En Afrique, l’engagement des jeunes en politique, particulièrement au Sénégal, était jusqu’à une époque récente, un sujet rare dans les débats médiatisés. Toutefois, ces deux dernières décennies, la tendance semble inverser. Les jeunes prennent de plus en plus goût à la politique. Ils créent et intègrent des partis dont ils deviennent même les leaders. Au Sénégal, depuis la seconde phase de l’Alternance, on note un engagement plus réel des jeunes dans la politique. Mais, il convient aujourd’hui de faire une analyse de cette implication de cette catégorie dans la politique. Car, beaucoup de jeunes qui courent derrière les hommes politiques ou qui créent des partis, ne savent pas les principes qui doivent les téléguider. Au Sénégal, c’est souvent l’homme le plus éloquent (avec un masque qui cache son véritable personnage) qui souvent réussit à ameuter une partie de la jeunesse inconsciente qu’il « sacrifie » dans ses aventures…politiques pour assouvir que ses propres intérêts. Mais, le manuel d’information intitulé « Les jeunes et l’engagement en politique », publié par la Fondation Friedrich Ebert Stiftung de Cameroun en 2014, a présenté en faveur des jeunes qui s’engagent en politique d’être mieux outillés pour le faire. Il part du constat que la politique et l’engagement politique sont encore perçus avec beaucoup de suspicion et de crainte de la part des jeunes. De nombreux jeunes restent convaincus que c’est une « affaire » très sale réservée aux personnes à la fois âgées, fortunées et sans morale. Ce manuel s’adresse aussi aux personnes « moins jeunes » qui partagent la même appréhension que ces derniers bien qu’elles comprennent parfaitement la nécessité et la noblesse d’un engagement politique sain. Il fournit des informations et approches utiles pour concrétiser cet engagement dans un parti politique. Il concerne enfin les responsables et cadres de partis politiques qui désirent compter plus de jeunes dans leurs rangs.
Comment les jeunes peuvent-ils entrer en politique ?
L’engagement au sein d’un parti politique, bien qu’il puisse être spontané ou consécutif à une expérience personnelle marquante se doit d’être le résultat d’une démarche construite, réfléchie et guidée par des motivations bien comprises et bien cernées. Ci-dessous, figurent quelques indications qui pourront aider certainement le/la jeune qui s’intéresse à la politique et envisage sérieusement de s’engager.
En tant que jeune, quand vous vous engagez en politique, il est nécessaire de bien s’informer avant d’intégrer une organisation politique. Dans un premier temps, il est important de collecter autant d’informations que possible. Les sources d’information potentielles sont : Les émissions radios et télés spécialisées sur les questions politiques ou d’actualité ; Les bulletins d’information des radios et télévisions nationales et étrangères ; La presse écrite nationale et internationale ; Les magazines spécialisés ; Les sites internet d’information ; les livres.
Chaque jeune qui s’engage en politique devra utiliser ces sources pour collecter des informations sur : Les questions politiques de l’heure, les institutions politiques, les acteurs et actrices politiques.
Cette collecte d’information est nécessaire pour développer une culture politique. Parce que la politique est d’abord et surtout une affaire de gestion des ressources publiques, il est important de développer notre capacité d’analyse et de compréhension de cette gestion d’une part et de se tenir au courant de la marche de la société d’autre part. Une bonne culture politique permet de développer des connaissances utiles dans l’action politique.
Cette culture politique n’est pas acquise une fois pour toute. Elle doit être entretenue par des informations neuves et de plus en plus précises. Elle doit être approfondie par des réflexions personnelles et des confrontations de nos opinions avec d’autres avis afin de se forger des convictions solides.
Cette culture politique doit aboutir à une assez bonne compréhension des éléments suivants : les acteurs /-trices politiques, leurs idées et leurs logiques d’action ; l’histoire politique, économique et sociale de votre ville, région et pays ; la compréhension des règles de droit qui encadrent la vie du citoyen et l’activité politique ; Etc.
Selon le document, il est bon à savoir qu’il convient de s’informer de façon structurée. Ceci signifie prendre des notes, lire de manière systématique, faire des recherches sur des sujets qui nous intéressent. En tant que jeune nous devons utiliser toutes nos aptitudes dans la collecte d’information et dans notre action politique de manière générale : Aptitudes informatiques ; Connaissance des médias sociaux etc.
Il n’est pas nécessaire de tout savoir ou de se tenir à l’affût de toutes les informations. Il est souhaitable d’identifier quelques centres d’intérêt clés qui sont stratégiques pour nous et d’approfondir ou actualiser ses connaissances par rapport à ces questions.
Il est conseillé de rechercher d’abord des informations relatives à nos interrogations propres sur la politique ou d’autres aspects de la vie en société.
Se forger des convictions
L’engagement politique est aussi une affaire de convictions profondes. Les convictions politiques se nourrissent très souvent de plusieurs sources.
