avril 16, 2025
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RAPPORT SUR LE KUSH : La nouvelle drogue qui fait des ravages en Afrique de l’Ouest

L’Initiative mondiale contre la criminalité organisée transnationale (GI-TOC) et l’Institut néerlandais des relations internationales « Clingendael » ont publié un rapport sur la consommation du « kush » en Afrique de l’Ouest. Selon les deux organisations, le kush est une drogue qui a probablement mené au décès des milliers de personnes en Afrique de l’Ouest, avec la Sierra Leone comme épicentre.  Et l’analyse chimique du kush a révélé que plus de 50 % des échantillons contiennent des nitazènes, un opioïde synthétique très addictif et mortel, comparable au fentanyl, tandis que l’autre moitié contient des cannabinoïdes synthétiques, ont-elles indiqué dans leur rapport intitulé « Kush en Sierra Leone : Le défi croissant des drogues synthétiques en Afrique de l’Ouest ». Ainsi, la jeunesse sénégalaise est aussi exposée face à cette drogue qui fait des ravages en Afrique de l’Ouest.

GI-TOC et Clingendael soulignent que certaines de ces substances sont importées de Chine, des Pays-Bas et très probablement du Royaume-Uni par voie maritime, aérienne ou postale. On ne sait pas si les ingrédients du kush exportés des pays européens comprennent des nitazènes ou seulement des cannabinoïdes synthétiques.

Lesdites organisations estiment que le marché criminel du kush était autrefois plus fortement contrôlé par des groupes importants, mais il est de plus en plus fragmenté, avec des acteurs plus petits qui mettent en place leurs propres opérations.  

Les organisations ont fait savoir qu’une action coordonnée urgente est nécessaire sur trois fronts : améliorer la surveillance, l’alerte précoce, les tests et l’échange d’informations en Afrique de l’Ouest ; perturber les chaînes d’approvisionnement de la Chine, des Pays-Bas et du Royaume-Uni, ainsi que les points d’entrée en Sierra Leone ; et atténuer les effets néfastes de la consommation de kush.

Selon GI-TOC et Clingendael, depuis 2022, une drogue de synthèse connue sous le nom de « kush » a probablement mené au décès de milliers de personnes en Afrique de l’Ouest. Apparue en Sierra Leone, elle s’est rapidement répandue dans les pays de la sous-région, notamment au Liberia, en Guinée, en Gambie, en Guinée-Bissau et au Sénégal, avec des effets dévastateurs. En avril 2024, les effets sur la santé du kush, qui contient des nitazènes (opioïdes pouvant être encore plus puissants que le fentanyl) et des cannabinoïdes synthétiques, étaient si graves que les présidents de la Sierra Leone et du Liberia ont déclaré des urgences nationales concernant la consommation de drogues – une mesure sans précédent.

« Pourtant, malgré les nombreuses spéculations, un certain nombre de questions essentielles sont restées sans réponse à propos de cette drogue. Qu’est-ce que le kush ? D’où vient-elle ? Qui la produit et en fait le trafic ? Et que peut-on faire pour réduire la nocivité de cette drogue ? », se sont interrogées les deux organisations qui ont abordé ces questions dans un nouveau rapport.

« Dans le cadre de notre travail en Afrique de l’Ouest, nous n’avons cessé d’entendre parler du kush, mais il y avait beaucoup de rumeurs et de mythes, et très peu de faits probants », explique Lucia Bird, directrice de l’Observatoire des économies illicites en Afrique de l’Ouest de GI-TOC. « Sans ces données, il était impossible d’élaborer une réponse efficace », a-t-elle ajouté.  

A noter aussi que dans le cadre de cette recherche, les analyses chimiques du kush, en coopération avec les autorités nationales de la Sierra Leone et de la Guinée-Bissau, ont permis de détecter des nitazènes – des opioïdes synthétiques puissants et souvent mortels liés à des overdoses en Europe et aux États-Unis – et des cannabinoïdes synthétiques. Les recherches sur les chaînes d’approvisionnement et les itinéraires de trafic ont révélé que certaines de ces substances sont importées par voie maritime et par des services de courrier postal depuis la Chine, les Pays-Bas et, très probablement, le Royaume-Uni. « Ces trois pays ont une part de responsabilité dans la crise du kush et dans les dommages causés à la population de la Sierra Leone et, plus généralement, de l’Afrique de l’Ouest », a déclaré le Dr Kars de Bruijne, responsable du programme Afrique de l’Ouest et Sahel à l’Institut Clingendael.

En outre, le rapport explique en détail comment les principaux acteurs du marché du kush ont développé leurs activités depuis 2019. Aujourd’hui, le marché est de plus en plus décentralisé, avec un nombre croissant de propriétaires de lieux de consommation, de locks (intermédiaires entre les propriétaires et le reste du marché), d’importateurs, de cooks(qui mélangent les composants de la kush pour créer la drogue prête à être vendue au détail), de distributeurs et de détaillants. Ils jouent tous des rôles distincts et ont des marges bénéficiaires en fonction de leur rôle sur le marché. Les réseaux, grands et petits, s’appuient sur un système de protection fortement localisé, mais certains semblent avoir également infiltré des acteurs intégrés à l’État.

