avril 16, 2025
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INTERVIEW EXCLUSIVE : L’ancien Ministre d’Etat Cheikh Tidiane Sy se confie

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Dans cet entretien, l’ancien Ministre d’Etat, Ministre de la Justice et Ministre de l’Intérieur dévoile son point de vue sur des questions d’actualité.

Bonjour Monsieur le Ministre d’Etat. Comment va la santé ? Une mauvaise nouvelle vous concernant a été diffusée par la presse en ligne.

Hé oui, une nouvelle qui s’apparente beaucoup à de l’intoxication, mais qui a quand même secoué tous ceux qui me sont chers et ne me souhaitent que du bien. C’est dire ce que  « fake news » a pu produire de démoralisant ! Il se trouve, heureusement, que je suis un croyant dont la seule référence est le Coran où Dieu-Le Tout Puissant nous demande de dire : « en vérité, ma Salӑt, mes actes de dévotion, ma vie et ma mort appartiennent à Allah, Seigneur de l’univers ».

Quel message pouvez-vous envoyer à vos amis et sympathisants sur votre état de santé?

A quatre-vingt-quatre, bientôt quatre-vingt-cinq ans, une santé de fer est vraiment illusoire, surtout après toutes les épreuves qu’on a pu traverser. Mais le fait de jouir du plus petit souffle de vie me réconforte, renforce ma foi et m’aide à me préparer pour le « Grand Voyage » dont Seul Dieu-Le Tout Puissant fixe la date et les circonstances.  Mes amis et mes proches savent combien je demeure toujours serein devant l’épreuve quelle qu’en  soit la nature.

Parlons de politique. Le premier ministre Amadou Bâ a fait sa déclaration de politique générale. Quel enseignement avez-vous tiré de cet exercice ?

Vous savez, quand on respecte les règles qui gouvernent le fonctionnement des institutions on ne fait que renforcer l’Etat de droit l Donc cet exercice, pour reprendre votre expression, est en conformité avec notre tradition républicaine, même si le régime dans lequel nous évoluons n’est pas de type parlementaire. En effet il est toujours utile de nous rappeler que nous sommes dans un régime de type présidentiel, ce qui veut dire que le dernier mot revient toujours au Président de la République. Sous ce rapport, en faisant sa déclaration de politique, le premier ministre s’est adossé au projet politique du Président Macky Sall, rien de plus rien de moins. Maintenant, il lui appartient de traduire dans les faits, et pour le bien de nos compatriotes, toutes les orientations qu’il a rappelées et dont la plupart sont déjà en cours d’exécution. Inutile de les citer car elles sont visible à l’œil nu. Je saisis cette occasion pour souligner que le président Sall a fait beaucoup de réalisations utiles et qui vont dans le sens de la transformation du pays. Au vu de cela, nous devons l’encourager !

Cette déclaration de politique générale a été suivie d’une Motion de censure rejetée par les députés. Qu’est-ce que ce rejet vous inspire comme commentaire ?

Je dirai tout simplement qu’une motion de censure à ce stade n’avait pas de sens et ne pouvait donc pas prospérer. Le groupe BBY a montré sa solidité devant l’épreuve, et il est certain qu’il en sera ainsi dans les confrontations à venir. Les Sénégalais ont droit à une assemblée qui s’occupe de leurs préoccupations. 

Il a été remarqué des comportements décriés au cœur de l’hémicycle de la part des députés de l’opposition qui ont saccagé des biens publics lors de l’installation du bureau. Avez-vous été surpris par ces comportements qui s’opposent à notre culture démocratique?

