mars 26, 2025
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Economie

LE RENSEIGNEMENT D’AFFAIRES : Un levier « stratégique incontournable et un enjeu de gouvernance »

Le Laboratoire des gouvernances, « Synopia » a effectué une étude sur le renseignement des affaires. Selon la note publiée au mois de février 2025, dans un monde où l’information est omniprésente, maîtriser l’art du renseignement d’affaires est devenu une nécessité pour toutes les organisations, qu’elles évoluent dans des secteurs hautement concurrentiels ou non. Pourtant, estime la note, en France, cette discipline reste perçue avec une certaine méfiance, associée à des pratiques d’espionnage ou de manipulation. Toujours selon l’étude, cette perception contraste avec son rôle stratégique essentiel : il ne s’agit pas de surveillance intrusive ou de pratiques louches, mais d’un moyen essentiel pour anticiper, protéger et innover. Il se situe au cœur de l’intelligence stratégique de l’organisation, affirme Synopia.

QU’EST-CE QUE LE RENSEIGNEMENT D’AFFAIRES ?

A ce titre, la note d’étude de Synopia souligne que le renseignement d’affaires, parfois confondu avec l’intelligence économique, repose sur une approche proactive de la collecte et de l’analyse d’informations stratégiques. Il convient de différencier l’information du renseignement : l’information – ou donnée – est un élément de connaissance accessible et diffusé largement. En revanche, le renseignement est une information ciblée, obtenue par des moyens spécifiques (espionnage, veille stratégique, enquête, etc.), et exploitée dans un cadre décisionnel. Il implique une recherche active, une analyse approfondie et, dans certains cas, un degré de confidentialité élevé. Il ne se limite pas à la concurrence puisqu’il englobe également la gestion des risques, la réputation, les évolutions réglementaires et les opportunités du marché.

Le renseignement est un processus qui transforme l’information en pouvoir ou en valeur,  en opportunité ou en identification de menaces pour la partie qui la détient. Il donne un avantage stratégique, il met en position de force.

Comme l’exprime Winston Churchill : « Qui détient l’information détient le pouvoir. »

L’ÉVOLUTION DU RENSEIGNEMENT D’AFFAIRES : D’UN DOMAINE DE NICHE À UNE NÉCESSITÉ POUR TOUS

Si l’on se fie à la note de Synopia, historiquement, le renseignement d’affaires était réservé aux secteurs où l’accès à l’information constituait un avantage concurrentiel majeur : la défense, l’aéronautique, la finance et les technologies. Cependant, plusieurs évolutions ont conduit à une généralisation de ces pratiques :

  • Explosion de la donnée et du numérique : la multiplication des sources d’information accessibles via Internet et les réseaux sociaux rend la veille stratégique indispensable.
  • Irruption de l’intelligence artificielle : l’IA accélère le traitement des informations, permettant des analyses plus rapides et précises.
  • Diversification des risques : cybersécurité, réputation en ligne, évolutions réglementaires et crises géopolitiques sont devenues des enjeux transversaux. Dernier exemple en date :  le décret signé par Donald Trump qui accorde un « permis de corrompre » aux entreprises américaines lorsqu’elles interviennent à l’étranger.
  • Internationalisation des échanges : la mondialisation impose une vigilance accrue sur les opportunités et les menaces externes.

Ainsi, le renseignement d’affaires n’est plus une option réservée aux grandes entreprises, mais une nécessité pour toute organisation soucieuse de son avenir.

Il intervient dans divers cas concrets : anticiper un risque dans une transaction, mieux négocier en connaissant les faiblesses de la partie adverse, obtenir un avantage concurrentiel déterminant dans le cadre d’un appel d’offre, sécuriser un investissement ou un recrutement, protéger le patrimoine matériel et immatériel de l’entreprise, ou encore surveiller la réputation de l’entreprise et de ses dirigeants. Pour le dire autrement, une fois que la mer s’est retirée, que reste-t-il sur la plage ? C’est à cela que sert le renseignement d’affaires : donner une information précise pour éviter de faire confiance à la seule intuition ou à la chance. Pour gagner une partie, il faut jouer avec toutes les règles du jeu et le renseignement en constitue une essentielle.

Le renseignement d’affaires peut être utilisé de façon offensive tout en restant dans la légalité, notamment pour mieux connaître un client, un partenaire, un investisseur ou un candidat. À l’inverse, il peut aussi être employé à des fins défensives pour protéger son entreprise contre les attaques, les enquêtes, la concurrence agressive, la presse ou des activistes mal intentionnés.