Le kush représente un tournant dans l’évolution de la menace que représente la drogue pour l’Afrique de l’Ouest. L’ampleur actuelle du marché du kush, la rapidité avec laquelle il s’est développé en Sierra Leone et au-delà, et son impact sur la santé publique sont sans précédent. Les résultats de la recherche mettent en évidence le problème plus large des drogues synthétiques en Afrique de l’Ouest. « L’afflux de drogues synthétiques bon marché, addictives et très nocives dans une région où les systèmes de santé sont mal préparés et où la population est très jeune est un signe clair de l’émergence d’un problème de drogue durable dans la région », a averti Bird.  

Enfin, pour contrer cette dangereuse tendance, le rapport appelle à une action coordonnée urgente tout au long de la chaîne d’approvisionnement et formule des recommandations dans trois domaines. Premièrement, il préconise la mise en place d’une réponse fondée sur des données probantes en renforçant la surveillance, l’alerte précoce, les tests et le partage d’informations dans toute l’Afrique de l’Ouest. Deuxièmement, il recommande de perturber les chaînes d’approvisionnement dans les pays sources (en particulier la Chine, les Pays-Bas et le Royaume-Uni) et de renforcer la surveillance des points d’entrée tels que les ports maritimes, les aéroports internationaux et les services postaux. Troisièmement, le rapport souligne la nécessité d’atténuer les effets néfastes de la consommation de kush, notamment par la prévention et l’éducation du public, ainsi que par un meilleur accès aux programmes de traitement et de soutien, ainsi qu’aux médicaments permettant d’inverser les surdoses d’opioïdes.      

Recommandations des organisations

« Bien que les réponses soient compliquées par la nature fragmentée du marché du kush, la nécessité d’une action coordonnée s’impose d’urgence. La présente recherche distingue trois piliers pour une réponse efficace, nécessitant une action en Sierra Leone, dans toute l’Afrique de l’Ouest au sens large et tout au long de la chaîne d’approvisionnement en kush » estiment GI-TOC et Clingendael qui ont émis les recommandations suivantes :

Élaborer une réponse fondée sur des données probantes. Le kush est l’une des nombreuses drogues synthétiques qui pénètreraient les marchés de détail de l’Afrique de l’Ouest. Une réponse régionale s’impose pour :

améliorer le système d’alerte précoce, la surveillance et l’échange d’informations à travers l’Afrique de l’Ouest ;

améliorer le partage d’informations régionales et internationales sur les composés de drogues de synthèse afin que les enseignements à retenir, les solutions et les évolutions futures puissent être identifiés, et qu’une action préventive soit étayée ; renforcer les capacités de l’Afrique de l’Ouest à identifier, classer, saisir et contrôler les substances synthétiques, notamment par la fourniture d’équipements et le renforcement des capacités ;

améliorer la base de données sur les substances disponibles sur les marchés de la drogue, conformément aux priorités régionales, grâce à la recherche, afin de compléter le renforcement à moyen terme des mécanismes de contrôle gouvernementaux.

Pour interrompre la chaîne d’approvisionnement, il faut agir d’un bout à l’autre de la chaîne. La perturbation de la chaîne d’approvisionnement en kush de la Sierra Leone nécessite une réponse internationale de grande envergure pour agir sans délai. Les principaux aspects de cette réponse devraient viser :

le renforcement de la surveillance des exportations maritimes par les États européens, en particulier des points d’origine identifiés, y compris, semblerait-il, le Royaume-Uni et les Pays-Bas ;

le renforcement de l’application du principe du pays d’origine pour les exportations de produits manufacturés et de courrier postal, en particulier en Chine ;

le renforcement de l’action du secteur privé contre les exportations de courrier postal qui ont été identifiées comme des mécanismes de transport clés pour le kush et d’autres drogues synthétiques ;

un contrôle renforcé aux points d’entrée, à savoir le port maritime et l’aéroport international, par le gouvernement de la Sierra Leone ;

une mise à jour de la législation dans les pays d’Afrique de l’Ouest pour étayer les réponses des services répressifs aux drogues de synthèse ;

la priorité donnée à la lutte contre le kush par rapport à d’autres intérêts, notamment politiques.

Atténuer les effets néfastes de la consommation de kush. Compte tenu des difficultés attendues pour lutter durablement contre la consommation de kush, l’un des principaux piliers de la réponse devrait comprendre des efforts visant à atténuer les dommages liés à cette consommation. Cela implique notamment :

une plus grande disponibilité et un meilleur accès aux programmes de traitement et de soutien, y compris une meilleure accessibilité à la substitution des opiacés ;

une amélioration de l’accès à la naloxone, qui permet d’inverser les surdoses d’opioïdes ;

l’adaptation de la législation en vue d’établir des alternatives à l’incarcération pour les PWUD afin d’aligner la loi sur la pratique et de protéger cette catégorie de la population ;

renforcer la formation et l’éducation des professionnels qui suivent les personnes qui consomment

des drogues afin de mieux répondre à la demande de services.

Awa BA

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