avril 26, 2025
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APPUI DES NATIONS UNIES EN LIBYE

Le présent rapport, soumis en application des résolutions 2510 (2020), 2542 (2020), 2570 (2021) et 2647 (2022) du Conseil de sécurité, porte sur les faits nouveaux qui se sont produits en Libye sur les plans politique, économique et de la sécurité. On y trouvera également un aperçu de la situation humanitaire et des droits humains dans le pays ainsi que des activités menées par la Mission d’appui des Nations Unies en Libye (MANUL) depuis la publication du précédent rapport (S/2022/409), le 20 mai 2022.

  1. Situation politique et questions de sécurité 2. Durant la période considérée, l’Organisation des Nations Unies a continué d’aider la Chambre des députés et le Haut Conseil d’État à parvenir à un accord sur le cadre constitutionnel consensuel des élections nationales. À la suite des cycles de pourparlers qui s’étaient déroulés pendant les mois d’avril et de mai, la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour la Libye, Stephanie Williams, et la MANUL ont facilité un troisième cycle du comité conjoint, constitué de membres des délégations de la Chambre et du Haut Conseil d’État, qui s’est tenu au Caire au moins de juin, en vue d’aider les parties à s’entendre sur le cadre constitutionnel des élections.
  2.  Du 28 au 30 juin, la Conseillère spéciale a convoqué les présidents des deux chambres en vue d’une réunion de haut niveau à l’Office des Nations Unies à Genève pour examiner l’issue des pourparlers du Caire et dégager un consensus sur plusieurs dispositions encore en suspens du projet de constitution de 2017. Le Président de la Chambre des députés, Aguila Saleh Issa, et le Président du Haut Conseil d’État, Khaled Mishri, n’ont malheureusement pas réussi à s’entendre sur une question encore en suspens, à savoir le critère d’éligibilité des candidats à la présidence. Dans une déclaration publiée à la fin de la réunion, la Conseillère spéciale a exhorté les deux chambres à surmonter dès que possible le désaccord subsistant et a réaffirmé que l’Organisation des Nations Unies était prête à exercer ses bons offices à cet égard.
  3. La crise politique persistante entre MM. Abdulhamid Al Dabiba et Fathi Bashagha à la tête de l’exécutif s’est encore envenimée. Le Haut Conseil d’État n’a pu se réunir, du fait de clivages entre les membres appuyant le Gouvernement d ’unité nationale de M. Dabiba et ceux appuyant M. Bashagha. Les affrontements se sont  intensifiés entre les groupes armés soutenant une faction ou l’autre, à Tripoli et alentour.
  4. Le 24 juin, l’Allemagne, les États-Unis d’Amérique, la France, l’Italie et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord ont publié une déclaration conjointe exhortant les dirigeants politiques libyens à « débloquer la situation du pouvoir exécutif et à convenir des modalités d’organisation des élections ». MM. Dabiba et Bashagha se sont félicités de la déclaration, même si chacun l’a interprétée comme appuyant sa propre revendication d’être le chef légitime de l’exécutif.
  5. Signe de l’exaspération populaire croissante à l’égard de l’impasse politique, des manifestations ont éclaté le 1er juillet dans plusieurs villes de Libye, notamment à Tripoli. À Tobrouk, des manifestants ont forcé le passage à la Chambre des députés, occasionnant des dégâts à l’édifice. Ils ont critiqué les organes politiques existants et leur incapacité de tenir des élections, de résoudre la crise de l’électricité, de remédier aux pénuries de carburant et d’enrayer l’augmentation des prix des produits de première nécessité. Dans une déclaration le 2 juillet, le Secrétaire général a demandé aux manifestants d’éviter les actes de violence et à tous les acteurs libyens de s’abstenir de tout acte susceptible de porter atteinte à la stabilité. Il a également exhorté les dirigeants libyens à surmonter l’impasse politique qui accentuait les divisions et avait un impact négatif sur l’économie du pays et a souligné qu’il convenait de s’appuyer sur les progrès considérables accomplis durant les pourparlers au Caire et à Genève, menés sous les auspices de l’ONU.
  6. Le 31 juillet, la Conseillère spéciale a achevé sa mission. Le 1er août, le Secrétaire général a fait une déclaration pour la remercier de ses services et de son dévouement, appréciant sa capacité remarquable de favoriser des conditions propices au dialogue et au consensus entre toutes les parties prenantes, qui ont mené à de grandes avancées sur les volets politique, économique et de la sécurité.

