La Fondation pour les études et recherches sur le développement international (FERDI) a abordé, dans un rapport, le système monétaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). Intitulée « L’UEMOA à la croisée des chemins en matière monétaire ? Une contribution à la réflexion sur son régime de change », la note évoque le périmètre géographique futur de l’Union monétaire, l’évolution de l’UEMOA dans le cas d’un scénario sans coopération monétaire avec la France, et la question des transitions vers un nouveau régime monétaire et de change.
Pour comprendre les principaux messages que la FERDI délivre dans cette étude, il convient de souligner d’emblée que le système monétaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) est caractérisé par une monnaie unique, le franc CFA d’Afrique de l’Ouest (XOF). Son ancre est un taux de change fixe vis à vis de l’euro. La France apporte une garantie illimitée et inconditionnelle à ce régime de change. Malgré les réformes intervenues en 2019 qui ont supprimé la participation française au sein des institutions de l’Union monétaire, l’obligation de dépôt d’une partie des réserves auprès du Trésor français et qui ont ouvert la porte à une modification du nom de la monnaie, ce système fait l’objet aujourd’hui encore de critiques, économiques parfois, politiques et émotionnelles plus souvent.
Selon les auteurs de la notre, les critiques d’ordre économique adressées au système de change fixe portent sur les impacts supposés négatifs du système sur la compétitivité et donc la croissance de ses pays membres. Elles ont fait l’objet d’objections fortes. Il n’est en effet pas possible de démontrer une influence négative du franc CFA sur la performance économique des pays membres de l’Union sur le long terme. Ces critiques se sont aussi réduites de façon sans doute conjoncturelle du fait de l’évolution respective de l’UEMOA et des économies comparables en Afrique sub-saharienne (c’est à dire non pétrolières) depuis une dizaine d’années.
Mais les critiques sont avant tout politiques et identitaires. L’origine coloniale du régime de change, qui date de 1939, le colore d’une dimension symbolique le disqualifiant aux yeux d’une partie de l’opinion. Certains aspects de la coopération monétaire restent aussi ressentis, à tort, comme restreignant la souveraineté des États membres de l’Union. C’est le cas notamment de la garantie française ou de l’arrimage à l’euro, alors que les restrictions invoquées proviennent directement du choix d’un change fixe et d’une union monétaire. Les changements de parité relèvent pour leur part uniquement des autorités de l’UEMOA.
Ce rejet d’une partie de l’opinion, a tendance à affaiblir, voire à occulter, la réflexion économique et institutionnelle sur les solutions possibles si les pays concernés souhaitaient faire évoluer le système actuel. Compte tenu de la cohérence interne de ce système il n’est pas certain que puissent subsister certains de ses éléments fondamentaux sans les autres : une fin de la garantie de change de la France entraînerait probablement une moindre crédibilité du régime de change fixe, et le changement de régime de change pourrait mettre en danger l’existence même de l’Union. Ces changements auraient de substantielles implications sociales, politiques et économiques.
A l’initiative de l’UEMOA, une discussion inclusive en son sein sur les solutions possibles de remplacement du franc CFA serait donc utile. Elle devrait permettre de mieux mesurer opportunités, risques et coûts de ces changements et d’une période de transition. Cette réflexion donnerait également à la France l’occasion de voir si et comment elle peut accompagner l’évolution souhaitée par les pays de l’UEMOA. Ce document vise à faciliter et éclairer cette réflexion.
Continuité géographique de l’arrangement monétaire actuel
Cette première option suppose que les pays de l’AES et le Sénégal continuent à adhérer au système actuel, moyennant éventuellement des réformes. Celles-ci peuvent être d’ordre symbolique (le nom de la monnaie, par exemple) ou d’ordre technique (un changement d’ancre par exemple). Elles sont abordées dans la partie suivante.
L’élargissement : Depuis longtemps, les pays visés par un élargissement de l’UEMOA sont la Guinée, le Ghana, la Gambie, le Cap-Vert ou encore la Sierra-Leone.
Les arguments en faveur de l’élargissement sont d’ordre économique, dans la mesure où l’UEMOA n’est pas seulement une union monétaire mais aussi une union commerciale et une aire de coopération économique. L’élargissement de l’Union aurait des mérites par ses effets d’échelle. Il permettrait un meilleur équilibre économique sous régional avec le Nigéria.