DÉFENSE ET PROTECTION : UN VOLET ESSENTIEL

L’étude fait savoir que le renseignement d’affaires ne sert donc pas uniquement à conquérir des marchés : il est aussi un outil défensif puissant. Il permet notamment de :

  • Sécuriser ses informations sensibles : identifier les failles de cybersécurité, prévenir les fuites de données (directes ou via des tiers) et protéger son patrimoine immatériel.
  • Anticiper les attaques concurrentielles : une entreprise peut être victime de désinformation, de déstabilisation médiatique ou de manœuvres déloyales.
  • Se prémunir contre les risques humains : le renseignement permet d’évaluer et d’anticiper les risques liés aux relations d’affaires, mais ces risques sont de différentes natures. Dans le cadre du recrutement, il aide à vérifier les antécédents et la fiabilité des candidats pour éviter des « erreurs de casting ». Dans les relations économiques, il permet d’analyser la solvabilité des partenaires, de comprendre les intentions réelles des investisseurs et de détecter d’éventuelles fragilités ou risques cachés. En ce sens, il constitue un outil essentiel pour minimiser les incertitudes et renforcer la sécurité des décisions stratégiques.

 UNE ÉTHIQUE NÉCESSAIRE DANS UN MONDE ASYMETRIQUE

L’un des enjeux majeurs du renseignement d’affaires réside dans son cadre éthique. En Europe, la législation impose un respect strict de la vie privée et de la protection des données (RGPD, loi sur le secret des affaires). Les entreprises doivent veiller à :

  • Ne pas franchir la ligne entre veille stratégique et espionnage industriel.
  • Ne pas manipuler l’information à des fins trompeuses.
  • Respecter la vie privée
  • Respecter la légalité des méthodes de collecte et d’exploitation des données.

Toutefois, cette rigueur peut constituer un frein face à des concurrents internationaux moins contraints. Pour rééquilibrer ces asymétries, plusieurs stratégies sont envisageables :

  • Renforcer l’intelligence économique pour anticiper les menaces et saisir les opportunités du marché.
  • Développer un soft power efficace, en mettant en avant la transparence, la conformité aux normes internationales et la responsabilité sociétale, afin d’attirer investisseurs et partenaires de confiance.
  • Nouer des alliances stratégiques pour mutualiser ressources et expertises en veille économique.
  • Exploiter les technologies avancées, notamment l’intelligence artificielle et le big data, pour optimiser l’analyse des risques.
  • Renforcer la communication institutionnelle pour asseoir une image de marque crédible et influencer les décisions réglementaires internationales.
  • Enfin, l’amélioration des dispositifs internes de cybersécurité, avec la formation continue des équipes à ces enjeux, et de veille concurrentielle permet de mieux protéger les informations sensibles et d’anticiper les attaques informationnelles.

Il n’en reste pas moins qu’il faudra peut-être que l’Union européenne s’interroge, en particulier face aux pratiques très agressives qui risquent de se développer, par exemple avec les États-Unis si le décret de Donald Trump sur le « permis de corrompre » n’est pas remis en cause par la justice américaine.  Le président Emmanuel Macron semble poser la question : lors du dernier sommet de l’OTAN  à Budapest, il a déclaré : « Pour moi, c’est simple, le monde est fait d’herbivores et de carnivores.  Si on décide de rester des herbivores, les carnivores gagneront et nous serons un marché pour eux. ».

Appliqué au monde des affaires, ce constat nous conduira peut-être à accepter d’introduire une certaine dose de pratiques offensives dans l’usage du renseignement d’affaires pour mieux équilibrer les rapports de force.

ENJEUX ET METHODES DU RENSEIGNEMENT D’AFFAIRES

Selon Synopia, les entreprises disposent de plusieurs leviers pour structurer leur démarche de renseignement :

  • Renseignement technique : Internet, réseaux sociaux, presse, bases de données ouvertes (OSINT), salons professionnels, conférences, etc.
  • Renseignement humain : réseaux, lobbying, enquêtes de terrain, visites de site, intelligence relationnelle, etc.
  • Méthodologie : analyse, croisement des sources, validation de la fiabilité des informations, exploitation pertinente des données recueillies.
  • Gouvernance : cette démarche doit être impulsée et suivie par la direction générale pour être efficace et alignée avec les objectifs stratégiques de l’entreprise. A titre de comparaison, dans le domaine public, les questions touchant au renseignement sont si essentielles que sont les agences spécialisées rapportent directement au chef de l’État.

En conclusion, Synopia souligne que le renseignement d’affaires est un levier intournable pour l’avenir. Il est aujourd’hui un outil stratégique incontournable. Il ne se limite plus aux entreprises en concurrence directe, mais concerne tous les secteurs d’activité. Se protéger, anticiper, influencer : telles sont les nouvelles règles du jeu économique.

Dans un monde où l’information est une arme, le renseignement d’affaires permet de ne pas subir les événements, mais de les maîtriser. Son rôle ne cesse d’évoluer, s’adaptant aux transformations numériques et aux nouvelles menaces économiques. À l’avenir, son importance ne fera que croître, notamment avec l’essor de l’intelligence artificielle et des mégadonnées qui rendront les analyses toujours plus précises. Les entreprises devront intégrer cette discipline dans leur stratégie globale pour rester compétitives et sécuriser leur croissance dans un environnement toujours plus incertain. Plus qu’un avantage, c’est une condition de survie et de prospérité. Le renseignement d’affaire constitue donc un enjeu de gouvernance essentiel pour les entreprises, dans un contexte de guerre économique et commerciale de plus en plus prononcée.

Synthèse de A. BA

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