Les chiffres issus d’études récentes sur la question prouvent que l’autonomisation des femmes est encore loin d’être une réalité en Afrique et au Sénégal en particulier. Les traditions et les normes socio-culturelles en particulier affectent la participation des femmes au marché du travail et expliquent en partie la discrimination sexiste dont elles sont l’objet. Le travail domestique et de soins non rémunérés est par exemple un facteur non négligeable qui empêche la femme d’accéder à une activité génératrice de revenus. C’est pour cette raison qu’un colloque aura lieu les 26 et 27 octobre à Dakar afin de permettre aux différents acteurs d’échanger leurs connaissances afin de trouver de potentielles solutions à la problématique.
Le temps consacré par les femmes aux tâches domestiques et aux soins est considéré comme l’une des contraintes les plus importantes auxquelles les femmes sont confrontées pour gérer leur entreprise ou progresser dans leur carrière professionnelle en tant que salariées.
Selon les chiffres issus des études, la femme en général accomplit trois fois plus de soins et de travaux domestiques non rémunérés que les hommes. Ce qui signifie que les femmes sont moins aptes à accéder à une activité génératrice de revenus, à échapper à la pauvreté, à être financièrement indépendantes et à épargner, à accumuler des actifs ou des revenus de retraite. Dans le monde, 606 millions de femmes en âge de travailler se déclaraient n’être pas disponibles pour occuper ou chercher un emploi, du fait de leurs activités de soins non rémunérées, alors que les hommes n’étaient que 41 millions dans ce cas (OIT 2020).
Pour le cas spécifique du Sénégal, les femmes consacrent en moyenne à 3,7 heures par jour aux tâches domestiques, contre 27 minutes par jour pour les hommes. En ce qui concerne le temps accordé aux soins et garde des enfants, il est neuf fois plus important chez les femmes (27 minutes) que chez les hommes (3 minutes).
Les chercheurs indiquent que les soins non rémunérés restent invisibles, sous-évalués et négligés dans l’élaboration des politiques économiques et sociales, et sa répartition est très déséquilibrée.
En milieu rural, les femmes travaillent dans l’agriculture tout en étant responsables du ménage, et sont souvent obligées de travailler dans les champs tout en portant leurs enfants en raison des options limitées en matière de services de garde d’enfants au niveau local. Le manque d’accès aux infrastructures sociales de base et aux technologies domestiques augmente le temps consacré aux activités de soins non rémunérées.
Le travail de soins non rémunérés : un impact très négatif sur la vie de la femme en général
Selon ces études sur la question le travail de soins non rémunérés a un impact très négatif sur le cycle de vie des femmes et des jeunes filles. Pour cause, il réduit la formation préalable à l’exercice d’un travail rémunéré par une diminution de l’éducation ou du développement des compétences, limite la participation (entrée, réintégration, qualité des possibilités de travail) à la main-d’œuvre, en particulier pour les mères. Ce travail non rémunéré dont la femme est l’auteure, réduit a rémunération salariale en raison de l’acceptation d’emplois de moindre qualité et handicape la progression dans la carrière rémunérée de leurs choix ainsi que leurs chances d’accéder à des postes de direction. Il réduit également le pouvoir des femmes, en limitant leur représentation et leur pouvoir de décision au sein du foyer, de la vie communautaire et au-delà.
Les initiateurs du colloque trouvent alors opportun de faire du travail de soins et des travaux domestiques non rémunérés une question de politique publique.
C’est dans ce cadre qu’un forum multi acteurs sur l’autonomisation économique des femmes en Afrique de l’Ouest nommé FAUEFAO a été initié pour permettre aux décideurs, aux praticiens et aux chercheurs de partager leur expérience. Un cadre qui vise à favoriser un espace permanent d’échanges, de partage des connaissances et d’expériences à grande échelle et de développer des synergies autour des actions entreprises par diverses parties prenantes pour l’autonomisation économique des femmes en Afrique de l’Ouest.
Renforcement de capacité des journalistes afin de mieux les outiller
Dans cette perspective un colloque international sur l’autonomisation économique des femmes en Afrique de l’Ouest, est conjointement organisé les 26 et 27 octobre 2022 à Dakar par le Consortium pour la Recherche Economique et Sociale (CRES) et le Centre de Recherche pour le Développement International (CRDI) en partenariat avec le Ministère de la Femme, de la Famille, du Genre et de la Protection des Enfants du Sénégal.
Et en prélude au colloque, le Consortium pour la Recherche Economique et Sociale (CRES) et ses partenaires ont organisé un atelier de renforcement de capacités destiné aux journalistes. L’objectif de l’atelier est de mieux outiller la presse sur les questions touchant à l’autonomisation économique des femmes en vue de mieux restituer les discussions des travaux du forum et de sensibiliser les décideurs.
Yaye Moussou TRAORE