mai 24, 2025
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Politique

Que retenir de la visite de Donald Trump dans les monarchies pétrolières du Golfe ?

Le président Donald Trump a entamé le 12 mai dernier une succession de visite d’États dans les pays du Golfe. Si l’on veut être réducteur, il s’agit de la tournée d’un représentant de commerce auprès de clients empressés de lui complaire. Par certains côtés cela fait penser au personnage de señor Oliveira dans Tintin. 

Si cette visite n’est pas une première, elle marque un tournant dans les relations internationales. Donald Trump s’était déjà rendu en Arabie saoudite en 2017 pour sa première visite officielle lors de son premier mandat, mais il est vrai que nous étions dans une autre ère.  Le monde a profondément changé pendant ces huit ans qui sépare les deux visites. La seule constante est que les pays du Golfe ont toujours préféré les présidents américains républicains aux démocrates. À l’époque, les démocrates étaient réputés proches d’Israël et la question palestinienne occupait les esprits.

Plus près de nous, le contraste est frappant entre la visite de Joe Biden en juillet 2022 et la poignée de main glaciale échangée avec le prince héritier Mohamed Ben Salman et la récente visite de Donald Trump accueilli triomphalement et avec une multiplication de signes d’amitié entre les États-Unis et les pays de la région.

Quelles seront les retombées économiques de cette visite ?

Les échanges économiques entre les pays du Golfe et les États-Unis représentent annuellement 120 milliards de dollars. Les résultats économiques de cette visite sont indiscutables. Donald Trump est rentré à Washington avec des promesses d’investissements qui se chiffrent en trillions (1,3 pour le Qatar et 1,4 pour les Émirats arabes unis) pour les dix ans à venir. Les Saoudiens se contentent d’une modeste enveloppe de 600 milliards de dollars. Les domaines d’investissements sont variés mais se concentrent sur l’intelligence artificielle (IA), les industries de défense, l’espace, les énergies et l’immobilier. Les trois pays visités ont adopté des stratégies pour se placer dans une perspective d’après pétrole. L’ambition affichée de l’Arabie saoudite est de faire partie des douze plus grandes économies dans le monde.

L’omniprésence de la question sécuritaire

Au cours de la visite de Donald Trump, l’Arabie saoudite a signé des accords avec 12 entreprises américaines pour l’achat de matériel militaire pour un montant de 142 milliards de dollars avec des promesses d’implantation d’usines de fabrication et d’assemblage de chasseurs. En vertu de cet accord, Boeing construira une base industrielle en Arabie saoudite qui prévoit la construction, la maintenance, le transfert de technologies et la formation pour la construction d’appareils de combat F15EX.

Comme d’habitude, la compétition entre les pays du Golfe s’est faite dans la surenchère dans les annonces d’investissements aux États-Unis. Les Émirats arabes unis sont parmi les premiers investisseurs dans le pays. Ils disposeraient d’un portefeuille de mille milliards de dollars dans les domaines de l’aviation et l’espace, l’IA, l’énergie et l’immobilier.

Cette visite aura aussi été marquée par un mélange des genres entre intérêts privés de la famille Trump dans l’immobilier avec l’annonce de la construction de plusieurs tours gigantesques dans la région. Par ailleurs, l’acceptation d’un avion présidentiel somptueux d’une valeur de 400 millions de dollars offerts par le Qatar a suscité de vives réactions jusque dans les rangs des républicains.

L’avionneur Boeing qui était en mauvaise posture aura été un des grands bénéficiaires de ce déplacement. Le Qatar en délicatesse avec Airbus a annoncé un contrat d’une valeur de 200 milliards de dollars pour l’achat d’une centaine d’appareils 777 et 787 dotés de réacteurs GE-Aerospace. Doha entend également de doter de drones de moyenne altitude MQ9 Reaper.

Le renforcement de la coopération sécuritaire avec le Qatar prévoit par ailleurs des investissements importants (10 milliards de dollars) pour la base d’Al-Udeid qui abrite une très importante présence militaire états-unienne.

Vers un engagement politique états-unien dans la région ?

Outre l’aspect économique, cette visite visait aussi à rassurer les pays du Golfe sur l’engagement états-unien dans la région et à renforcer les partenariats stratégiques déjà en place ainsi que les capacités de défense en leur fournissant des systèmes avancés.

Le résultat politique le plus important à mettre au crédit de l’Arabie saoudite aura été d’imposer une rencontre entre Ahmad Al-Charaa, le président intérimaire syrien, et Donald Trump mais aussi la levée des sanctions états-uniennes à l’encontre de Damas. C’est le signe que la diplomatie du Golfe est entrée dans une ère transactionnelle qui repose sur le donnant-donnant. Par ailleurs, le président turc Erdoğan (co-parrain du nouveau régime syrien) était présent en visioconférence lors de cette rencontre.

Sur d’autres aspects, la négociation avec l’Iran a été abordée. Les pays du Golfe suivent avec un grand intérêt l’évolution des discussions. Ils souhaitent un accord qui éloignerait la menace nucléaire iranienne dans la région et affaiblirait son influence pour éviter le retour du Hezbollah au Liban et en Syrie. Concernant Gaza, les pays du Golfe ont fait part de leur préoccupation sur la situation humanitaire dans la bande sans remettre en cause les accords avec Israël. Le fait que Donald Trump ne se soit pas rendu en Israël dans la foulée de sa visite au Moyen-Orient est interprété comme un signe de mauvaise humeur vis-à-vis de Benjamin Netanyahou.

Au cours de cette visite le président Trump a réussi à engranger de grands succès. Il a aussi confirmé le poids de ces trois États de la région devenus incontournables par certains aspects sur la scène internationale et dont l’influence s’étend désormais bien au-delà de leur périmètre régional.

 

Par Jean-Paul Ghoneim

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