Progression des volets du dialogue intralibyen

8. Au sujet du volet politique, l’ONU a continué de s’employer à faciliter la tenue d’élections crédibles, transparentes et inclusives, dans les meilleurs délais, sur la base d’un cadre constitutionnel convenu, afin de permettre à plus de 2,8 millions de Libyens, qui s’étaient inscrits sur les listes électorales pour voter, de réaliser leurs aspirations. La Conseillère spéciale, appuyée par la MANUL, a continué d’exercer ses bons offices et son action de médiation pour maintenir l’élan suscité par le dialogue sur les volets politique, économique et de la sécurité. Elle a également continué de tenir des consultations élargies sur le cadre constitutionnel des élections et la façon de faire avancer le processus électoral, avec un vaste éventail de parties prenantes nationales, dont des représentants d’institutions nationales et municipales et de partis politiques et des acteurs de la sécurité, ainsi qu’avec des candidats aux élections présidentielle et législatives.

9. Le 8 juin, la Conseillère spéciale a évoqué les plans en vue du troisième cycle de pourparlers du comité conjoint, composé de représentants de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État, avec M. Issa, à Qoubba, et M. Mishri, à Tripoli. Au cours d’une conversation téléphonique avec la Conseillère spéciale le 11 juin, le Président du Conseil de la présidence a exprimé le plein appui du Conseil aux effo rts menés sous les auspices de l’ONU pour parvenir à un accord sur les bases constitutionnelles des élections, soulignant l’importance de respecter la volonté des Libyens d’élire leurs représentants.

10. Le 20 juin, les troisième et quatrième cycles de pourparlers se sont achevés au Caire. Les représentants des deux chambres ont fait, tout au long, montre d ’un degré de coopération sans précédent. Ils sont parvenus à un accord sur des éléments essentiels du cadre constitutionnel, notamment la création d’un parlement bicaméral et la répartition des sièges concernant les deux chambres, le partage de la responsabilité entre le Président, le Premier Ministre, le Gouvernement et les collectivités locales, la forme précise de décentralisation, notamment la délimitation du nombre de provinces et leurs pouvoirs et la définition d’un mécanisme de distribution des ressources naturelles à tous les niveaux du pouvoir. Ils ne se sont cependant pas entendus sur les mesures de transition régissant la période précédant les élections nationales, ce qui nécessitera donc de nouvelles consultations. La Conseillère spéciale a donc demandé à la présidence des deux chambres de se réunir d’ici 10 jours pour combler toutes les lacunes subsistantes. Le 23 juin, MM. Issa et Mishri ont accepté l’invitation de la Conseillère spéciale de se rendre à Genève.

11. Du 28 au 30 juin, l’ONU a facilité le volet constitutionnel d’une réunion de haut niveau sur la Libye, tenue à Genève, entre MM. Issa et Mishri. Les Présidents des deux chambres ont exprimé leur appui aux résultats obtenus à la suite des pourparlers du Caire et ont établi une feuille de route, assortie de délais, et envisagé une série de mesures conduisant à la tenue d’élections nationales. Ils n’ont cependant pas réussi à s’entendre sur une question finale, à savoir les conditions d’éligibilité des candidats au cours de la première élection présidentielle à l’issue de la transition.

12. Sur le plan économique, la MANUL a continué d’accompagner les efforts visant à faire avancer la réforme et la réunification de la Banque centrale de Libye et à promouvoir la transparence dans les dépenses publiques ainsi qu’un financement fiable des besoins prioritaires du peuple libyen. Une société-conseil internationale a fourni une assistance technique en vue de l’application des recommandations publiées en 2021 à la suite de l’audit international facilité par l’ONU en vue de la réforme et de la réunification de la Banque centrale.

