avril 2, 2025
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Politique

GUINEE BISSAU : L’Opposition adresse une lettre ouverte au président Macron

Monsieur le Président

Le peuple de Guinée-Bissau mène une lutte ardue contre un régime autocratique et dictatorial dirigé par Umaro Sissoco Embalô, dont le mandat a pris fin le 27 février dernier et qui, au mépris obstiné de la Constitution de la République et des autres lois en vigueur dans le pays, continue d’occuper illégalement le Palais présidentiel avec la complicité manifeste des forces armées, dont la mission est de garantir le respect de la Constitution de la République et de la légalité démocratique.

Dans sa saga de démantèlement de l’édifice démocratique de notre pays, l’ancien Président Umaro Sissoco Embalé a également bénéficié de l’étrange connivence et de la complicité des dirigeants occidentaux, en particulier de la République française, dirigée par Son Excellence, qui exerce une influence directe sur certains chefs dÉtat de la CEDEAO, conditionnant leur position par rapport à la cruelle dictature en Guinée-Bissau.

Les relations diplomatiques apparentes que Son Excellence Monsieur le Président entretient avec Monsieur Umaro Sissoco Embalô sont non seulement étrangères aux intérêts des peuples bissau guinéen et français, mais elles heurtent de plein fouet les valeurs et les principes fondateurs de la République française, pays de démocratie, de droits et de libertés.

Votre soutien personnel continu au régime dictatorial d’Umaro Sissoco Embalé est donc considéré comme un parrainage sans équivoque ayant contribué à la consolidation du régime autocratique en Guinée-Bissau avec une réelle contagion au niveau régional, au nom d’un sombre agenda fondamentaliste contraire aux intérêts des peuples de Guinée-Bissau et de France.

Par ailleurs, le silence assourdissant de Son Excellence et des autres autorités françaises sur les atrocités commises en Guinée-Bissau au cours des cinq dernières années, largement relayées par la presse internationale, française en particulier, non seulement contredit de manière flagrante la tradition démocratique de la France, mais menace fortement les piliers des relations historiques entre nos deux peuples.

Monsieur le Président de la République,

En 2024, lors d’une cérémonie improvisée à Paris, M. Umaro Sissoco Embalô a reçu de Son Excellence la légion d’honneur, la plus haute distinction française, ce qui a laissé le peuple bissau guinéen perplexe quant aux critères de cette distinction et qui, à notre avis, n’était qu’une opération visant deux objectifs: blanchir la dictature en Guiné-Bissau et officialiser le pacte scellé avec ce nouvel allié en Afrique de l’Ouest, dans un contexte d’incertitude marqué par le retrait militaire forcé de la France dans plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.

Curieusement, suite à cet honneur rendu à Paris, un groupe de citoyens bissau guinéens vivant en France a été brutalement agressé par les agents de sécurité de Sissoco en plein jour et en sa présence, sans que les autorités françaises ne fassent la moindre déclaration sur ce qui s’est passé jusqu’à présent.

En acceptant de monter à bord de la pirogue dictatoriale de Sissoco Embalô, le président Macron rend un pire service au peuple français et contribue à alimenter le ressentiment légitime du peuple guinéen à l’égard du rôle de la France dans l’instabilité qui frappe l’Afrique de l’Ouest, et la Guinée-Bissau en particulier.

Car le peuple héroïque bissau guinéen aspire à vivre dans la liberté, la justice et la prospérité, dans une Afrique libre et prospère comme en ont rêvé Amilcar Cabral, Kwame Nkrumah, Cheikh Anta Diop, Patrice Lumbumba, Nelson Mandela et Thomas Sankara.

L’agenda dictatorial, qui a débuté le 27 février 2020 avec la prise de pouvoir en dehors de la Constitution alors qu’un contentieux électoral se déroulait à la Cour suprême de justice, a détruit les fondements de la démocratie et placé les principales institutions républicaines, à savoir la Cour suprême de justice, l’Assemblée nationale populaire, le Ministère public et la Cour des comptes, sous la tutelle directe du dictateur Umaro Sissoco Embalé.