Il est très important de se forger des convictions au fur et à mesure que l’on s’efforce de mieux appréhender la question politique. Les convictions politiques qui ont pour fondement nos valeurs et principes profondes se forgent et se confirment à travers : les lectures ; les rencontres humaines, les expériences et les débats auxquels on assiste.
Comme exemples de convictions, les auteurs estiment qu’il n’est pas possible de se développer dans la durée sans préserver l’environnement et lutter contre toutes les formes de pollution.
Pour qu’un gouvernement fonctionne bien, il faut de la transparence et des contre-pouvoirs pour veiller à cette transparence.
L’économie pour se développer a besoin que les entrepreneurs ne soient pas soumis à trop d’impôts. La peine de mort n’est pas efficace pour réduire le crime et rendre justice.
On peut aussi, pour développer ses convictions, s’inspirer des expériences des autres personnes ayant connu le même type de parcours que celui qu’on nous souhaitons suivre. Pour ce faire, on peut lire les mémoires et les biographies de personnes que l’on admire pour une ou plusieurs de leurs qualités. Si ces personnes sont accessibles, il est souhaitable de les rencontrer et leur poser des questions sur les tenants et les aboutissants de l’engagement politique.
Mais le plus important dans la démarche de clarification de ses convictions, c’est la réflexion par soi-même sur tout ce qui nous intéresse. C’est aussi l’introspection sur ce qui nous motive et la clarification de ce que l’on souhaite véritablement réaliser.
Comment choisir sa formation politique ?
Il existe plusieurs raisons par lesquelles on intègre un parti politique. Pour les uns, c’est à travers un proche (un ami, un parent ou un voisin) déjà engagé. Pour les autres, c’est à travers la séduction d’un ou des leaders à l’occasion soit d’une émission médiatique ou d’un meeting.
Quel que soit le moyen par lequel on est mis en contact avec un parti politique, il est important de procéder à quelques vérifications.
Ces vérifications visent à se rassurer sur la nature et la compatibilité d’une organisation politique avec les convictions et les motivations profondes qui nous animent.
Les questions ci-dessous peuvent nous permettre de clarifier notre perception et faciliter notre décision.
Points à examiner | Questions clés à se poser | Bon à savoir |
L’idéologie du parti | L’idéologie présentée est-elle compatible avec mes convictions personnelles ? | |
La légalité du parti | ||
Les positions du parti sur les questions clés | Au sein des partis, il y a un dynamisme qui peut aussi se refléter dans les positions et les courants | |
L’histoire du parti | Quelles ont été les grandes figures historiques du parti ? | |
Les types d’actions menées par le parti | ||
Les conditions d’adhésion | ||
La vie au sein de l’organisation | Comment le parti est-il structuré ? Comment la vie au sein du parti est-elle organisée ? |
Comment intégrer une formation politique ?
Une fois les informations collectées, il n’est en général pas difficile d’intégrer formellement un parti politique. En fonction de leurs structurations internes et de leur positionnement idéologique, les partis adoptent une procédure spécifique pour intégrer de nouveaux membres : L’achat direct d’une carte de membre auprès d’un responsable du parti ; L’acquisition de la carte au moment de l’intégration d’une unité ou d’un organe du parti.
Dans le premier cas, vous pouvez être membre d’un parti sans forcément siéger dans un organe de ce dernier. Dans le second, le statut de membre s’acquiert par l’intégration formelle d’un organe du parti. Cela peut être un organe de base, de coordination ou de direction en fonction des textes et de la culture de ladite formation politique.
Généralement, l’adhésion au parti doit se renouveler au bout d’une période. Dans la plupart des partis, ceci se fait annuellement.
En définitive, on intègre un parti de façon formelle par l’acquisition de la carte de membre et/ou l’intégration d’un organe du parti.
Le Militantisme Politique
Ce que signifie « militer »
Militer en politique veut dire s’engager au sein d’une organisation partisane dans le but de promouvoir et défendre une idéologie, une cause, une politique, des idées, etc. Militer en politique nous met en face d’autres personnes qui n’ont pas la même idée de l’organisation de la société, pas les mêmes points de vue et le plus souvent pas les mêmes intérêts que nous.
Le militant politique est quelqu’un qui :
- A des convictions profondes
- Est prêt à assumer publiquement ces convictions
- Est animé d’un esprit qui l’amène à recruter d’autres personnes par souci de gagner le maximum de gens à la cause de son parti
- S’engage formellement dans le parti
- Contribue au parti en donnant son temps, ses réflexions, ses idées, son argent, ses avoirs matériels, etc.
- Participe à la réflexion, la prise des décisions et la mise en œuvre des décisions au sein du parti.
Etre un porteur de cause au sein du parti
Le porteur de cause peut s’entendre comme tout militant / e qui est particulièrement motivé par une cause ou une problématique. Par exemple, la question du genre, de l’environnement ou encore de la place des jeunes.