13. Les 14 et 15 juin, la Chambre des députés s’est réunie à Syrte pour débattre d’un projet de budget présenté par M. Bashagha. Le porte-parole de la Chambre a annoncé par la suite que le projet de budget avait été adopté par 103 voix pour, dont 5 soumises par voie électronique. Il n’a pas été possible de procéder à une vérification indépendante du vote, qui s’est déroulé à huis clos. Quelques députés, qui n’avaient pas assisté à la séance, se sont interrogés sur le nombre signalé de participants à la séance et le recours au vote électronique. Le 16 juin, le Gouvernement d’unité nationale de M. Dabiba a rejeté la décision de la Chambre par laquelle le budget présenté par M. Bashagha avait été approuvé et a réaffirmé qu’il ne transférerait le pouvoir qu’à un nouveau gouvernement élu.

14. Le 14 juillet, M. Dabiba a annoncé la désignation d’un nouveau Président et Conseil d’administration de la National Oil Corporation, remplaçant Mustafa Sanalla, qui était en poste depuis longtemps, par Farhat Bengdara, qui avait exercé le mandat de Gouverneur de la Banque centrale de 2006 à 2011. M. Sanalla a contesté la décision au tribunal. Le 15 juillet, le Président nouvellement désigné a annoncé la réouverture de tous les champs et ports pétroliers dont la fermeture, à compter du 16 avril, avait occasionné pour la Libye un manque à gagner de 4 milliards de dollars.

15. Concernant le volet de la sécurité, le Gouvernement espagnol et le Centre international de Tolède pour la paix ont organisé, avec l’aide de la MANUL, un atelier technique sur le désarmement, la démobilisation et la réintégration, avec des acteurs libyens et internationaux. Il s’est déroulé à Tolède (Espagne) les 23 et 24 mai. La Conseillère spéciale a souligné à cette occasion la nécessité de rétablir le monopole de l’État sur les forces de sécurité du pays. Les participants se sont entendus sur la nécessité de coordonner et d’instaurer la phase préparatoire d’un programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration en Libye. En marge de l’atelier, la Conseillère spéciale et la MANUL ont facilité la première réunion conjointe de la Commission militaire conjointe 5+5 depuis que ses membres siégeant à l’est avaient cessé d’y participer en avril, du fait de retards dans le versement des soldes à l’Armée nationale libyenne par le Gouvernement d’unité nationale (voir S/2022/409, par. 28 et 29).

16. La MANUL a continué d’aider la Commission militaire conjointe 5+5 dans le cadre de l’application de l’accord de cessez-le-feu d’octobre 2020 et de l’exécution du plan d’action relatif à un processus progressif, équilibré et échelonné de retrait des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires du territoire libyen. Comme convenu par la Commission, l’élimination des mines et des engins explosifs improvisés, qui était nécessaire pour la réouverture de l’axe Abou Qreïn-Joufra dans le sud du pays, a débuté le long de la partie ouest de la route, afin de permettre la libre circulation des personnes et des marchandises. La MANUL et le Service de la lutte antimines ont également continué d’épauler la neutralisation des mines et des engins explosifs improvisés le long de la partie est de la route, en coordination avec le sous-comité chargé de la neutralisation des mines de la Commission militaire conjointe. Au 5 août, 100 kilomètres de routes avaient été nettoyés. Il faudra instaurer une plus grande coordination avec le Commandement de l’Armée nationale libyenne pour compléter les travaux de déminage restants sur cette route.

17. Le 16 juin, les Chefs d’état-major de l’Armée libyenne et de l’Armée nationale libyenne, le général de corps d’armée Mohammed Al-Haddad et le général Mohammed Nadhouri respectivement, se sont entretenus au Caire avec la Commission militaire conjointe 5+5 et la Conseillère spéciale. Le général de corps d’armée Haddad s’est félicité des efforts faits par l’ONU pour faciliter un accord entre la Chambre des députés et le Haut Conseil d’État portant sur les bases constitutionnelles des élections. Les deux camps ont également décidé de reprendre les réunions de la Commission entre les chefs des armées des deux camps sur le territoire libyen. La Conseillère spéciale a également facilité au Caire, le 16 juin, une réunion de la Commission militaire conjointe 5+5 avec la commission conjointe de la Chambre des députés et du Haut Conseil d’État, visant à régler les questions subsistant au sujet de la réunification des forces armées et de la pleine application de l’accord de cessez-le-feu.