Les arguments sont également politiques. En effet, le développement de la coopération économique et monétaire peut avoir des effets sur la qualité de la coopération politique en général, réduire les risques de conflictualité et créer de nouveaux canaux de communication et solidarité entre pays.
Les arguments négatifs touchent à l’accroissement des risques nationaux de crise de balance de paiements, à la complexité supplémentaire de la gouvernance et de la prise de décision, et enfin à la difficulté additionnelle possible à approfondir l’Union : il y a nécessairement un arbitrage entre intensité et extension de la coopération entre Etats.
Quels que soient les mérites et risques d’un élargissement de l’Union, si celui-ci était entrepris, il parait vraisemblable que les pays visés n’adhéreraient pas à l’Union en l’état, comme certains l’ont fait savoir depuis de nombreuses années. Des réformes importantes seraient nécessaires pour les amener à l’intégrer.
Ces réformes sont sans doute relatives à la gouvernance de l’Union : l’UEMOA serait au défi de construire une gouvernance qui continuerait à devoir traiter les mêmes types de défis que l’Union monétaire européenne. Mais, alors que ceux-ci ont été jusqu’à présent relevés entre des pays partageant la même histoire et culture monétaire, il s’agirait alors de créer une nouvelle culture économique et monétaire commune entre des pays connaissant une histoire d’érosion monétaire et des pays connaissant une histoire de stabilité monétaire. L’adhésion de la Guinée-Bissau constitue un précédent utile mais qui ne peut être complètement transposé en cas d’élargissement à des économies plus importantes. Dans un premier temps la sous optimalité de l’Union s’en trouverait renforcée.
Ces réformes touchent aussi à la relation avec la France, pour deux séries de raisons.
En premier lieu, il est vraisemblable que les plus importants des pays potentiellement adhérents ne souhaitent pas conserver un système de change fixe. C’est le cas du Ghana, qui l’a fait savoir en 2019. Il est certes possible de maintenir une coopération monétaire entre la France et une UEMOA élargie dont le régime de change comporterait une flexibilité, à définir. Mais ceci impliquerait une négociation avec la France pour modifier les accords monétaires, et la France devrait en référer à l’UE.
En second lieu, le maintien de la garantie de change de la France au XOF en cas d’élargissement de l’Union nécessite aussi de vérifier quelle serait la position de la France, qui est inconnue à ce stade. L’élargissement de l’Union entraînerait pour la France une croissance du risque impliqué par la garantie de change, du fait de l’accroissement de la taille même des économies africaines partenaires, mais aussi de l’historique monétaire des pays susceptibles d’adhérer, vulnérables à des crises de balance des paiements et qui n’ont pas la longue pratique des pays de l’UEMOA pour gérer ce système. Leur histoire économique l’a montré dans les décennies passées et notamment dans la période la plus récente. La France elle-même devrait vérifier la compatibilité de cet accroissement de son risque de garant avec ses propres accords avec l’Union Européenne et demander leur validation. La décision n°98/683/CE du 23 novembre 1998 concernant les questions de change relatives aux francs CFA et au franc comorien prévoit des procédures de consultation des institutions européennes en cas de modification substantielle des accords de coopération monétaire existants. Les principaux partenaires concernés sont la Banque centrale européenne (BCE), le Conseil (Comité économique et financier, CEF et donc les Etats membres) et la Commission européenne. Le considérant n°11 de la décision prévoit en effet qu’« il convient que les organes communautaires compétents puissent se prononcer avant toute modification de la nature ou de la portée des accords actuels ; que cela s’applique aux modifications concernant les parties à l’accord et le principe de la libre convertibilité à parité fixe entre l’euro et les francs CFA et comorien, cette convertibilité étant garantie par un engagement budgétaire du Trésor français ».
Il est à noter qu’il est également très improbable, en l’état des équilibres et sensibilités politiques, que l’Union Européenne veuille se substituer à la France pour apporter une garantie de change à l’Union élargie, si jamais les Etats africains concernés le voulaient.