Il est vraiment navrant que les Sénégalais ne se disent pas toujours la vérité. Dans un État organisé, le citoyen, quelle que soit sa place dans la société, ne peut s’arroger le droit de se comporter comme il veut, de bafouer les institutions et de s’en prendre à ceux qui les dirigent. Liberté rime avec État de droit, et dans un État de droit tous les citoyens sont soumis au respect de la Loi. Ne pas se conformer aux exigences de celle-ci conduit irrésistiblement à des comportements délictueux. J’avais fustigé l’attitude de certains députés de l’opposition qui, tout au début de la législature, ont eu un comportement que j’ai qualifié d’indécent, de grossier. Quand on a une bonne éducation, on doit se comporter avec délicatesse. Par ailleurs, solliciter et obtenir la confiance des électeurs induit une certaine élégance dans la manière d’être et d’agir. C’est ça qui fait de nous des « êtres humains » à l’opposé des « animaux ». Lancer des invectives à un député en pleine intervention dans l’hémicycle,  saccager des biens publics, tenter de casser l’urne de l’hémicycle, pire encore frapper une femme en pleine séance parlementaire, si c’est ça qui va apporter le changement promis, « bonjour les dégâts » !

Une probable candidature du président Macky Sall a alimenté les échanges à l’assemblée nationale et dans les médias. Selon vous a-t-il droit à une autre candidature ?

Je répondrai en deux temps à cette question:

• Le droit étant la plus puissante école de l’imagination, comme dirait l’autre, chacun y va de son son de cloche. Les politiques ont leurs avis, marqué du sceau de la pluralité, voire de la divergence. Rien de consistant pour étayer leur position, sinon leur appartenance à tel ou tel parti.

• En 2012, étant ministre de la justice j’ai été confronté à une épreuve similaire. Ma position restera la même, à savoir que la seule instance habilitée à donner la réponse à cette question c’est le Conseil constitutionnel. Donc à ce stade, rien ne peut empêcher le président Macky Sall, s’il le veut, de déposer sa candidature, comme d’ailleurs peut le faire n’importe quel Sénégalais. Cela peut paraître exagéré, mais un Donald Trump peut se pointer au Sénégal et déposer sa candidature à l’élection présidentielle. C’est uniquement au Conseil constitutionnel- habilité à recevoir les dossiers de candidature et à les étudier- qu’il revient de dire que telle candidature est recevable ou que telle autre ne l’est pas. Même dans ce cas, n’importe quel candidat peut attaquer la décision, ce qui obligerait le Conseil constitutionnel à procéder à un deuxième examen des dossiers de candidature. Une fois les candidatures validées par cette instance, tous les citoyens sont tenus de se conformer à la décision. Ce n’est qu’après qu’intervient la question du mandat que le peuple est seul habilité à accorder à travers les élections à tel candidat  plutôt qu’à un autre.  Maintenant à la question de savoir si je soutiendrai le candidat Macky Sall, ou non, ma réponse est oui !

Le président Macky Sall a instruit à son ministre de la justice de voir la possibilité de voter une loi d’amnistie. D’aucuns pensent à Karim Wade et à Khalif Sall. Est-ce une décision politiquement pertinente et pourquoi ?

Une loi d’amnistie a pour unique objet de « supprimer rétroactivement le caractère d’infractions à certains faits ». Politiquement, sa raison d’être est d’apaiser les rancœurs et d’instaurer un climat de paix ; là on n’est plus dans la sphère judiciaire, mais plutôt dans le « diisso », le dialogue qui suppose une volonté commune de préserver les intérêts de la Nation. Donc si un tel projet devait voir le jour, tous les Sénégalais devraient se réjouir et le soutenir. Pour rappel, on ne construit rien de solide dans la division et la confrontation permanente.  Les Wolofs ont raison de dire « ganaw ay jaam »

Après son départ du pouvoir avez-vous gardé les mêmes relations avec Me Abdoulaye WADE?

Mes relations avec le Président Wade ne disparaitront jamais, du fait de tout ce que nous avons vécu ensemble, en tant que « nawle » ; car bien qu’il était le président, il m’a toujours manifesté de l’estime et de la considération au point de m’avoir gardé dans son gouvernement dix ans durant, et à des postes stratégiques.  Maintenant il est évident que  nous n’avons pas la même appréciation de la situation politique du pays, encore qu’en ce qui me concerne j’ai complètement décroché dans le sens que je ne suis plus « encarté ». Mais j’ai mes opinions et mes idées qui ne semblent pas être en conformité avec la ligne actuelle du PDS. Avec tout ce que nous avons enduré du fait d’une pernicieuse campagne autour d’une « dévolution monarchique du pouvoir », l’évolution que connaît le PDS semble bien donner raison aux tenants de cette thèse. Avec certains anciens nous avons été, un beau jour, tout simplement dépouillés de nos responsabilités dans les instances du parti, sans tambour ni trompette. En ce qui me concerne, j’avais déjà exprimé au Président Wade ma décision de quitter l’arène politique.