Comité international de suivi de la situation en Libye issu du processus de Berlin

18. Le Comité international de suivi de la situation en Libye issu du processus de Berlin et ses groupes de travail ont continué de servir de cadre global en matière d’appui international aux volets du dialogue intralibyen.

19. Le 7 juin, le groupe de travail sur la sécurité, coprésidé par l’ONU, la France, l’Italie, le Royaume-Uni, la Türkiye et l’Union africaine, s’est entretenu à Tunis avec la Commission militaire conjointe 5+5 des mesures relatives à la poursuite de l’exécution du plan d’action en vue d’un retrait progressif, équilibré et échelonné des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires. Le groupe de travail sur la sécurité compte également appuyer l’application d’un programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration, comme énoncé à l’article 4 de l’accord de cessez-le-feu, une fois que les conditions de sécurité seront réunies.

20. Dans une déclaration faite le 16 juin, les Coprésidents du groupe de travail sur le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme (l’ONU, les Pays-Bas et la Suisse) ont demandé au Conseil des droits de l’homme de proroger le mandat de la mission indépendante d’établissement des faits sur la Libye, pour lui permettre de continuer de faire avancer ses travaux essentiels sur les droits humains, une paix durable et la réconciliation nationale fondée sur les droits. Au nom des Coprésidents du groupe de travail, la MANUL a convoqué trois cycles de dialogue avec des acteurs de la société civile et des défenseurs des droits humains pour s’entretenir les 7, 12 et 21 juin des problèmes liés aux droits humains. Selon les participants, les principaux obstacles à la progression des droits humains étaient les clivages politiques et les obstacles constitutionnels, les groupes armés et les milices, la prolifération des armes, l’impunité des auteurs de violations des droits humains contre les Libyens, les migrants et les demandeurs d’asile, les attaques contre la liberté d’expression et d’association et les violences contre les femmes.

21. Le groupe de travail sur l’économie, coprésidé par l’ONU, l’Égypte, les États-Unis et l’Union européenne, a sollicité les vues de représentants d’institutions libyennes compétentes sur les paramètres d’un mécanisme qui permettrait de financer à court terme, de manière consensuelle et transparente, des priorités et des besoins essentiels, notamment concernant la National Oil Corporation. Les Coprésidents se sont réunis à Tunis le 26 mai pour s’entretenir des modalités de la création et de la mise en place de ce mécanisme de financement. Par la suite, le projet de mandat relatif à un comité spécial de contrôle libyen a été diffusé par les États-Unis pour examen aux hauts responsables libyens de la Commission des finances de la Chambre des députés, du Conseil de la présidence, du Ministère des finances, du Bureau d’audit et de l’Autorité de contrôle administratif, ainsi qu’aux autres Coprésidents du groupe de travail sur l’économie.

Concertations internationales et régionales

22. Durant la période considérée, la Conseillère spéciale et la MANUL ont tenu des consultations régulières avec les parties prenantes régionales et internationales, tant en Libye qu’à l’étranger, concernant les trois volets du dialogue intralibyen. La Conseillère spéciale et la MANUL ont participé sur demande à des réunions organisées par des États Membres pour communiquer des informations sur les faits survenus en Libye et des mises à jour sur l’état d’avancement de l’action de médiation de l’ONU.

23. Le 1er juin, la Conseillère spéciale, le Sous-Secrétaire général et Coordonnateur de la Mission de la MANUL et la Représentante spéciale adjointe du Secrétaire général pour la Libye (Coordonnatrice résidente et Coordonnatrice de l’action humanitaire) ont fait des exposés devant des représentants du corps diplomatique. Les 9 et 10 juin, la Conseillère spéciale s’est rendue en Algérie pour s’entretenir avec le Ministre des affaires étrangères et de hauts responsables du processus politique libyen et des progrès accomplis concernant le volet constitutionnel. Le 22 juin, elle s’est entretenue à Oslo avec les représentants spéciaux allemand et norvégien pour la Libye afin d’évoquer les étapes suivantes, relatives au volet constitutionnel.

