à la frontière sud sont effectuées au cas par cas, ce qui contribue à « l’opacité de la politique migratoire algérienne ». Après leur détention, les migrants sont transportés en bus jusqu’à la frontière sud et au « point zéro » situé au milieu du désert, près de la ville nigérienne d’Assamaka, où ils sont laissés afin de passer au Niger. L’aide humanitaire sur place est extrêmement limitée et complètement dépassée. Par exemple, la seule solution d’hébergement est gérée par l’OIM et peut accueillir au maximum 1 100 personnes, alors qu’un seul convoi d’expulsés d’Algérie peut compter plus de 700 personnes. Pour les travailleurs humanitaires, le manque d’infrastructures pour les personnes expulsées reflète le manque de financements disponibles pour les projets axés sur la protection en matière de migration. À mesure que les flux de transit à travers le Niger et le Mali se sont réduits, les bailleurs de fonds (principalement les partenaires européens) ont décidé de ne pas renouveler les projets qui s’étaient développés dans le nord du Niger pour soutenir les infrastructures destinées à accueillir les migrants et les migrants potentiels dans la région.
Croissance exponentielle des déplacements internes
Les déplacements internes représentent la majorité des déplacements forcés au Sahel. Traditionnellement, ces déplacements internes se résument principalement aux déplacements de proximité de communautés qui s’installent dans des villages ou des zones d’habitation proches. Cependant, l’insécurité croissante dans les zones frontalières du Niger, du Mali et du Burkina Faso et le ciblage des campements de personnes déplacées par les groupes armés poussent les individus à se réinstaller en dehors de la communauté où ils se sont installés en premier lieu. Ce phénomène engendre des situations de déplacement répétées et, par conséquent, une vulnérabilité accrue parmi les groupes de personnes déplacées de longue date.
Les déplacés internes s’éloignent de leurs régions d’origine et s’installent de plus en plus dans des zones urbaines jugées plus sûres et offrant de meilleures opportunités économiques. Dans le sud du Niger, les habitants quittent les zones frontalières, telles que Nguiguimi et Bosso, pour se rendre dans des villes plus importantes comme Mainé-Soroa et Diffa. Au Mali, les déplacés internes ne se rendent pas seulement dans des capitales régionales comme Mopti ou Douentza, mais se dirigent aussi directement vers la capitale, Bamako. Un spécialiste régional de la protection a déclaré que les équipes locales « ont récemment vu un groupe de 200 déplacés internes, principalement des femmes et des enfants, arriver directement à Bamako ».
Synthèse de Aminata DIARRA
………………………………..CHRONIQUE DE MOUSTAPHA DIOP…………………………..
40 ans après Sabra et Chatila : GAZA !
Les 16 – 17 et 18 septembre 1983 durant la guerre civile libanaise, le monde abasourdi regardait se répandre sous ses yeux depuis les camps de réfugiés palestiniens de ‘’ Sabra et de Chatila ’’ des images effroyables de centaines et des centaines de corps de vieillards, de femmes et d’enfants dans des postures hallucinantes : (800 – 3000 – 5000) suivant les décomptes officiels, officieux et indépendants. Le mobile du massacre était lié à la mort de Bachir Gemayel un leader libanais (général passé président de la république) ; emporté par la déflagration d’une bombe en pleine réunion le 14 septembre soit deux jours avant le génocide.
Aussi horrible soit-il, ce crime de masse aurait été sans doute classé dans le registre des dégâts collatéraux inévitables dans ce genre de conflit (guerre civile) sauf qu’à l’analyse de la chronologie des faits, y appert une froide exécution sous-jacente à une parfaite planification. On ne pouvait pas tourner la page devant une si ignoble horreur. Pour dénouer l’écheveau constitué d’une palette d’acteurs de frères-ennemis » : (phalangistes chrétiens, religieux musulmans sunnites et chiites, partis politiques, clans et dynasties) ; la communauté internationale exigeait l’ouverture d’une enquête sous l’égide d’une commission la plus indépendante que possible. Israël le voisin immédiat qui avait fait immersion dans le pays peu de temps avant faisait partie des ciblés. Il ne pouvait pas adopter la politique de l’Autriche, dès lors que l’on parle de Palestine, il est sur ses gardes, prêt à agir.