Monsieur le ministre pensez-vous comme certains qui soutiennent que le Président Wade travaille avec le président Macky Sall pour le retour de Karim Wade ?

Je crois connaître le président Wade pour dire que chaque acte qu’il pose, il sait pourquoi il le fait, et il ne dit pas toujours tout à son entourage. Il évolue comme un joueur d’échec !  Le retour au Sénégal de Karim Wade- qui est avant tout son fils- doit certainement le préoccuper au point, peut-être, d’envisager un rapprochement avec le président MackySall. Mais au vu des récents développements politiques qui montrent un PDS ancré dans l’opposition, je ne suis pas de l’avis de ceux qui avancent cette idée. Maintenant il faut toujours se mettre dans la tête que le président Wade est un animal politique qui ne lâche rien quand il s’agit de ses intérêts et qui peut surgir là où on ne l’attendait pas. Avec lui, il faut toujours faire dans la nuance.

Le président Macky SALL est le président en exercice de l’UA. Et des militaires ivoiriens ont été arrêtés à Bamako sur des faits supposés liés à un projet de coup d’Etat. En tant qu’ami de la Côte d’Ivoire, qu’est-ce que le président sénégalais devrait faire pour faire libérer les soldats ivoiriens ?

Le président Macky Sall a déjà fait ce qui convenait dans cette affaire, déplorable, triste qui n’honore pas les autorités maliennes qui, il faut le rappeler, se sont emparées du pouvoir à la faveur des kalachnikovs.  Moi, je n’éprouve aucune tolérance pour ceux qui s’en prennent aux institutions et propagent, pour se maintenir, le mensonge. En effet, il y a, dans cette affaire, un gros mensonge d’Etat de la part du Mali. Pour qui connaît le président Ouattara, homme de dialogue, tolérant et militant de l’intégration africaine, ce n’est pas lui qui va envoyer des « mercenaires » en uniformes ivoiriens pour aller déstabiliser un pays voisin comme le Mali, un pays  qui, pourtant, doit beaucoup à la Côte d’Ivoire. D’autant plus que jusqu’au niveau du Conseil de Sécurité de l’ONU, tout l’éclairage a été donné dans le sens que ces soldats ivoiriens étaient présents en terre malienne pour le compte des Nations Unies. Mieux encore, dans sa dernière session, la CEDEAO n’a pas manqué d’interpeller les autorités maliennes dans le sens de leur libération. Selon mes informations, les autorités de la transition demandent que les réfugiés politiques maliens actuellement en Côte d’Ivoire leur soient livrés. C’est vraiment triste !  Au Mali, aujourd’hui, c’est la fuite en avant, pour fouetter la fierté d’une population en désarroi on verse dans le délire !  

Tous les observateurs de bonne foi vous diront que la communauté internationale a pris conscience de la folie qui s’est emparée des hommes en treillis qui n’ont aucun sens des convenances. Jugez-en par les diatribes lancées dans tous les sens par le premier ministre malien à la Tribune de l’Assemblée générale des Nations Unies au mois de septembre !

L’Afrique est secouée par des crises au Mali, en Guinée, en Centrafrique, en Libye, au Burkina Faso. La menace terrorisme est accentuée par les coups d’Etat. Avez-vous des craintes pour le Sénégal face à ces deux menaces ?