24. Du 22 au 24 juin, une délégation de l’Union africaine dirigée par le Ministre congolais des affaires étrangères, Jean-Claude Gakosso, représentant le Président du Comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye, s’est rendue en Libye pour s’entretenir avec de hauts responsables libyens, ainsi qu’avec la MANUL. Elle a présenté une proposition de réconciliation nationale, fondée sur les principes de l’appropriation par la Libye et de l’inclusion.

25. Le 5 juillet, la Conseillère spéciale s’est rendue à Paris où elle s’est entretenue avec l’Envoyé spécial français pour la Libye et de hauts responsables. Le 21 juillet, elle s’est déplacée à Istanbul (Türkiye) pour passer en revue les progrès accomplis sur le volet constitutionnel, durant une réunion d’États Membres organisée par la Türkiye.

Situation dans l’ouest de la Libye

26. La persistance des clivages politiques a concouru à l’instabilité des conditions de sécurité à Tripoli et dans toute la partie ouest de la Libye, notamment à la suite des manifestations d’appui d’acteurs de la sécurité en faveur de M. Dabiba ou de M. Bashagha, et en réponse à la tentative de M. Bashagha d’entrer à Tripoli le 17 mai. La capitale a connu une augmentation du nombre d’affrontements intermittents entre des groupes armés, ainsi que des tirs sporadiques, en particulier dans des zones densément peuplées.

27. Le 26 mai, un large convoi de forces de Zintan, appuyant M. Bashagha, s’est rendu d’Aziziya vers des camps militaires situés au sud de Tripoli. Dans une déclaration faite le même jour, le Ministère de la défense a dénoncé « les tentatives de mobiliser l’armée en vue d’une guerre dictée par des intérêts politiques partisans ». Les forces affiliées au Gouvernement d’unité nationale ont par ailleurs renforcé leurs positions au centre de Tripoli ainsi qu’à Tarhouna et à Bani Walid.

28. Le 9 juin, un combattant a été tué et deux civils blessés au cours d’accrochages armés dans le centre de Tripoli entre des membres de la brigade Naouasi et des éléments affiliés à l’Organisme d’appui à la stabilité. Dans une déclaration faite le 10 juin, la MANUL a demandé aux acteurs politiques et de la sécurité de faire preuve de la plus grande retenue. Le 22 juin, quatre éléments armés et un civil ont é té tués lors d’accrochages au centre de Tripoli entre la Force spéciale de dissuasion et l’Organisme d’appui à la stabilité.

29. À la fin du mois de juin, les tensions parmi les acteurs de sécurité ont été très vives, lorsque les acteurs politiques se sont interrogés sur le fait de savoir si la feuille de route du Forum de dialogue politique interlibyen demeurait valable et sur la légitimité du Gouvernement d’unité nationale. Les 19 et 20 juin, les forces de Zintan, établies dans le sud de Tripoli, ont été renforcées par des unités militaires de Zintan et d’Aziziya. La démonstration de force s’est produite à la suite du limogeage, par M. Dabiba, du Commandant militaire de la section de l’ouest, le général Osama al-Juwaili, de son poste de chef du renseignement militaire, au lendemain de la tentative de M. Bashagha d’entrer à Tripoli le 17 mai. Dans une mesure se voulant dissuasive, les forces fidèles au Gouvernement d’unité nationale se sont déployées autour de l’immeuble abritant le bureau de M. Dabiba. Le 21 juin, le Ministère de la défense a annoncé l’état d’urgence dans la capitale.

30. À la suite d’une déclaration faite par M. Bashagha le 9 juillet dans laquelle il a annoncé que son gouvernement commencerait à opérer à partir de Tripoli, une série de mouvements militaires et de mobilisations ont été signalés dans la capitale et le niveau d’alerte a été relevé de nouveau parmi les forces armées dans l’ouest de la Libye. Le 13 juillet, plusieurs commandants de groupes armés se sont rassemblés sur la Place des martyrs à Tripoli et ont lu une déclaration conjointe, prévenant que la sécurité à Tripoli était « une ligne rouge » et qu’ils affronteraient toute force militaire qui chercherait à « susciter l’anarchie » dans la capitale. Ils ont également rejeté toute nouvelle phase de la transition politique et ont appelé à des élections comme seule solution à la crise politique.

