Sur les quais ensoleillés du port Lympia, ce mercredi à Nice, ce n’est pas une prise miraculeuse qu’on exhibe fièrement, mais une statistique qui glace le sang : 35 % des stocks mondiaux de poissons sont aujourd’hui surexploités. Un chiffre implacable, dévoilé lors de la troisième Conférence des Nations Unies sur l’océan, qui réunit cette semaine plus de 120 pays pour tenter de sauver ce qui peut encore l’être.
Car l’océan, longtemps perçu comme une ressource inépuisable, est en train de céder sous le poids de la surexploitation, du changement climatique et de la pollution. « Nous attaquons le capital, pas seulement les intérêts », alerte Manuel Barange, biologiste et responsable à la FAO (Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture), en présentant un rapport phare sur l’état des ressources halieutiques.
Un monde de contrastes
Ce nouveau rapport — le plus complet jamais publié — révèle des inégalités criantes : si la côte pacifique de l’Amérique du Nord, l’Australie ou l’Antarctique affichent une gestion durable de leurs pêcheries, ailleurs la situation est critique. En Méditerranée, 65 % des stocks sont surexploités. En Afrique de l’Ouest, plus de la moitié.
La leçon est claire : quand la gestion est rigoureuse, ça fonctionne. Exemple frappant : le thon, autrefois en danger d’effondrement, voit désormais 87 % de ses principaux stocks exploités durablement. Une réussite rendue possible grâce à un contrôle international strict.
L’océan, bien commun mondial
Mais cette résilience a un prix. « Il faut des institutions, de la science, des moyens », plaide Manuel Barange. Et surtout, une volonté politique forte, au moment où les océans souffrent aussi du réchauffement, de l’acidification, des plastiques omniprésents et de la montée des eaux.
Devant un parterre de dirigeants mondiaux, dont Emmanuel Macron et António Guterres, le message est unanime : l’océan n’est pas un réservoir sans fond ni un dépotoir planétaire. « Il est notre bien commun par excellence », martèle le Secrétaire général de l’ONU, en appelant à une gouvernance plus équitable.
Vers un sursaut collectif ?
Un traité historique sur la haute mer, en passe d’être ratifié, pourrait marquer un tournant. Des engagements contre la pollution plastique, pour la pêche artisanale ou encore la création de zones marines protégées sont attendus dans les prochains jours.
Nice veut laisser sa trace dans l’histoire : celle d’un Plan d’action pour l’océan, socle d’une politique mondiale capable d’enrayer l’hémorragie.
Car comme l’a rappelé le président du Costa Rica, Rodrigo Chaves Robles, dans un discours poignant :
« L’océan nous parle. Il est temps d’écouter. Il est temps d’agir. »