La honteuse exaction fut d’emblée attribuée aux milices chrétiennes (phalangistes) bras armé des Forces Libanaises du défunt président Bachir Gemayel, lequel de son vivant entretenait ses atomes crochus avec l’exécutif israélien sous l’escorte d’Arion Sharon ministre de la défense de l’époque et futur premier ministre d’Israël (2001-2006). Sharon fut tout naturellement la cible emblématique des enquêteurs en tant que ministre de la défense et ne pouvait pas comme Ponce Pilate se laver les mains de cette macabre affaire d’autant que la configuration du contexte militaro-civile du Liban offrait une si belle opportunité de solution politique définitive à la problématique palestinienne que ne bouderait aucun chef de guerre – Yasser Arafat et ses ouailles de l’Olp – étaient terrés quelque part dans une Beyrouth en feu et flamme.
Or donc, l’humanité n’entendait pas enfouir dans son plus profond mémoriel ce hideux crime contre l’humanité sans éclairage. Mais, comme le disait si bien Georges Clémenceau – Président du conseil français durant la 1ère guerre mondiale – : « Quand je veux enterrer une affaire, je crée une commission ». Mais tout de même, l’amoncellement de plaintes renforcé par une forte pression citoyenne mondiale déboucha sur la démission du ministre de la défense Ariel Sharon ainsi que de celle du premier-ministre Menahem Begin.
Le seul bémol, la plus tangible des plaintes, celle des survivants des trois (3) jours de crime devant un tribunal exceptionnel de la Belgique qui innova en matière de crime contre l’humanité n’eut que le temps de vie d’une rose. Elle fut prestement déboutée, exit Sabra et Chatila ? Il ne resterait donc plus que de ciseler le nom de ces camps-martyrs sur le fronton de l’histoire de la Palestine et de songer à trouver des voies et moyens d’existence durable pour ces deux peuples ? Bien sûr que non, aucune mémoire collective ne pourrait passer à la trappe cet ignominieux carnage classé nettoyage ethnique. Quarante année après, Sabra et Chatila n’est-il pas la bande de Gaza ?
Et d’ailleurs, sur quel terreau semer les grains d’une paix durable car depuis 1948 date de prise en charge de la problématique par l’Onu, Israël qui n’est pas à la traine de résolutions ou autres clauses de paix, élargie son sol, son territoire, nonobstant la plus emblématique des résolutions onusiennes sous numéro 242 stipulant : « l’inadmissibilité de l’acquisition de territoire par la guerre ».
L’expansion de l’état sioniste avec en appoint la puissance de frappe de Tsahal son bras séculier est patent, elle se croit sous l’œil impuissant voir paternaliste des grands de l’occident.
L’incrustion surprise et dramatique du Hamas (malgré le nombre de morts : 1400) constaté par l’état hébreu ne se présentait-il pas comme une occasion inespérée pour Israël pour porter l’estocade finale aux palestiniens toute tendance confondue ? Israël enfant choyé du monde occidental ne fait pas la fine bouche pour faire sien les propos de son défunt partenaire le général-président Béchir Gemayel installé par les bons soins de Tel-Aviv et dont la mort survenu un mois plus tard justifiant le génocide de ‘’Sabra et Chatila’’, à un magazine français : « Il y a un peuple de trop au Moyen-Orient et, c’est le peuple palestinien ». Benyamin Netanyahou l’actuel premier-ministre ne dit pas autre chose à propos de Hamas et de la Palestine : « Ce que Hamas va vivre sera difficile et terrible, après cela, nous allons changer le Moyen-Orient » et depuis, il reste sourd à la supplication du monde d’humaniser la vengeance juive.