Situation dans l’est de la Libye

31. Le 11 juin, durant un rassemblement à Soulouq, au sud-est de Benghazi, des anciens des tribus ont publié un communiqué dans lequel ils ont demandé le démantèlement de « toutes les institutions dont le mandat avait expiré » et la tenue simultanée d’élections présidentielle et législatives, d’ici la fin de 2022.

32. Dans le cadre des manifestations qui ont éclaté dans toute la Libye le 1er juillet, des manifestants à Tobrouk ont pris d’assaut le bâtiment de la Chambre des députés, réclamant sa dissolution, tout en occasionnant des dégâts au bâtiment, auquel ils ont mis le feu.

Situation dans le sud de la Libye

 33. À la suite d’affrontements armés au Tchad, près de la frontière libyenne, du 23 au 27 mai, l’Armée nationale libyenne a intensifié ses opérations de lutte contre le terrorisme à l’aide d’unités supplémentaires qui ont été déployées près de la frontière, pour atténuer les effets en territoire libyen des combats se déroulant du côté tchadien. Le 1er juin, l’Armée nationale libyenne a déclaré que des renforts avaient été dépêchés à Qatroun et à Mourzouq pour empêcher l’infiltration en Libye de terroristes ou de criminels ; l’intensification de la présence militaire a toutefois provoqué des tensions avec des membres de la tribu des Tebou. Dans une tentative de désamorcer tout litige éventuel avec les éléments tebou se trouvant sur place, des composantes militaires tebou locale ont fini par être incorporées dans l’Armée nationale libyenne et se sont vu confier la tâche d’effectuer des patrouilles de sécurité à la frontière.

Organisations extrémistes violentes

34. Le 30 mai, l’Armée nationale libyenne a annoncé la capture du commandant présumé de Daech, Abou Mouaz el-Tachani, au sud de Qatroun. Durant la même opération, un nombre non précisé d’éléments de Daech auraient également été tués.

35. Le 18 juin, la brigade 444 a signalé l’arrestation d’un commandant présumé de Daech, Moustafa ben Della, à Bani Walid.

Appui électoral

41. L’équipe électorale intégrée encadrée par la MANUL a continué de fournir un appui technique et des conseils à la Haute Commission électorale nationale. Le 26 juin, le Président de la Haute Commission s’est déclaré disposé à mener tout processus électoral, qu’il s’agisse d’une élection générale ou d’un référendum. La Haute Commission a estimé qu’il faudrait environ 10 semaines pour mener un référendum constitutionnel, dès la réception d’une nouvelle loi sur le référendum et d’un projet de constitution de la Chambre des députés.

 42. Le processus de révision du registre des électeurs numérique existant, qui compte quelque 2,8 millions d’électeurs, s’est poursuivi tout au long de la période considérée. Pour améliorer la crédibilité du registre, la Haute Commission électorale nationale a envisagé de nouvelles mesures techniques et une nouvelle campagne d’information publique.

 43. L’équipe électorale intégrée encadrée par la MANUL a également collaboré à des initiatives visant à contrer la mésinformation et les discours de haine durant les processus électoraux, en mettant un accent particulier sur la protection des femmes faisant acte de candidature.

Appui à la planification d’un dispositif de sécurité provisoire et à l’unification des forces de sécurité

71. La première phase du programme conjoint de police et de sécurité, relative au renforcement des capacités des Ministères de l’intérieur et de la justice, a été achevée en juin 2022, la deuxième phase devant être lancée en octobre. La première phase comprenait des initiatives telles que le commissariat de police modèle, la police de proximité et les instructions permanentes concernant la police judiciaire. 2. Gestion des armes et des munitions