La menace terroriste n’est pas l’apanage des pays que vous avez cités. Elle se nourrit des faiblesses d’Etats fragiles où les populations, dans certains cas, sont laissées à elles même, sans espace de liberté, ce qui n’est pas le cas du Sénégal. Nous vivons dans une société sénégalaise qui a des traditions de tolérance et de dialogue et où les conflits n’ont jamais été exacerbés au point de casser la dynamique unitaire. Le cas du conflit casamançais est là pour nous rappeler que malgré le recours à la lutte armée par une catégorie de la population,  les habitants de cette région ont, en majorité, œuvré pour la paix et l’unité nationale. Maintenant il faut que les populations se reconnaissent dans les espaces de liberté pour s’exprimer et s’épanouir.  Cependant cela ne veut pas dire que notre pays est totalement à l’abri des « Jihadistes ». Non, car nous avons, sous des formes voilées, des compatriotes qui « militent » pour un Etat islamique ; il faut en prendre conscience, ne pas négliger ce phénomène et continuer de travailler pour consolider notre Islam adossé aux confréries qui ont tant œuvré pour l’éveil de nos populations et qui jouent un rôle essentiel de rapprochement et de fédération des différents segments de la société sénégalaise.  

La démocratie sénégalaise a connu des temps forts et des évolutions significatives de 1960 à nos jours. Aujourd’hui, le Sénégal est-il plus démocratique sous Diouf et Wade que sous Macky?

Posée de cette manière, la question me semble biaisée. En effet, sous Senghor, le Sénégal était surtout sous le régime du parti unique –en tout cas pour une certaine période, même si Léo préférait lui coller celui de « parti dominant ». Le vrai problème était de gérer les clivages au sein du parti au pouvoir, qui pouvaient même évoluer en tendances irréductibles. Mais Senghor savait gérer tout ça par un « centralisme démocratique » dont il était le seul à avoir le secret. Figurez-vous que chaque semaine le Bureau politique du parti se réunissait pour prendre les décisions relatives à la vie du parti. A date échue, le Comité central se tenait ; il en était de même pour le Congrès. Les militants étaient dans une situation d’ « enrôlement » et ils devaient se conformer à la « discipline du parti », ce qui voulait tout dire. Il faut consulter les écrits d’Abdoulaye Ly pour comprendre toute la trame  de cette période senghorienne. Il y a encore certains d’entre nous qui ont vécu cette période où le fait significatif était la prédominance du parti au pouvoir sur l’Etat. Mais Senghor l’utilisait avec dextérité, selon les circonstances. En effet il avait bien fait le reproche à Mamadou Dia de jouer cette carte du rôle prépondérant du parti sur l’Etat, ce qui a provoqué les événements de décembre 1962, une « crise » dont tous les tenants et les aboutissants ne sont pas encore élucidés. Je sais de quoi je parle, ayant eu à parler avec les principaux protagonistes de ces événements. C’est également ce manque de démocratie interne qui explique, à titre d’exemple, le départ, à peine arrivé dans l’UPS, d’un Abdoulaye Wade qui considérait qu’il avait gagné les renouvellements à Kébémer alors que le parti avait validé la victoire de feu Djibril Ndiougou Fall dont on disait qu’il était apparenté à Senghor.

Sous Abdou Diouf, le champ politique devient plus ouvert, avec les mesures d’ouverture qu’il avait prises dès sa prise de pouvoir. Pour résumer, je dirai qu’Abdou Diouf avait fini par « tuer » le parti au pouvoir au profit d’une administration avec une élite technique « politiquement arrivante ». Il ne le dira certainement pas, mais son attachement  pour le PS pouvait être considéré comme  ambigu, peut-être du fait des « Barons » du parti, terme apparu avec son avènement et désignant les compagnons de Senghor.  Avec comme bras droit Jean Collin dont les pouvoirs au sein de l’appareil d’Etat faisaient de lui le véritable patron du pays, la démocratie a vraiment titubé, malgré le pluralisme politique instauré par Abdou Diouf. Les violences qui ont ponctué l’élection présidentielle de 1988 et celle de 1994, l’embastillement récurrent des opposants comme Abdoulaye Wade et ses compagnons ne pouvaient conférer une image reluisante de la démocratie. Avec, au-dessus de tout, les politiques d’ajustement, la vie était loin d’être en rose pour les couches laborieuses.

