juillet 21, 2025
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Politique

Mauritanie– Sénégal : du franchissement des frontières vers un avenir partagé

D’un passage frontalier à une vision d’avenir

Dans un monde en mutation, où les défis sécuritaires, les exigences du développement et les bouleversements géopolitiques se multiplient, l’accord de franchissement entre la Mauritanie et le Sénégal apparaît non pas comme une simple disposition logistique, mais comme l’expression d’une nouvelle approche de la gestion du voisinage et d’une volonté affirmée de bâtir une intégration régionale durable. Cette dynamique est incarnée par deux chefs d’État empreints de sagesse et de clairvoyance : le président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani et le président Bassirou Diomaye Faye.

De la sensibilité frontalière à la stratégie de partenariat

L’histoire et la géographie imposent aux pays voisins une réalité complexe, oscillant entre les opportunités d’intégration et les risques de confrontation. Il est naturel que des tensions ou des contentieux s’accumulent au fil du temps. Mais la véritable transformation intervient lorsque les dirigeants parviennent à dépasser les comptes du passé et placent le développement partagé au-dessus des différends et des mémoires douloureuses.

C’est ce qu’ont accompli les présidents Ghazouani et Faye. Ils ont compris que transformer la géographie d’un fardeau en levier exige des décisions courageuses, fondées sur une logique de bénéfices réciproques et sur une volonté de reconstruire la confiance sur des bases solides de compréhension mutuelle.

Leçons européennes : quand l’intérêt prime sur les blessures du passé

L’expérience européenne offre des exemples pertinents sur la manière dont des pays autrefois ennemis ont su bâtir des partenariats solides, moteurs de prospérité.

La France et l’Allemagne, après deux guerres mondiales dévastatrices, ont choisi dans les années 1950 de fonder un partenariat économique autour du charbon et de l’acier, qui deviendra le socle de l’Union européenne.

L’Irlande et le Royaume-Uni ont su dépasser un conflit historique douloureux par des accords juridiques et politiques inscrits dans le « Good Friday Agreement », ouvrant la voie à des décennies de stabilité relative.

Les pays des Balkans, après les guerres des années 1990, aspirent aujourd’hui à rejoindre l’espace européen comme choix stratégique pour la stabilité et le développement.

Ces exemples montrent que surmonter le « syndrome de voisinage » n’est pas un luxe intellectuel, mais une condition indispensable à toute ambition régionale ou internationale. Les États qui échouent à régler leurs différends avec leurs voisins s’exposent à l’isolement et à des relations à géométrie variable.

Prenons l’exemple du Maroc : le maintien de tensions persistantes avec son voisinage immédiat, et l’occupation d’un territoire voisin — le Sahara occidental — l’a conduit à miser sur des alliances lointaines géographiquement et limitées stratégiquement, s’entourant ainsi de murs d’explosifs, symboles d’un échec diplomatique à dépasser l’enfermement et à élargir sa vision.

Le franchissement mauritano-sénégalais : un pas vers l’avenir

C’est dans ce contexte que doit être lue l’accord de franchissement entre la Mauritanie et le Sénégal : une traduction concrète d’une vision claire partagée par les deux chefs d’État, visant à refonder la relation bilatérale sur les principes d’ouverture, de confiance et d’intérêt commun.

Ce franchissement n’est pas simplement l’ouverture d’un poste-frontière ; c’est une transition politique et stratégique vers un nouveau modèle de relations, ouvrant la voie à :

Une plus grande fluidité dans les échanges commerciaux et la circulation des personnes.

Un renforcement de la sécurité frontalière grâce à la réduction des trafics et de la criminalité organisée.

Une dynamisation de la coopération dans les domaines de l’énergie, de l’agriculture et des infrastructures.

Une consolidation des liens sociaux et culturels unissant les deux peuples.

Le Sénégal se transforme… une opportunité à saisir

Les évolutions en cours au Sénégal renforcent les perspectives de ce rapprochement. Le pays n’est plus gouverné uniquement par une élite francophone laïque défendant une pensée coloriste ou une volonté de suprématie noire sur la Mauritanie. Il est désormais plus ouvert à sa profondeur arabo-islamique, ce qui redonne toute sa légitimité à un lien culturel et historique ancien entre les deux rives du fleuve.

Le président Faye incarne une nouvelle génération de dirigeants sénégalais, fiers de la culture arabo-islamique, qu’ils considèrent non comme un rival, mais comme un élément constitutif de l’identité nationale. Cette vision rejoint parfaitement l’orientation du président Ghazouani, qui œuvre depuis son accession au pouvoir à renforcer la position de la Mauritanie dans son environnement africain et arabe, tout en faisant de la stabilité un préalable à tout développement.

De l’ouverture des frontières à la construction du futur

Ce qui se joue aujourd’hui entre Nouakchott et Dakar n’est pas un simple rapprochement politique, mais bien l’inauguration d’une nouvelle ère de bon voisinage éclairé, conscient que le véritable franchissement ne s’opère pas uniquement par les ponts physiques, mais par une redéfinition des rapports fondée sur le partenariat plutôt que sur l’hostilité, sur la confiance plutôt que sur la suspicion.

Les présidents Ghazouani et Faye ont dessiné les contours d’une phase prometteuse. Aux élites, aux médias et à la société civile de chaque côté de la frontière d’accompagner cette dynamique, et de contribuer à ancrer une culture de coopération et d’intégration, au lieu de ressasser un passé que l’histoire elle-même a dépassé.

Ce n’est qu’avec cet esprit que la géographie devient levier, que le voisinage se mue en opportunité, et que l’État assume un rôle régional fort dans son environnement — non comme une entité préoccupée par ses propres murs.

Telle est notre destinée : être voisins, et bâtir ensemble la renaissance de nos deux nations dans un monde où seuls les États capables de transformer les défis en opportunités et les obstacles en ponts d’amitié, de coopération et de respect mutuel, parviennent à compter.

Que se taisent les voix de la haine politique qui alimentent la discorde entre les deux peuples et les deux États.

** Par Abdellah Ould Bouna, expert stratégique mauritanien 21 juillet 2025

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