 72. Pendant la période considérée, le Service de la lutte antimines a achevé le volet de formation d’un projet visant à renforcer les capacités de la police diplomatique libyenne, afin d’atténuer et d’écarter les risques que présentent les engins explosifs pour les membres du corps diplomatique. Il a permis à plus de 300 agents d ’acquérir des compétences opérationnelles et médicales d’urgence essentielles et comportait un important volet de formation des formateurs visant à accroître la viabilité de l’initiative. Le Service s’est employé à fournir de manière constante à la police diplomatique du matériel opérationnel non létal, notamment de détection des engins explosifs, et des trousses médicales. Il a également coordonné son action avec le Centre libyen de lutte antimines en vue de l’exécution d’un nouveau projet de déminage à des fins humanitaires, visant à protéger la population de la menace des engins explosifs dans des zones prioritaires, à réduire le nombre de victimes parmi les civils et à remédier aux conséquences à long terme de la contamination par les explosifs.

73. Pendant la période considérée, les organisations de lutte antimines ont détruit en toute sécurité 25 tonnes d’engins non explosés à Benghazi et à Misrata.

Application de l’accord de cessez-le-feu

 74. La MANUL a continué de s’employer à créer un mécanisme libyen de surveillance du cessez-le-feu efficace, à même de coordonner, d’observer et d’évaluer les progrès sur le retrait des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires. Afin d’aider les Libyens à appliquer l’accord de cessez-le-feu, à désamorcer les tensions et à renforcer la confiance mutuelle parmi les acteurs et les populations libyennes concernés, la MANUL a accompagné l’élaboration par les homologues libyens de quatre documents portant sur l’application de l’accord de cessez-le-feu, dont : a) une note de cadrage et un mandat relatif à un centre d’opérations conjointes à Syrte ; b) des consignes opérationnelles en vue du retrait des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires ; c) des programmes de renforcement des capacités à l’intention des autorités libyennes chargées de surveiller l’accord de cessez-le-feu ; d) un mandat concernant les observateurs libyens, l’accent étant mis sur la surveillance du retrait des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires.

75. Le 8 juin, la MANUL a facilité une réunion plénière du groupe de travail sur la sécurité du Comité international de suivi de la situation en Libye qui s’est tenue à Tunis, à laquelle des membres de la Commission militaire conjointe 5+5 ont participé en personne. De plus, huit observateurs libyens du cessez-le-feu ont pour la première fois tenu simultanément des réunions en marge avec des observateurs de la MANUL. Une deuxième réunion des observateurs libyens du cessez-le-feu et de la MANUL s’est déroulée à Tunis les 27 et 28 juin, durant laquelle les participants ont porté leur attention sur la méthode de création d’un mécanisme libyen de surveillance du cessezle-feu qui soit efficace.

76. Le 9 août, la Commission militaire conjointe 5+5 et la MANUL se sont réunies à Syrte, avec la participation des huit observateurs libyens du cessez-le-feu et de représentants des sous-comités de la Commission militaire. Ils ont passé en revue l’état de préparation du mécanisme libyen de surveillance du cessez -le-feu, ont procédé à la mise en place d’un centre d’opérations conjointes à Syrte et ont parachevé les modalités du retrait prévu des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires de Libye.

Observations et recommandations

88. La persistance de l’impasse politique a continué d’entraver l’état de la sécurité en Libye, comme en témoignent le nombre croissant d’affrontements entre les groupes armés et les manifestations qui se sont produites dans tout le pays le 1 er juillet. Je demande de nouveau aux acteurs et aux institutions politiques libyens de faire preuve de responsabilité, afin d’empêcher que des rancœurs de longue date ne dégénèrent, entraînant une instabilité accrue.

 89. Des élections nationales, fondées sur un cadre constitutionnel sain et consensuel, sont ce que réclament les Libyens et ce qu’ils méritent. Les résultats des pourparlers au Caire et à Genève constituent des progrès considérables, sur lesquelles toutes les parties devraient s’appuyer. Un accord sur un cadre constitutionnel en vue de la tenue d’élections est à portée de main, et j’exhorte les institutions compétentes libyennes à le parachever et à préparer la voie à la tenue d’élections sans plus tarder. Je félicite la Haute Commission électorale nationale de s’être préparée, de concert avec les institutions libyennes compétentes, à aider tous les Libyens à s’exprimer par la voie des urnes.