L’élargissement de l’UEMOA imposerait donc de repenser nombre des règles de l’Union, et peut-être sa relation avec la France, dont la position doit être vérifiée. Des transformations éventuelles dans cette relation conduiraient sans doute, comme on va le voir plus loin, à de nouveaux transferts et partages de souveraineté entre Etats africains membres. Il est important d’avoir en tête la chaîne de causes et conséquences dans tout débat sur les relations entre l’UEMOA actuelle et ses nouveaux Etats membres potentiels, ce d’autant plus que leurs économies sont plus grandes.
Maintien d’une coopération monétaire avec la France, avec éventuellement un élargissement à d’autres pays
Ce scénario suppose que les Etats participant à l’UEMOA et la France soient disposés à maintenir le cœur de la coopération monétaire constitué par la garantie. Dans ce cas, des évolutions du système sont possibles et sans doute nécessaires. Elles portent sur le nom de la monnaie, la gestion de la garantie et éventuellement le rattachement à l’euro.
Le principe d’une nouvelle dénomination a déjà été décidé en 2019, mais dans le cadre d’un projet d’union monétaire au niveau de la CEDEAO. Depuis lors, ce projet semble à l’arrêt, même si certains pays expriment leur attachement à ce chantier lancé au siècle dernier. Le changement de la dénomination de la monnaie est donc à ce stade de la seule responsabilité des autorités de l’UEMOA. Elles doivent naviguer entre deux écueils : le changement de nom doit refléter une réelle identité régionale et tous les Etats membres doivent pouvoir s’y reconnaître ; il ne doit pas éroder la confiance dans la solidité de la monnaie. Le nom d’ECO, qui avait été choisi en 2019, étant préempté pour le projet de monnaie commune de la CEDEAO, il pourrait être pertinent que les Etats membres de l’UEMOA s’orientent vers un autre nom pour leur devise commune, affirmant ainsi symboliquement une souveraineté monétaire qui existe déjà.
La réforme de 2019 a supprimé les contraintes de gestion des réserves pour les Etats membres de l’UEMOA ainsi que la présence de la France dans les instances de gouvernance de l’UMOA. Celle-ci n’est plus présente ni au Conseil d’administration et au Comité de politique monétaire de la BCEAO, ni à la Commission bancaire. Mais cette réforme a préservé le caractère inconditionnel et illimité de la garantie.
Logiquement, l’accord de coopération entre les Gouvernements des États membres de l’Union monétaire ouest-africaine et le Gouvernement de la République française, conclu le 21 décembre 2019, contient, comme la précédente convention, des dispositions applicables en cas d’épuisement des réserves et de la mise en jeu de la garantie. Il est ainsi prévu qu’en situation de crise sévère (taux de couverture de la monnaie, soit le rapport entre le montant moyen des avoirs extérieurs de la BCEAO et le montant moyen de ses engagements à vue, inférieur à 20%), la France pourra désigner, à titre exceptionnel et pour la durée nécessaire à la gestion de la crise, avec voix délibérative, un représentant au Comité de politique monétaire de la BCEAO. En outre pour prévenir ou gérer une crise, la France peut demander à titre exceptionnel à participer sans voix délibérative aux réunions du Conseil d’administration de la BCEAO et de à la Commission bancaire.
Aucune mesure automatique de restriction monétaire n’est imposée, ce qui aurait été perçu comme un retour en arrière par rapport à la réforme de 1973. La réforme de 2019 n’a laissé subsister qu’une obligation. Elle consiste dans le « ratissage », c’est à dire la cession forcée au profit de la BCEAO contre monnaie de son émission des disponibilités extérieures en devises détenues par tout organisme public ou privé ressortissant des États membres de l’UMOA (article 5 de la Convention). Cette disposition est un héritage du passé. Dans l’hypothèse peu probable où elle pourrait être mise en œuvre et serait efficace, elle est encore plus agressive que des mesures de restriction monétaire.
Il est probable que dans un tel cas de figure la solution réside dans un accord entre le FMI et tous les pays de l’UEMOA, avec un objectif collectif de reconstitution des réserves. Mais les négociations avec cette institution sont souvent difficiles et longues et relèvent des relations de chaque Etat avec le FMI. Ni la France, ni les institutions de l’UEMOA n’ont la possibilité d’imposer un accord avec le FMI, même si, comme ce fut le cas pour la CEMAC en 2016 (Sommet de Yaoundé), un processus de réforme collectif peut être mis en place de manière volontaire et s’accompagner d’un objectif global de réserves de changes souscrit par la Banque centrale. Mais même dans ce cas, tout accord reste propre à chacun des pays accompagnés par le FMI et la France.
