juillet 9, 2025
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Economie

Elon Musk dynamite le jeu politique américain

Trump triomphait. Le 4 juillet avait pris des airs de parade impériale : démonstration de force en Iran, OTAN à genoux devant le nouveau maître de l’Occident, Cour suprême à la main du locataire de la Maison-Blanche avec une jurisprudence taillée sur mesure, et la « One beautiful bill » promulguée dans la foulée. Il y avait de quoi bomber le torse. À Washington, les discours triomphalistes s’enchaînaient. L’été s’annonçait sans accroc. Et puis, la douche froide est tombée samedi 5 juillet.

Elon Musk a annoncé la création de son propre mouvement politique, le “Parti de l’Amérique”. Un détonateur. Un séisme. Et cette fois, pas pour les démocrates — laminés depuis novembre, dépossédés du Congrès, orphelins d’une stratégie — mais pour le camp Trump lui-même. J’étais à Washington ce samedi. J’y ai vu des démocrates se réjouir comme je ne les avais pas vus sourire depuis l’élection de 2020.

Elon Musk ne gagnera pas la présidentielle. Il ne le peut pas : il n’est pas né citoyen américain et la Constitution l’interdit. Il ne prendra pas non plus le Congrès mais il pourrait bien faire perdre Donald Trump lors des midterms de l’an prochain.

Pour la première fois depuis plus d’un siècle, un parti tiers, doté de moyens colossaux, menace de faire éclater le bipartisme. Ross Perot, lors de la présidentielle de 1992, avait déjà fait tomber George H. W. Bush. Mais il n’avait eu aucun impact sur les législatives. Elon Musk, lui, a ce que Perot n’avait pas : des réseaux tentaculaires, une audience hors norme, une rancœur à la hauteur de sa mégalomanie. Et surtout : de l’argent — à démesure — qu’il semble prêt à perdre, se croyant porteur d’une mission quasi civilisationnelle.

Beaucoup de républicains frustrés, relégués à la marge par le clan Trump, pourraient voir dans l’initiative d’Elon Musk, une opportunité inespérée : celle de lever des fonds massifs et de revenir dans la course. À la Chambre comme au Sénat. Avec les coupes brutales de la « One Beautiful Bill », certaines circonscriptions conservatrices vont grincer. Il suffirait alors que quelques dissidents — bien choisis, bien financés — se présentent sous la bannière du Parti de l’Amérique pour fracturer le vote républicain. Et offrir, sur un plateau, des sièges aux démocrates.

Donald Trump, me dit-on, a fulminé. Il aurait menacé d’interdire le nouveau parti. Mais il faudrait pour cela une gymnastique constitutionnelle improbable. Il envisagerait aussi de remettre en cause la naturalisation d’Elon Musk, suggérant qu’elle aurait été obtenue frauduleusement. Peu de chances que ça tienne. Troisième levier : les subventions fédérales aux entreprises de son ex-meilleur ami. Là, en revanche, Donald Trump a la main. Et c’est sans doute là que le bras de fer va commencer.

Mais si Elon Musk va jusqu’au bout, s’il inscrit des candidats dans toutes les circonscriptions clés, alors la seule option pour le camp républicain pourrait être une coalition. Une alliance entre le GOP et ce nouveau Parti de l’Amérique. Une première dans l’histoire politique moderne des États-Unis. Une situation à l’européenne. Inimaginable, il y a encore quelques semaines.

Un séisme, donc. Un vrai. Car quoi qu’il arrive, la donne vient de changer. Le 5 juillet restera peut-être comme le jour où le deuxième mandat de Donald Trump a cessé d’être une autoroute pour devenir un champ de mines. Reste à savoir combien d’électeurs les républicains sont prêts à risquer de perdre.

 

Par Romuald Sciora, Chercheur associé à l’IRIS, directeur de l’Observatoire politique et géostratégique des États-Unis

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