Le Ministre des Finances et du Budget a présidé, hier, à Dakar, la cérémonie d’ouverture du Forum national sur le foncier. Mamadou Moustapha BA est revenu sur l’importance de ce forum qui selon lui, « prend tout son sens face aux enjeux cruciaux liés à la gestion du foncier dans notre pays, un sujet à la fois complexe et délicat. » La thématique de la rencontre : « Le foncier, levier de souveraineté alimentaire » a permis aux participants de décliner tous les axes liés à la gestion foncière pour une « transformation structurelle de notre économie telle que définie dans l’axe 1 du Plan Sénégal Emergent (PSE), dont le développement des activités agricoles demeure une des priorités majeures », comme l’a indiqué le ministre dans son discours.
Le ministre des Finances et du Budget a indiqué que « le Sénégal n’est pas seul à faire face à cette situation ; bien au contraire, la gestion du foncier est une préoccupation universelle, particulièrement dans les pays en développement, tenaillés entre pression agricole sur le foncier et croissance urbaine non maîtrisée. »
En effet, selon Mamadou Moustapha BA, l’expression « terre nourricière », véhiculée par toutes les grandes civilisations agraires, illustre éloquemment toute l’importance accordée au foncier, notamment en zone rurale où il revêt une dimension forte d’émancipation économique et de socialisation.
Sur un autre plan, le ministre souligne que « la croissance démographique, associée à une urbanisation galopante, a favorisé ce qu’on pourrait qualifier de « crise du foncier » dans nos villes, plus particulièrement dans les zones périurbaines où les litiges fonciers tendent à devenir un phénomène endémique. »
Ainsi, le ministre a souligné que « dans beaucoup de nos sociétés, la terre est perçue historiquement comme un support culturel, qui structure un droit coutumier complexe ; lequel côtoie, de nos jours, les normes juridiques d’une gouvernance contemporaine moderne, mais pas plus simple pour autant.
C’est cette problématique de la complexité de la gestion du foncier qui se reflète dans la thématique choisie par la Plateforme nationale de Dialogue sur la Gouvernance Foncière au Sénégal (PNGF) pour le forum qui nous réunit aujourd’hui, à savoir : « Le foncier, levier de souveraineté alimentaire ».
Abordant la thématique du forum, le ministre dira qu’il se trouve au cœur des préoccupations du Gouvernement, « qui œuvre inlassablement à la transformation structurelle de notre économie telle que définie dans l’axe 1 du Plan Sénégal Emergent (PSE), dont le développement des activités agricoles demeure une des priorités majeures. »
Selon Moustapha BA, beaucoup d’efforts ont certes été consentis pour améliorer les performances du secteur agricole mais, force est de constater que la contribution de l’agriculture dans la formation du PIB, qui est de l’ordre de 15 %, reste encore faible au regard des 70% de la population active qu’elle emploie. Cette réalité, à l’en croire, largement partagée par les pays en développement, demeure la principale entrave à la réalisation de la souveraineté alimentaire.
« Il nous faut, dès lors, pour parvenir à une agriculture performante, bâtir une large coalition des différents acteurs autour d’une approche holistique, incluant sécurisation foncière, développement des chaines de valeur agricoles, préservation des écosystèmes, gestion durable des ressources, etc. Il s’agit là bien entendu d’une approche impliquant la mobilisation de tous : les acteurs étatiques, la société civile, le secteur privé, les universitaires, les chercheurs, les collectivités territoriales, les populations à travers un dialogue multi acteurs », ajoute-t-il, non sans se réjouir de la création de la Plateforme nationale de Dialogue sur la Gouvernance Foncière au Sénégal (PNGF) qui selon lui, offre à tous ces acteurs, le cadre idéal pour œuvrer ensemble à la prise en charge des enjeux de développement liés à la gestion foncière.
Le ministre a fait savoir que le Président Macky SALL a mis en place, dès 2012, la Commission Nationale de Réforme Foncière (CNRF) en vue de reconfigurer le paysage foncier du Sénégal. « Le travail substantiel effectué par cette Commission a permis d’établir une cartographie exhaustive des différentes contraintes, et de nous éclairer sur la meilleure démarche à adopter dans le cadre de la relance du débat sur les réformes du secteur foncier », a-t-il soutenu. Et de noter qu’ « il est apparu que la sécurisation foncière et la souveraineté alimentaire sont des préalables indispensables pour réaliser toute perspective de développement durable, harmonieux et solidaire. C’est pour cette raison qu’au-delà de la nécessité d’une ouverture vers l’agriculture intensive, il nous faut impérativement protéger les droits des communautés villageoises avec la promotion et la protection de l’exploitation familiale. »
« C’est ce qui a motivé mon département à initier et à proposer au Chef de l’Etat, le décret numéro 2022 -2307 du 30 décembre 2022, introduisant les droits collectifs sur le domaine national. C’est dans ce sens qu’il faut également comprendre la mise en place du Projet Cadastre et Sécurisation foncière (PROCASEF), en partenariat avec la Banque Mondiale, qui a bien voulu consentir un financement de 80 millions de dollars pour une durée de cinq (05) ans », a fait savoir le ministre.
Selon le ministre, en instaurant le Projet Cadastre et Sécurisation foncière (PROCASEF), l’Etat du Sénégal a engagé un vaste chantier dans le cadre de sa gouvernance foncière. Le PROCASEF, en tant que cadre d’expérimentation des opérations foncières, avec des outils de sécurisation foncière sur toute l’étendue du territoire national, est en train de faire un important travail pour la mise en place d’un cadastre en milieu rural et d’un portail foncier de la sécurisation des assiettes foncières pour les agriculteurs et les populations.
Moustapha BA estime que « ce forum sur la gestion foncière et la souveraineté alimentaire se déroule dans un contexte où se tient à Dubai la 28ème Conférence des Parties sur le climat (COP 28). Notre monde est soumis à des dégèlements climatiques sans précédent, en plus de la dégradation des ressources naturelles et des terres arables, devenant la préoccupation majeure des populations. »
Ces phénomènes, indique le ministre », « ont de plus en plus tendance à compromettre tous les efforts consentis dans la perspective de la souveraineté alimentaire. Ils ne peuvent plus être ignorés dans l’élaboration des stratégies de développement économique et social. C’est la raison pour laquelle, pour la première fois, le Sénégal s’est doté d’un budget vert et a mis en place un document-cadre de financement durable. »
Abdou Karim MBAYE