Il est problématique pour les Etats africains de ne pas savoir jusqu’où la France serait disposée à contribuer financièrement au soutien de la balance des paiements et du niveau de la parité dans un contexte durablement dégradé et sans mesures correctives. En tout état de cause, prévoir des mesures correctives ex ante est un élément de crédibilité de l’accord de coopération monétaire et du système de change en général, même s’il paraît contraindre la souveraineté monétaire Mais comme indiqué plus haut, c’est en fait le double choix d’un taux de change fixe et d’une union monétaire qui contraint les marges de manœuvre en matière monétaire et pas les dispositions prises pour assurer la crédibilité de ces choix.
Un système monétaire totalement indépendant pour l’UEMOA
Que l’UEMOA demeure dans sa configuration actuelle ou plus encore si sa composition s’élargit à d’autres Etats, les Etats africains peuvent souhaiter que les liens monétaires avec la France disparaissent.
Sur le long terme, la croissance relative de la masse monétaire et du PIB de l’Union par rapport à celle de l’économie française rendra inéluctable la transformation de cette relation. Elle n’a en effet de crédibilité dans sa forme actuelle que si l’économie et la masse monétaire de la zone UEMOA demeurent petites par rapport à celles de la France, ce qui n’est pas vraisemblable sur très longue période. Il est donc de toute manière utile et important de réfléchir à l’avenir de l’UEMOA sans garantie illimitée du trésor français.
La question essentielle est alors comment assurer la stabilité de la monnaie en l’absence de la garantie française ? Sans garantie, il est nécessaire soit de permettre une certaine flexibilité du taux de change soit de prévoir un mécanisme d’accroissement des réserves extérieures de l’Union.
Il existe plusieurs régimes permettant une flexibilité du taux de change.
L’éclatement de l’UEMOA
Si l’UEMOA devait éclater deux schémas se présenteraient : soit l’adoption de monnaies nationales, évoquée pendant la campagne électorale par les actuelles autorités sénégalaises, soit la création d’une nouvelle union avec une monnaie commune envisagée par l’Alliance des Etats du Sahel.
La création d’une monnaie nationale, voire la création d’une monnaie commune à un petit nombre de pays, donne une plus grande liberté d’émission de la monnaie, directement au gouvernement si la Banque centrale n’a pas un statut d’indépendance. Elle permet de financer un déficit budgétaire et évite mécaniquement des arriérés de paiements internes de l’Etat. Mais la conséquence de l’expansion monétaire est, encore plus rapidement et sûrement dans des économies peu financiarisées, (i) un déficit de la balance des paiements courants et globale et donc une pression sur les réserves de changes, (ii) de l’inflation et (iii) une dépréciation du taux de change aggravant les tensions inflationnistes, et ce quel que soit le régime de change choisi. La défiance dans la monnaie entraînerait des sorties massives de capitaux que le contrôle des changes serait bien en peine d’empêcher. Dans l’hypothèse d’un taux officiel fixe ou d’un taux flottant contrôlé visant à éviter une forte dépréciation, se développera nécessairement un marché parallèle ou informel des devises au taux largement inférieur. On peut s’attendre dans l’hypothèse d’un éclatement de l’Union à une forte dollarisation comme en ont connu beaucoup d’économies notamment africaines au cours de ces dernières décennies, avec une prédominance dans les paiements fiduciaires de l’euro et du dollar ou du XOF si celui-ci devait subsister dans une partie de l’ancienne UEMOA…. Or dans les économies dollarisées, les autorités monétaires perdent une très large partie de leur pouvoir d’action sur l’économie et donc les Etats leur souveraineté monétaire.