L’institutionnalisation des escadrons de torture à la Présidence de la République et au Ministère de l’Intérieur avec plus d’une centaine de victimes à l’intérieur et à l’extérieur du pays, à travers des enlèvements, des séquestrations et des passages à tabac d’opposants, de journalistes, d’activistes et de défenseurs des droits de l’homme, est une réalité connue et consignée dans divers rapports d’organisations de défense des droits de l’homme bissau guinéennes et internationales.

Durant le mandat de votre ami Umaro Sissoco Embalô, les libertés fondamentales, les libertés du travail et les libertés syndicales ont été confisquées et suprimées par des mesures anticonstitutionnelles et illégales qui violent le droit international et les droits de l’homme. De même, notre pays est devenu otage du crime organisé et du trafic de drogue, tandis que la population est plongée dans une pauvreté sans précédente, accentuée par une inflation galopante et une dette publique exponentielle.

Monsieur le Président de la République,

Face aux faits décrits ci-dessus, nous, citoyens bissau guinéens, regroupés au sein de plus de 50 organisations civiques et sociales, saisissons cette occasion pour:

  • – Dénoncer la complicité persistante de Monsieur le Président Emmanuel Macron avec l’ancien Président Sissoco Embalô, qui a contribué à la consolidation d’un régime autocratique et dictatorial en Guiné-Bissau;
  • – Alerter Son Excellence, ainsi que l’opinion publique internationale, notamment française, sur les dangers que représente la dictature sissoquiste pour la Guinée-Bissau et l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, qui compromet tous les efforts collectifs en cours pour consolider la paix et la stabilité dans la sous-région.
  • Rappeler à Son Excellence qu’un pays comme la France, connu pour le combat de son peuple en faveur de la liberté et de la dignité humaine, ne peut être complice de régimes dictatoriaux, comme c’est le cas actuellement en Guinée-Bissau. Car la liberté, l’égalité et la fraternité sont des valeurs universelles qui ont toujours inspité la résistance des peuples, dont le peuple français. Ce sont ces valeurs qui doivent rester et fonder les piliers axiologiques des relations d’amitié entre nations démocratiques, dans la mesure où il n’existe qu’une démocratie;
  • Rappeler à Son Excellence que la même flamme qui a conduit hier le peuple héroïque de ce territoire, sous la direction courageuse et visionnaire d’Amilcar Cabral, à accepter les sacrifices, le sang et la sueur pour l’affirmation de son autodétermination, est toujours celle qui anime aujourd’hui les aspirations de la jeunesse bissau guinéenne en faveur de la liberté, de la souveraineté et de la prospérité;
  • Avertir Son Excellence que persister à soutenir l’ancien Président Umaro Sissoco Embalo, au pouvoir sans légitimité populaire et contre la Constitution du pays, serait un nouvel affront à la Guinée-Bissau, que son peuple est déterminé à combattre sans réserve et sans trêve.
  • Reconnaître que le monde est confronté à des défis multiples, de plus en plus exigeants et complexes, qui ne pourront être relevés que par une synergie de contributions et d’expertises de nations réellement libres et démocratiques. Cependant, les investissements et les parrainages consentis en faveur d’agendas dictatoriaux en Afrique et partout ailleurs dans le monde provoqueront inévitablement la colère des peuples.
  • Exiger de Son Excellence le respect des aspirations légitimes du peuple bissau guinéen à vivre dans la liberté, la dignité et la coexistence pacifique avec les autres peuples frères, dans le respect des valeurs les plus sacrées de I’humanité.
  • Réitérer notre ferme détermination à appeler le peuple bissau guinéen, dans les prochains jours à combattre la dictature et à chasser du palais présidentiel l’usurpateur Umaro Sissoco Embalô, afin de rétablir la normalité constitutionnelle et de créer les conditions de la réalisation du bien-être de tout le peuple africain de Guiné-Bissau.

Dans l’espoir que vous comprendrez l’esprit et la portée de cette lettre ouverte, nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre très haute considération.

REPUBLIKA I ANOS !

Bissau, le 17 mars 2025

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