 90. Il est de plus la grande importance de préserver les progrès accomplis à ce jour concernant le volet de la sécurité, depuis la signature de l’accord de cessez-le-feu en octobre 2020. Je félicite la Commission militaire conjointe 5+5 d’avoir travaillé inlassablement à cette fin. Je salue l’attachement mutuel et les efforts conjoints des Chefs d’état-major de l’Armée libyenne et de l’Armée nationale libyenne et j’encourage l’adoption de mesures supplémentaires en vue de l’unification des forces armées et des préparatifs relatifs au désarmement, à la démobilisation et à la réintégration. Je demande également à tous les acteurs de s’abstenir de tout acte susceptible d’envenimer la situation et de faire basculer à nouveau le pays dans un violent conflit.

91. L’ONU continuera d’épauler la Commission militaire conjointe 5+5 pour faire appliquer toutes les dispositions de l’accord de cessez-le-feu, notamment l’exécution du plan d’action en vue d’un processus de retrait progressif, équilibré et échelonné des combattants étrangers, des forces étrangères et des mercenaires. L’Organisation demeure également résolue à appuyer les activités des observateurs libyens du cessez-le-feu, en vue de la mise en place d’un mécanisme de surveillance, basé à Syrte.

92. Je me félicite de ce que les fermetures de la production de pétrole aient pris fin en avril 2022. Les richesses naturelles de la Libye appartiennent à tous les Libyens et ne doivent pas être assujetties aux querelles politiques. L’indépendance des institutions souveraines économiques et financières du pays, dont la National Oil Corporation et la Banque centrale de Libye, doit continuer d’être respectée et maintenue. Les actes visant à entraver l’exploitation des ressources naturelles, les exportations en toute légalité et l’utilisation équitable des recettes provenant de leur vente sont répréhensibles et doivent faire l’objet de poursuites.

93. Les préoccupations relatives à la dégradation des conditions de vie des Libyens dans l’ensemble du pays, accentuée par l’arrêt de la production du pétrole, ont trait à l’absence d’accès aux services de base, qui sont des droits humains fondamentaux. Le manque d’accès à de la nourriture suffisante, à des soins de santé adéquats, à l’eau, à l’assainissement et à l’éducation ne doivent pas être des facteurs de tension et de conflit qui prolongent et perpétuent l’impasse politique. J’exhorte les institutions compétentes libyennes à prioriser les arrangements qui garantiront un financement fiable visant à satisfaire les besoins fondamentaux du peuple libyen et à garantir la transparence dans les dépenses publiques.

94. Je me félicite des progrès accomplis à ce jour sur la voie de la réunification et de la réforme des institutions financières clefs. Il faut faire en sorte que ces efforts continuent. Des progrès visibles dans ces domaines permettront de renforcer la confiance dans l’économie et sont nécessaires également pour faire avancer les volets politique et de la sécurité. Dans le même ordre d’idées, le versement des traitements des fonctionnaires de manière équitable et dans les meilleurs délais dans l’ensemble du pays et l’accès de tous les Libyens aux services de base sont des conditions indispensables.

 95. La situation des migrants, des réfugiés, des personnes déplacées et des personnes en détention arbitraire continue d’être source de vive préoccupation. Je demande aux autorités libyennes de relâcher toutes les personnes qui ont été placées en détention arbitraire et de garantir un accès humanitaire sans entrave à toutes les populations qui ont besoin d’assistance, indépendamment de leur statut juridique.

 96. Je tiens à exprimer ma gratitude aux organisations régionales, dont la Ligue des États arabes, l’Union africaine et l’Union européenne, et aux États Membres pour leur appui constant visant à garantir des résultats démocratiques et l’avenir prometteur que les Libyens méritent tant. Leur appui continue de faire partie intégrante du processus destiné à faire avancer le dialogue dirigé et contrôlé par les Libyens, notamment dans le domaine de la réconciliation nationale. Il est tout aussi important que la communauté internationale parle à l’unisson, pour ne pas ajouter aux divisions et à la fragmentation en Libye. L’unité du Conseil de sécurité demeure également fondamentale pour encourager les parties libyennes dans la bonne direction en ce moment décisif.

Fin de l’extrait du rapport des Nations Unies sur la situation en Libye

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