Il est vraisemblable que les conjonctures nationales varieraient alors fortement en fonction de la qualité des choix monétaires et de change et des institutions de chaque pays. Néanmoins, selon nous, il y a peu de raisons de penser que les Etats concernés connaîtraient sur le moyen et long terme un chemin économique et social différent de celui des autres pays africains. Il pourrait être marqué pour certains par de bonnes performances économiques, mais serait sans nul doute caractérisé par des niveaux d’inflation significativement plus élevés, auxquels seule une très grande rigueur de gestion macroéconomique permettrait d’échapper.
L’observation de l’histoire économique des dernières décennies en Afrique conforte cette prédiction. Dans la sous-région, les évolutions récentes, par exemple, du Ghana, du Nigéria et de la Guinée, en montrent la matérialité. Si l’on se réfère aux pays de la CEDEAO on constate que, selon les prévisions du FMI pour 2024, les taux d’inflation sont partout bien supérieurs à ceux de l’UEMOA ou du Cap vert, ce dernier bénéficiant d’une coopération monétaire avec le Portugal du même type que les pays bénéficiant d’un accord de coopération monétaire avec la France.
Quelles dispositions transitoires pour passer d’un système à un autre, en évitant le chaos ?
Quel que soit le scénario de changement profond envisagé, maintien de l’Union sans coopération monétaire avec la France ou éclatement de l’Union, la mise en place de ces nouveaux régimes demande des travaux préparatoires, dont l’importance est largement occultée. Ceux-ci vont bien audelà du choix de la nature d’un éventuel nouveau régime de change.
Envisageons d’abord le cas du maintien de l’Union avec abandon de la garantie, puis celui d’une dissolution de l’Union marquant l’échec de l’intégration régionale par la monnaie.
Le maintien de l’Union avec abandon de la garantie impliquera le choix du nouveau régime de change, la négociation de la nouvelle gouvernance ainsi que la définition des objectifs de la politique monétaire et des instruments à utiliser. C’est une négociation à la fois très technique et très politique. Elle devra engager simultanément la BCEAO, les ministères des finances et les chefs d’Etat et de gouvernement.
Quel devrait être alors l’horizon temporel pour la fin de la garantie française ? Une première option est d’aller très vite avec l’assistance du FMI, une autre d’affirmer le maintien de la garantie sur plusieurs années afin de préparer l’Union à la nouvelle situation et éviter la spéculation.
Si le choix se porte sur la fixité du taux de change, il est possible qu’il faille envisager d’emblée une dévaluation lors de la mise en place du nouveau système. En effet quelle que soit l’adéquation actuelle du taux de change effectif réel de l’UEMOA, un changement de régime susciterait des comportements de prudence des opérateurs économiques qui présenteraient un risque pour le niveau de la parité. Le choix d’un nouveau niveau de celle-ci risque alors d’être impératif, ce qui implique une discussion entre Etats, actuellement détenteurs de la compétence en la matière.
La dissolution de l’Union nécessitera d’en négocier les modalités. Ceci implique la distribution des actifs et des passifs communs, sujet hautement politique, dans la mesure notamment où les différents pays ont contribué très différemment aux réserves de change de l’Union. Il faudra prévoir la dissolution de la BCEAO et le licenciement de ses collaborateurs, qui seront éventuellement réembauchés pour partie dans les nouvelles institutions monétaires nationales. Il faudra décider du sort de la monnaie fiduciaire en circulation et de sa conversion dans les différentes monnaies nationales. Le traitement des créances internationales intra UEMOA sera un élément clé et sans doute très délicat à régler. La dissolution de l’Union demandera aussi de statuer sur l’avenir de la coopération économique et commerciale, un sujet complexe. Enfin, il faudra décider du sort de la BOAD, dont le capital est détenu majoritairement par la BCEAO et qui devra travailler avec plusieurs monnaies.
Tout ceci demande du temps de négociation et de mise en œuvre, pour que le processus soit exécuté dans le meilleur intérêt des Etats concernés. Il est illusoire que ce processus puisse être secret, c’est au contraire la transparence des perspectives qui permettra de limiter la spéculation. Les opérateurs économiques auront donc intérêt à se protéger contre d’éventuels dérapages, surtout s’ils craignent que l’arrêt de la coopération monétaire avec la France et la modification ou la disparition de l’union monétaire n’aient pour conséquence une dépréciation du taux de change et une flambée d’inflation.
Synthèse de Awa BA