Depuis le début du mois béni du ramadan, chaque soir, nos chaînes de télé proposent des émissions quasiment identiques aux téléspectateurs. On y parle principalement de la politique avec des invectives, des débats houleux, des pugilats mais très rarement d’économie, de culture, de philosophie ou de géopolitique. Il est peut-être temps de songer à des émissions originales avec des programmes de qualité.
Dans un pays où la majorité des citoyens sont analphabètes, la télévision pouvait être un moyen de socialisation. Nos chaînes de télévision auraient pu servir de transmetteur de normes, de valeurs et de concepts. En somme, un troisième agent de socialisation derrière la famille et l’école, car elles fournissent des modèles comportementaux aux jeunes. En ce mois béni de Ramadan, nos différentes chaines de télé avaient la possibilité de diffuser des programmes culturels, économiques et éducatifs de qualité pour contribuer d’une certaine manière à améliorer la conscience collective des masses.
Du mimétisme sur les chaînes de télé
Les chaines de télévisions tentent de satisfaire leur public pendant le ramadan avec de Grands Plateaux tous les soirs. Néanmoins, on a l’impression que toutes les émissions ont le même format. Si ce ne sont pas les mêmes invités, c’est pratiquement les mêmes rubriques. En effet, du peu qu’on s’intéresse aux différents programmes que ce soit Salon d’honneur de Walf, Grand Plateau Sen TV ou Quartier Général TFM, on constate un mimétisme quasiment gênant. On y parle chaque soir des mêmes thèmes tous ayant rapport à la politique. On voit sur nos petits écrans des disputes très houleuses entre acteurs politiques et présentateurs ou présentatrices. Les invectives et les pugilats sont courants. Chaque intervenant essayant d’imposer ses opinions, critiquant sévèrement le leader du camp opposé. Tout est excès, voire extravagance. On y apprend très peu de choses au final. Parfois, les intervenants dépassent toutes les limites au point que le CNRA soit obligé de faire des communiqués pour les rappeler à l’ordre. « Le Conseil national de Régulation de l’Audiovisuel, face à certaines dérives découlant de la diffusion, de certains contenus heurtant considérablement certaines sensibilités et susceptibles de constituer une menace sur la stabilité nationale et la cohésion sociale, appelle les médias audiovisuels à éviter la diffusion de programmes de nature à : tourner en dérision la religion ; inciter à l’intolérance, à la stigmatisation, à l’exclusion et à la compétition entre les religions et/ou confréries ; discréditer, attaquer ou dénigrer, de manière explicite ou implicite, les autres religions, confréries ou personnes qui les incarnent ou qui s’identifient à elles ; entraîner ou provoquer une confrontation entre les religions, les confréries ou les communautés », pouvait-on lire dans un communiqué du CNRA du 30 mars 2022. Le Conseil de Régulation incitaitdonc les médias audiovisuels à avoir un sens de la responsabilité afin de respecter les recommandations données : « Le CNRA compte sur le sens des responsabilités de chacun. Les médias sont appelés à accorder une grande attention et un soin particulier aux contenus des programmes à diffuser à l’antenne durant le Ramadan ».
Pour des émissions de qualité pour contribuer à l’éveil des masses
Le premier et le plus évident des avantages de la télévision est qu’elle est une source de divertissement. Avec un large choix de chaînes, la télévision garantit que tout le monde soit satisfait. La télévision, comme outil de communication ou comme tout autre média, doit jouer un rôle primordial qui est d’informer, d’éduquer et de distraire le grand public. La distraction et la quête de la plus grande audience à tout prix ne doivent pas pousser les chefs de programmes dans nos télés à offrir au public des émissions bas de gamme pour les abrutir. Au lieu d’avoir des émissions où on ne fait que polémiquer avec des acteurs politiques, on pourrait avec des émissions qui traitent des difficultés économiques du pays avec de grands économistes ou des capitaines d’industries. Mettre en valeur des hommes de qualité ayant créé de grandes entreprises pourrait faire naitre des vocations auprès de notre jeunesse. Des professeurs d’économies pourraient également venir sur les plateaux pour nous parler des problèmes de notre pays au niveau macroéconomique. On pourrait également avoir des anciens ambassadeurs pour revenir sur l’actualité nationale et internationale, expliquer les rapports de force entre les grandes nations, la posture à avoir pour les petites nations, l’échiquier politique mondial. On pourrait avoir également des programmes éducatifs pour la jeunesse qui allient éducation et divertissement. Nos plateaux télé pourraient être des lieux de débats constructifs entre philosophes émérites et grands sociologues pour discuter des maux de notre société. Tout cela et de l’ordre du faisable. Il suffit d’avoir des directeurs de programmes qui veuillent s’intéresser aux grands défis de notre pays pauvre et endetté et non à promouvoir la médiocrité pour juste faire de l’audience.
Mamadou DIALLO