Après, l’OMS, la France vient de déclencher son niveau d’alerte maximale face à l’épidémie de mpox, ex-variole du singe, qui sévit en Afrique. On fait le point sur l’état des connaissances.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) change de braquet. Mercredi 14 août, elle déclenchait son niveau d’alerte le plus élevé face à la résurgence des cas de mpox – appelé anciennement variole du singe – sur le continent africain, en raison de l’apparition d’un nouveau variant.
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Depuis, la Suède a signalé un cas importé de ce variant sur son territoire. Alors que d’autres sont susceptibles d’être détectés prochainement en Europe, la France place à son tour le système de santé en « état de vigilance maximale », a annoncé le Premier ministre, Gabriel Attal, ce vendredi 16 août.Voici les réponses aux questions les plus fréquentes.
Qu’est-ce que le mpox ?
C’est une maladie virale. « Elle est d’origine zoonotique. C’est-à-dire qu’à l’état sauvage, c’est un animal qui sert de réservoir au virus, probablement un écureuil, indique le Pr Antoine Gessain, responsable de l’unité d’épidémiologie et physiopathologie des virus oncogènes à l’Institut Pasteur, et spécialiste de la maladie. Typiquement, les formes classiques africaines de la maladie sont le fruit du passage de l’animal à l’humain. »
L’enfant, après avoir joué avec un animal, contamine éventuellement son entourage proche. Mais les foyers épidémiques s’éteignent assez rapidement. C’est donc le cas classique – et historique – de la maladie. Mais des cas de transmissions exclusivement interhumaines ont émergé. C’est ce qui préoccupe aujourd’hui.
Est-ce le même virus que pendant la pandémie de 2022 ?
Pas tout à fait. Deux clades – comprendre deux variants du virus – sont historiquement identifiés. Le clade I est diffusé en Afrique centrale. Le clade II sévit en Afrique de l’Ouest. Alors que c’est la deuxième version du virus qui a donné lieu à la pandémie en 2022, la première alarme actuellement en Afrique, mais sous forme d’un nouveau variant. Le virus a muté car il a fait un « saut » et s’est propagé massivement dans la population humaine, s’affranchissant du monde animal.
Les victimes de ce clade, appelé Ib, ont changé. Désormais, ce sont des adolescents et des adultes qui sont touchés. Les premiers cas ont été détectés en septembre 2023 dans une zone minière de l’est de la République démocratique du Congo (RDC), parmi des travailleuses du sexe et leurs clients, des hommes travaillant à la mine. Depuis fin 2023, des cas de ce nouveau variant ont été détectés hors des frontières de la RDC. Et donc depuis jeudi 15 août en Europe.
Comment se transmet le mpox ?
« La contamination entre humains se fait par voie cutanée, au contact de vésicules présentes sur la peau et de leurs liquides contenant le virus », continue le Pr Gessain. Le clade Ib, qui fait la dynamique de l’épidémie, se transmet principalement lors de rapports sexuels et le contact des peaux et des muqueuses. On peut lire ici et là qu’une contamination par voie aérienne – par les microgouttelettes de salive – est possible. Il n’en est rien.
Quels sont les symptômes ?
Quelquefois, il n’y en a pas. « Le virus peut être présent dans l’organisme, mais ne pas donner de maladie symptomatique », précise Karine Lacombe, infectiologue et cheffe de service des maladies infectieuses de l’hôpital Saint-Antoine, Sorbonne Université. Après une phase d’incubation, les premiers signes peuvent apparaître. « Cela commence par un syndrome grippal : une grosse fièvre, des courbatures, des maux de gorge. Puis des adénopathies, c’est-à-dire des ganglions disséminés, ajoute-t-elle. Passés quelques jours apparaît une éruption cutanée, qui aboutit à des vésicules qui disparaissent en deux à trois semaines, sans laisser de cicatrices. » Une forte douleur peut aussi être présente. Lors de la pandémie de 2022 – dont la dynamique était aussi les rapports sexuels multipartenaires – le mode de contamination a donné lieu à des lésions au niveau des muqueuses (bouche, région génitale et anale).
Les cas africains médiés par le clade Ib semblent donner un tableau clinique similaire. « Nous ne savons pratiquement rien du cas suédois », souligne prudemment le Pr Lacombe. Les risques de complications sont de deux types. « D’abord ce que l’on appelle le sepsis, une réaction inflammatoire extrêmement importante due au débordement des défenses immunitaires par le virus. Et puis la surinfection bactérienne des lésions cutanées. »
Ce nouveau variant du mpox est-il plus « méchant » ?
Pas sûr. « D’après des données cliniques que l’on a en Afrique, il semblerait qu’il soit plus contagieux et que les personnes qui le contractent soient plus malades », rapporte Karine Lacombe. Qui insiste sur le conditionnel. « Ces données sont assez compliquées à interpréter. Parce qu’il y a peu de dépistage en Afrique. C’est vraiment difficile de calculer une incidence. Mais si on compare le clade I, historiquement présent en RDC, et le clade II d’Afrique de l’Ouest, le premier présente tout de même une plus grande mortalité. »
Difficile aussi d’extrapoler ce qui se passe en Afrique à ce qu’il pourrait se passer en Europe. L’accès aux traitements et l’état de santé des populations sont meilleurs en Occident. « Le mpox reste une maladie des zones socio-économiquement difficiles et survient souvent dans des zones reculées où les soins médicaux ne sont pas performants. Dans ces zones, les enfants – souvent dénutris et parfois, en plus, déshydratés – payent le plus lourd tribut à cette maladie avec des décès liés à des surinfections bactériennes des lésions cutanées. Les autres décès surviennent chez les personnes immunodéprimées par le VIH, surtout s’ils sont peu ou mal traités », souligne le Pr Gessain.
Quels sont les traitements contre le mpox ?
Il existe un antiviral, le tecovirimat, un inhibiteur du cycle du virus dans la cellule. Est-il efficace ? Il est en cours d’évaluation en Europe, notamment en France dans un essai clinique, nommé Unity. « Pour l’instant, nous n’avons inclus que 250 patients pendant l’épidémie de 2022, explique le Pr Karine Lacombe. Ce ne sont pas assez de sujets pour tirer de conclusion. » Un essai de même nature est en cours aux États-Unis, mais là aussi il est trop tôt pour se prononcer sur l’efficacité de la molécule. Et puis les cas occidentaux sont issus du clade II.
Les seules données sur l’intérêt du tecovirimat sur le clade I sont issues d’un essai thérapeutique mené sur des enfants en Afrique. « Les résultats ont montré qu’il ne fonctionnait pas », rapporte l’infectiologue. Des cas de clades I seraient tout de même traités par tecovirimat en France, de manière à enrichir les connaissances scientifiques sur le médicament. En plus des soins de réhydratation, antidouleurs et antibiotiques – en cas de surinfection bactérienne – éventuels.
Comment se prémunir du mpox ?
Les personnes contaminées doivent s’isoler. En cas de prise de risque, il est possible de recevoir une dose de vaccin antivariolique post-exposition. Les deux virus étant proches, stimuler le système immunitaire contre la variole protège dans les deux tiers des cas contre le mpox. À l’hôpital Saint-Antoine, la stratégie est désormais bien rodée. Lorsqu’un cas de mpox est détecté, la vaccination est systématiquement proposée à l’entourage et aux partenaires sexuels.
Par Héloïse Rambert