Le porteur de cause est une sorte de leader au sein du parti qui ne possède pas forcément un titre ou une responsabilité formelle. On ne peut pas forcement le situer sur un organigramme du parti.
Il se caractérise par l’engagement particulier qu’il a pour une question ou un ensemble d’idées qu’il s’efforce de promouvoir chaque fois que l’occasion se présente. Au-delà même d’attendre les opportunités pour les saisir, il les crée dans le but de rendre l’ensemble des membres du parti plus concernés et avertis sur la question qu’il défend.
Il peut rendre son discours audible en : Organisant au sein du parti des séances d’information avec les cadres et les militants /es à la base ; Organisant des ateliers de formation ou de réflexion pour les membres du parti ; Faisant des propositions concrètes que le parti peut adopter comme sa ligne officielle sur les thématiques qui relèvent de son champ d’intérêt; Menant régulièrement au sein du parti un plaidoyer pour que la cause défendue soit dans les priorités et formellement intégrée dans la gouvernance du parti.
Le porteur de cause au sein d’un parti jouit d’une autorité sur les questions relatives à la cause qu’il défend. Il apparait ainsi comme une sorte de « spécialiste » de la question au sein du parti qui est consulté systématiquement quand le besoin se fait sentir.
Ce faisant, il peut finir par créer au sein du parti tout un courant qui contribue à y faire vivre le débat.
Pour les jeunes qui souhaitent s’engager en politique, être porteur de cause est un excellent moyen pour : Acquérir des compétences sur des sujets qui leur tiennent à cœur ; Connaître et se faire connaître des dirigeants du parti ; Etablir un certain degré de « leadership » au sein du parti qui les positionne pour de plus hautes responsabilités.
Selon les auteurs, il est bon, à ce propos à savoir que : Le porteur de cause a souvent plus d’influence réelle sur la ligne du parti que certains responsables à cause de sa maîtrise technique et la force ou la pertinence des idées défendues.
Pour devenir un porteur de cause, il suffit de développer une expertise sur une thématique qui vous est chère.
Les porteurs de cause sont souvent issues ou en contact avec des organisations de la société civile spécialisée sur des questions spécifiques. Ils continuent d’ailleurs à être des membres actifs de réseaux d’organisations qui militent en faveur de la cause qu’ils défendent. Cela leur permet d’actualiser leur savoir en la matière et d’être en mesure de faire des propositions actuelles et pertinentes.
Contrairement à ce que certains peuvent s’imaginer, il n’est pas difficile de quitter un parti politique. Le départ d’un parti politique peut être le fait d‘une exclusion ou d’une démission personnelle.
Dans le cas d’une exclusion, c’est-à-dire un départ involontaire, ce départ se doit de respecter les dispositions statutaires du parti politique en question. En effet, la plupart des partis politiques prévoient des dispositions qui précisent à quelles conditions ou dans quelles circonstances un individu peut perdre sa qualité de membre. Très souvent, ces motifs se résument aux éléments ci-dessous :
Le non versement des cotisations statutaires ; La violation de certains principes fondamentaux de l’organisation ; La contestation publique de la ligne officielle du parti ; Etc.
Certains jeunes peuvent même se retrouver élu/es au niveau national dès la première année si une opportunité politique se présente. Tout comme certains jeunes choisissent de militer pendant 10 ans ou plus dans leurs organes de base. Chaque jeune gère sa carrière politique selon ses objectifs propres.
En effet, un parti politique peut décider, suite à une réforme, d’intégrer dans ses plus hautes instances certaines catégories telles que les jeunes et cela constitue une opportunité.
En définitive, l’ascension au sein d’un parti politique n’est pas linéaire, car elle tient à tellement de paramètres divers que certains en arrivent à se convaincre qu’il faut des soutiens ou énormément de la chance pour réussir. S’il est vrai qu’il y a des organisations qui favorisent certains profils au détriment d’autres, qu’il y a le besoin de certains soutiens ou mentor, des circonstances politiques nationales favorables ou défavorables peuvent servir de catalyseur pour une carrière politique.
La/ le jeune en tant qu’actrice ou acteur politique
L’engagement politique, comme les autres engagements dans d’autres domaines de la vie à ses réalités et contraintes. Lorsqu’on fait le choix d’intégrer une formation politique, on se met en situation de respecter des règles et des principes qui peuvent être à la fois généraux et / ou spécifiques à l’organe que nous rejoignons. L’objet de ce chapitre est d’apporter un éclairage sur la réalité les implications du militantisme ainsi que sur ce que ce dernier peut changer aussi bien pour le jeune que pour le parti au sein duquel il milite.
Ce que la politique exige de la part des jeunes
La politique est un métier contraignant.
Trois éléments clés sont incontournables pour le jeune qui veut faire une carrière politique (Voir le tableau)
Compétences | |
Ressources Financières | |
Réseau |
Par Rokhaya Daba KEBE