La surpêche a de graves répercussions sur les écosystèmes marins, les populations littorales et le climat à l’échelle mondiale, a indiqué vendredi une experte indépendante de l’ONU.
Présentant son rapport sur l’océan au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, la Rapporteure spéciale sur les droits humains et l’environnement s’est montrée très critique sur la pêche industrielle, qui est également « une source majeure d’émissions climatiques, contribuant à hauteur de 1,2 % à la consommation de pétrole ».
Une façon de rappeler que l’industrie mondiale de la pêche est une source majeure d’émissions qui contribuent aux changements climatiques.
En outre, la surpêche réduit la capacité de l’océan de faire office de puits de carbone. « On estime que, d’ici à la fin du siècle, 45 % des stocks halieutiques auront changé d’habitat en raison des changements climatiques, ce qui priverait les populations des zones tropicales et côtières des espèces qu’elles pêchent traditionnellement », a affirmé Astrid Puentes Riaño.
Les pratiques non durables de la pêche industrielle
Détaillant les contours de son rapport, l’experte s’est insurgée contre la pêche industrielle, qui repose sur des pratiques non durables et destructrices, privilégiant les profits au détriment de la durabilité.
« La pêche industrielle donne la priorité aux profits et fonctionne en grande partie avec des pratiques de pêche non durables et destructrices, pour répondre à une demande émanant principalement des pays les plus riches, tout en dévastant les écosystèmes marins, principalement dans les pays du Sud », a insisté Mme Puentes Riaño.
Par ailleurs, la pêche industrielle épuise les stocks halieutiques et compromet la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance de milliards de personnes, en particulier dans les pays à faible revenu qui dépendent de la pêche artisanale.
Travail forcé et traite des êtres humains
Les pertes économiques dues à la surpêche s’élèvent à 83 milliards de dollars par an. Les petits pêcheurs sont contraints d’exercer dans des zones surexploitées, ce qui a pour effet la pauvreté, la malnutrition et l’érosion culturelle.
La pêche industrielle et la surpêche sont également « liées à des violations des droits de l’homme, notamment le travail forcé et la traite des êtres humains, qui touchent des centaines de milliers de personnes, tout particulièrement les travailleurs migrants », a affirmé la Rapporteuse spéciale.
Au moins 128.000 pêcheurs sont soumis au travail forcé à bord de navires de pêche et plus de 100.000 personnes meurent chaque année dans des accidents liés à la pêche.
Sur un autre plan, l’experte onusienne s’est penchée sur la pêche illégale, une activité « sous-réglementée et incontrôlée », qui est « responsable d’environ 20 % des captures mondiales, car elle utilise des méthodes destructrices au fond de la mer ». La pêche illicite utilise ainsi des méthodes destructrices telles que la pêche au chalut de fond.
Le manque de soutien aux petits pêcheurs artisanaux
Plus largement, le rapport a souligné le manque de soutien aux petits pêcheurs. « Le manque de soutien aux pêcheries artisanales qui, en Asie, en Afrique et en Amérique latine, emploient 98 % des pêcheurs du monde et produisent plus de la moitié de l’approvisionnement en poisson marin, alors qu’elles ne bénéficient que d’un soutien limité, les subventions profitant avant tout aux secteurs industrialisés », a fait valoir Mme Puentes Riaño.
Les petits pêcheurs sont souvent en concurrence avec les acteurs de la pêche industrielle et les grandes compagnies, qui sont parfois avantagés en ce qui concerne l’octroi des licences de pêche, les subventions ou l’approbation de programmes de développement.
En raison de conflits et de l’accaparement des ressources lié aux projets de développement à grande échelle, menés notamment dans les domaines de l’aquaculture, de la pêche et du tourisme, il n’est pas rare que les pêcheurs artisanaux perdent l’accès à leurs zones de pêche traditionnelles et que leurs communautés soient contraintes de se déplacer, sans recevoir de compensation adéquate.
« La hausse de la température de l’océan, son acidification et la disparition de récifs coralliens contribuent au déclin du secteur de la pêche, ce qui compromet les moyens de subsistance des petits pêcheurs », a conclu l’experte onusienne, appelant à ce que la conférence de l’ONU sur les océans, qui se tiendra à Nice (France) en juin prochain, d’inclure une approche fondée sur les droits de l’homme et les écosystèmes.