De nombreux Africains interrogés par la DW espèrent une position de Berlin dans la continuité en matière d’immigration à la suite des dernières élections.
En Allemagne, après les législatives anticipées du 23 février dernier, l’heure est désormais au jeu des alliances pour tenter de former un gouvernement. En Afrique, ce processus électoral est suivi de près alors que l’immigration est devenue un thème majeur de la campagne. Beaucoup craignaient qu’une victoire de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), parti d’extrême droite, ne conduise à des expulsions massives.
Friedrich Merz, qui devrait devenir le prochain chancelier allemand après la victoire de son parti, a également adopté une position ferme sur l’immigration. Mais son profil semble être plus rassurant en Afrique.
Malgré des visions économiques opposées, le chef de file de l’alliance chrétienne-démocrate conservatrice CDU/CSU, s’est dit déterminé à former rapidement une coalition avec les sociaux-démocrates (SPD).
CDU/CSU est le nom donné à l’union politique formée en Allemagne sur le plan fédéral par les deux « partis-frères » de la droite démocrate-chrétienne et conservatrice, l’Union chrétienne-démocrate d’Allemagne CDU, présente dans tous les Länder sauf en Bavière, et l’Union chrétienne-sociale en Bavière CSU, présente pour sa part seulement en Bavière.
Une initiative pour informer et orienter
Friedrich Merz a promis de renforcer les frontières de l’Allemagne et d’appliquer des politiques migratoires plus strictes à la suite d’une attaque au couteau qui a fait deux morts dans la ville d’Aschaffenburg, en janvier dernier… Bien avant la victoire de son parti aux législatives, Friedrich Merz a présenté un plan en cinq points pour freiner l’immigration clandestine, un thème cher à un autre parti, l’Alternative pour l’Allemagne, l’AfD.
La montée en puissance de ce parti d’extrême droite, qui a récolté 20,8 % des voix, son meilleur résultat à ce jour au niveau fédéral, a inquiété en Afrique. Mais pour des analystes comme Oluwole Ojewale, le résultat des élections est plutôt un soulagement.
Selon lui « dans une mesure raisonnable, les élections ont mis un terme à la montée des partis populistes, des partis d’extrême droite… « .
Au sujet de l’immigration, l’Allemagne a lancé une initiative visant à encourager des migrants ghanéens en situation irrégulière à rentrer chez eux. Le Centre de conseil, qui a commencé à fonctionner en 2017, a aidé ainsi plus de 5.000 migrants ghanéens à retourner dans leur pays d’origine.
Mais l’initiative, tant au Ghana qu’au Nigeria, a également offert des conseils aux travailleurs qualifiés pour qu’ils émigrent vers l’Allemagne. Les récentes réformes de la loi sur l’immigration du gouvernement allemand visaient à faciliter la migration de certains travailleurs africains qualifiés vers l’Allemagne.
Les migrants irréguliers dans le viseur
Samuel Ackom qui réside à Accra, prévoit ainsi de se rendre en Allemagne pour travailler. Il craignait que les opportunités deviennent plus minces en raison des tensions politiques.
« J’ai noté des déclarations appuyées…. En matière d’immigration, l’Allemagne va geler de facto l’immigration, ce qui va certainement affecter les Africains qui souhaitent se rendre en Allemagne », explique-t-il à la DW.
En dépit des positions fermes de Friedrich Merz sur le renforcement des frontières allemandes, certains experts, comme Oluwole Ojewale, estiment qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter car cette mesure, comme dans d’autres pays, vise les immigrés irréguliers. Selon lui, l’Allemagne restera ouverte aux affaires et à la collaboration avec les pays africains, même si la nouvelle orientation du futur gouvernement allemand pourrait obliger de nombreux Africains à chercher de nouvelles destinations en Europe.
« Reconnaître les contributions des migrants »
Pour Dengiyefa Angalapu, analyste au Centre pour la démocratie et le développement, l’Afrique doit renforcer ses liens diplomatiques et engager un dialogue sur les questions de migrations et de commerce. Les Africains doivent également veiller à ce que leurs intérêts « soient clairement représentés ».
« Nous avons une nouvelle administration au sein de l’Union africaine, et je pense qu’elle devrait faire pression, plaider en faveur de politiques migratoires plus équitables » assure l’expert qui insiste également sur le fait qu’il est important de « reconnaître les contributions des migrants » et « insister sur le fait que les migrants africains ne sont pas seulement un fardeau pour les communautés » mais qu’ils « contribuent grandement au développement de leurs communautés d’accueil ».
Berlin entretient des liens avec l’Afrique, visant à stimuler l’économie du continent, à fournir une assistance en matière de sécurité et à promouvoir la bonne gouvernance. L’agence allemande de développement GIZ poursuit des centaines de projets sur le continent et rien n’indique, pour l’instant, que le futur gouvernement allemand puisse remettre ces initiatives en question. DW