Avec l’arrivée au pouvoir d’Abdoulaye Wade, il faut reconnaître que le climat politique a changé, et une pratique plus démocratique s’est instaurée avec une opposition forte, combative et déterminée qui tenait à en découdre avec le pouvoir libéral. Wade a laissé faire, donc il faut lui reconnaître une culture démocratique, car même au sein du PDS- qui est sa « propriété », il a toujours accepté la confrontation d’idées et d’ambitions. Il a peut-être changé, maintenant qu’il est séparé de la plupart de ses anciens compagnons.

Le Sénégal est-il devenu plus démocratique sous Macky Sall ? Ma réponse va peut-être vous surprendre. A l’image de tous ses prédécesseurs, le président Macky Sall est devenu un « homme de pouvoir » qui a créé son parti qui l’a porté à la tête du pays. Mieux il est parvenu à fédérer différentes trajectoires politiques, (une coalition composée de presque une centaine de partis allant de la droite à l’extrême gauche), ce qui n’est pas sans lui poser quelques difficultés. Donc il faut lui reconnaître une dextérité politique qui repose sur un pragmatisme et un réalisme sans précédent dans l’histoire politique du Sénégal. Cela dit, sous son régime, le pluralisme politique n’est pas remis en cause, les élections se tiennent, le pouvoir judiciaire-que je connais de l’intérieur- ne subit aucune entrave, les organes de presse naissent comme des champignons. A titre d’illustration, la composition actuelle de l’assemblée nationale confirme bien que la « démocratie majoritaire » a modifié les rapports de force au sein de l’hémicycle. Dès lors qu’est-ce que les autres ont de plus que nous aujourd’hui ? Le respect des institutions, des confrontations empreintes de sérénité en leur sein, une attitude républicaine dans le souci de préserver l’Etat de droit, l’humilité pour reconnaître qu’on ne sait pas au lieu de tomber dans la fabulation. Ce sont, entre autres, sur ces valeurs que repose la démocratie.

Maintenant au sein des formations politiques, il n’y a pas plus méritant que le militant ancré dans sa localité depuis des décennies, et qui remporte toutes les compétitions électorales qui s’y sont déroulées! Il n’y a pas  plus méritant que celui qui, dans cette formation politique, privilégie l’intérêt collectif au dépend de ses prétentions personnelles!

Je ne suis pas de l’APR, ni d’aucun parti politique, mais, à titre d’exemple, lorsque j’ai écouté les déclarations faites par Mme Amineta Touré sur le choix du nouveau président de l’assemblée nationale, je me suis demandé en quoi elle serait plus méritante que Amadou Madou Diop. En effet, ce dernier, plusieurs fois victorieux dans sa commune de Richard Toll, et de surcroît militant de la première heure de l’APR, ce qui ne semble être le cas de Mme Touré, est décrit comme un cadre sérieux et compétent et qui aurait bénéficié, de surcroît, du soutien de l’ensemble des députés de BBY. Ce qui n’aurait pas été le cas de Mme Touré, et cela n’est pas surprenant pour quelqu’un qui n’a jamais remporté une élection et qui s’était retrouvée tête de la liste nationale par la seule volonté du Chef! Personne n’avait fait d’objection à cette désignation.

Le fait d’invoquer, d’une part, son investiture comme tête de la liste nationale et, d’autre part, d’avoir parcouru des milliers de kilomètres, tout ceci en vérité semble l’avoir sauvée d’une énième débâcle, comme ce fut le cas  à Grand Yoff,  contrairement à Amadou Madou Diop, plusieurs fois victorieux dans son fief. À l’époque personne n’a évoqué ses liens de parenté avec la famille de Macky Sall. C’est dire que ceux qui, la plupart du temps, s’enveloppent du manteau de la démocratie, sont en réalité loin de l’idéal démocratique. Ils ressemblent beaucoup plus à des «gourous » de la politique qui vendent aux Sénégalais du vent, et ils sont les adeptes des réseaux sociaux.

Je trouve toutefois déplorable de constater qu’il y a dans les formations politiques cette catégorie de « Bonzes » qui considèrent qu’ils doivent toujours être au-devant de la scène, toujours perchés plus haut que les autres. Il est bon quelques fois, de les faire revenir sur terre.

En tant que doyen de la classe politique sénégalaise, comment appréciez-vous l’émergence des réseaux sociaux et ses conséquences dans la société ?

Les réseaux sociaux ont considérablement modifié la manière dont nous accédons à l’information, la produisons et la partageons, exposant le système médiatique à des distorsions et à des manipulations dont l’origine est souvent difficile à déterminer.

Avec les réseaux sociaux, il est devenu plus facile de persuader le public et d’influencer les opinions. N’importe qui étant un potentiel producteur et diffuseur d’information, les contenus n’ont pas besoin d’être approuvés avant publication, ce qui est positif lorsque l’on souhaite lutter contre la censure et échapper au contrôle médiatique. D’un autre côté, cette liberté crée de nombreux problèmes notamment lorsque des individus s’invectivent à travers les réseaux sociaux ou lors de la diffusion de Fake News. Je suis bien placé pour en parler, ayant moi-même assisté en live à la diffusion sur les réseaux sociaux de la nouvelle de ma mort !

Bien qu’elles ne soient pas vérifiées, les Fake News ont une apparence crédible de sorte que le public ne peut pas toujours les distinguer des informations véridiques. L’impact des FakeNews sur la politique transforme notre démocratie, affecte la confiance du public dans les institutions et son  comportement civique et électoral, les citoyens méfiants étant susceptibles de se détourner des élections. Le champ libre est ainsi laissé aux candidats populistes qui utilisent intelligemment les réseaux sociaux et les Fake News à leur avantage.

L’enseignant que je suis ne saurait rester indifférent devant le spectacle désastreux de notre jeunesse devenue accroc aux Facebook et autres TikTok ! Tout le monde sait que ces outils peuvent être mis à contribution de manière positive notamment dans le cadre du « digital learning ».

Malheureusement, nous assistons à un détournement d’objectif par une jeunesse qui l’utilise souvent par mimétisme ou effet de mode, ignorant que certains actes sur les réseaux sociaux sont constitutifs d’infractions susceptibles d’entraîner des sanctions pénales. Aujourd’hui, la mode est à la production de contenus divertissants sur TikTok. Si pour chaque contenu divertissant, un contenu éducatif était créé, nous pourrions nous satisfaire de cette compétition saine entre divertissement et éducation. Hélas tel n’est pas le cas ! Le divertissement, les invectives, les calomnies et les Fake News l’emportent de loin. D’ailleurs certains pensent que les Chinois ont créé TikTok et s’en servent comme une arme de corruption massive de la jeunesse non chinoise. Il est en effet troublant de constater qu’il existe  deux versions de TikTok, une pour la Chine et une autre pour le reste du monde. Dans la version Chinoise, si vous avez moins de 14 ans, le réseau vous propose des contenus éducatifs, tels que visite de musée, éducation civique, scientifique etc… L’utilisation du réseau par les jeunes est également limitée à 40 minutes par jour. Par contre pour la version internationale, il n’y a aucune restriction de ce genre, et les jeunes sont confrontés à toutes sorte de contenus addictifs sans aucun intérêt pour leur développement intellectuel et sans aucune limite de temps.

Il est temps que nous nous penchions sérieusement sur la question de l’impact des réseaux sociaux sur notre jeunesse. Les Occidentaux le font, mais comme d’habitude, nous avons encore un train de retard. Je suis de ceux qui pensent que les réseaux sociaux  doivent être développés et rendus accessibles au plus grand nombre. Néanmoins, la production de contenus locaux utiles, ainsi qu’une régulation intelligente sont nécessaires afin d’éviter les dérives auxquelles nous assistons présentement ; car la paresse s’est installée en nous pour nous faire avaler toutes sortes « d’informations » qui, avec les vidéos montages de sensation s’avèrent finalement être sources de terrible confusion.

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