septembre 17, 2025
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Economie

Le Soudan du Sud, galop d’essai de Washington en matière d’opérations de paix ?

Malgré le renouvellement du mandat de l’ONU, il faut s’inquiéter d’un retrait américain des opérations de maintien de la paix.

Le Conseil de sécurité des Nations unies (CSNU) a renouvelé le mandat de la Mission des Nations unies au Soudan du Sud (MINUSS) le 8 mai, prolongeant d’un an les opérations de maintien de la paix.

Ce renouvellement a soulevé d’importantes questions quant à l’avenir de la politique américaine à l’égard de la MINUSS et des opérations de paix des Nations unies. Les États-Unis ont joué un rôle crucial dans les opérations de paix de l’ONU ces dernières décennies, en particulier au Soudan du Sud.

La MINUSS a été créée en 2011 pour aider le Soudan du Sud, le plus jeune État membre de l’ONU, à se construire et à résoudre les conflits. Le mandat de la mission, qui consistait à consolider la paix et les capacités de l’État, a été réorienté vers la protection des civils après la guerre de 2013.

Lorsque les parties belligérantes ont signé l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud (R-ARCSS) en 2018, la MINUSS devait appuyer la mise en œuvre de l’accord de paix.

Le dernier mandat de la mission inclut la protection des civils, l’aide à la mise en œuvre du R-ARCSS et la surveillance des droits de l’homme.

Le champ d’action de la MINUSS souligne son importance et ses limites. La mission a joué un rôle essentiel dans la protection des civils et l’accès à l’aide humanitaire. Cependant, le manque de ressources et le non-respect répété de l’accord de paix par les parties soudanaises ont entravé son efficacité. Ces résultats mitigés ont alimenté les débats sur la nécessité de renouveler le mandat.

Depuis la création de la MINUSS, les États-Unis ont joué un rôle de premier plan dans la présentation des programmes et des projets de mandat de la mission au CSNU. Deux semaines avant l’expiration du mandat, le 30 avril, les États-Unis ont soumis un projet de résolution qui a suscité des désaccords entre les membres du Conseil, soulevant des questions sur la position des États-Unis concernant le rôle de la MINUSS.

Selon le Rapport du Conseil de sécurité, les principaux désaccords étaient de deux ordres. Premièrement, les États-Unis ont proposé d’exercer une pression politique sur les dirigeants du Soudan du Sud qui ont failli à la mise en œuvre des aspects clés de l’accord. Les États-Unis souhaitaient la poursuite de la mission dans un environnement favorable, mais la Russie et la Chine s’y sont opposées. Ces deux pays privilégiaient une approche plus mesurée et sans contrainte.

Deuxièmement, les États-Unis ont introduit de nouvelles terminologies. L’expression « violence sexuelle et sexiste » a été remplacée par « violence à l’égard des femmes et des filles ». Les termes relatifs à la désinformation ont été supprimés, et « changement climatique » a été remplacé par « changement environnemental » ou « catastrophes naturelles ». Ces changements reflètent la politique du second mandat de Donald Trump en matière de genre et de climat.

Plusieurs membres européens et africains du Conseil se sont opposés à ces modifications linguistiques, affirmant qu’elles transgressent la norme du Conseil de sécurité. Les États-Unis ont alors présenté un quatrième projet de résolution qui rétablit la plupart des termes et celui-ci a été adopté.

Pourquoi les États-Unis ont-ils voulu modifier la terminologie du CSNU, et cela reflète-t-il un changement majeur de politique des opérations de paix de l’ONU, que les États-Unis testaient concernant la MINUSS ?

Un analyste politique américain a déclaré à ISS Today : « Ces modifications reflètent les efforts de l’administration américaine pour conserver son influence dans la promotion de la paix au Soudan du Sud, tout en alignant la mission et l’ONU sur ses priorités politiques ».

Il a ajouté qu’il ne s’agissait pas d’un changement de politique en matière d’opérations de paix, mais plutôt « d’une tentative des États-Unis d’exercer une pression supplémentaire sur le gouvernement du [Soudan du Sud] … dans le cadre du mandat, ce qui reflète leur mécontentement face à l’absence de volonté politique des parties et du gouvernement de transition du Soudan du Sud ».

Les États-Unis ont « beaucoup investi pendant plus d’une décennie pour transformer le conflit, mais les résultats obtenus [étaient] insignifiants, voire inexistants », a-t-il déclaré.

La décision des États-Unis de retirer leur contingent de soldats de la paix de la MINUSS en avril, alors que son mandat était en cours de négociation, renforce ces points de vue. Ce contingent se composait d’officiers d’état-major chargés d’appuyer la planification, la logistique, les opérations et la coordination civilo-militaire. La raison officielle du retrait n’était pas claire. Certains analystes ont déclaré qu’il s’agissait d’assurer la sécurité des soldats de la paix, comme lors des départs précédents de missions de l’ONU.

En 2022, les États-Unis se sont retirés des mécanismes de suivi et d’évaluation du R-ACRSS, invoquant le non-respect par le pays des étapes de réforme. Celles-ci comprenaient l’ouverture de l’espace politique et l’amélioration de la gestion des finances publiques, de la sécurité et de la responsabilité.

D’autres développements indiquent également un changement de position des États-Unis sur les opérations de paix de l’ONU. En avril 2025, les États-Unis ont proposé de « supprimer le financement des opérations de maintien de la paix de l’ONU ». Lors de la réunion ministérielle organisée à cet effet par l’ONU à Berlin en mai, les États-Unis ne figuraient pas parmi les plus de 74 pays engagés à apporter leur contribution, notamment financière et logistique.

Le 29 août, un rapport de la Maison Blanche révélait que le président a préconisé une « annulation budgétaire » de 5 milliards de dollars américains prévus pour les organisations internationales et l’aide étrangère, dont environ 838 millions de dollars destinés aux opérations de paix.

La réduction du financement limite la capacité de l’ONU à protéger les civils dans les zones de conflit comme le Soudan du Sud. Les États-Unis ont longtemps été le principal donateur des missions de paix de l’ONU, fournissant jusqu’à 27 % du budget annuel de 5,6 milliards de dollars américains en 2024 et 2025. Depuis 2005, ils ont investi plus de 1,5 milliard de dollars pour aider 55 pays à se doter en personnel militaire des opérations de paix.

Un autre analyste a déclaré à ISS Today que la politique américaine à l’égard des opérations de paix de l’ONU était contradictoire, affirmant que : « Les États-Unis semblent s’éloigner du système multilatéral, y compris les opérations de paix, mais il n’est pas [certain] que Washington modifie sa politique en la matière, malgré les débats politiques en cours ».

La pertinence des opérations de paix de l’ONU est de plus en plus reconnue car il n’existe aucune alternative viable pour répondre à la demande croissante en matière de résolution des conflits.

L’ONU examine actuellement les différentes opérations de paix afin de s’assurer qu’elles sont adaptées au contexte des menaces. Les États-Unis ont donc l’occasion de réfléchir à leur politique de renforcement des missions de l’ONU sous une approche multilatérale. Des opérations telles que la MINUSS pourraient difficilement fonctionner sans le soutien financier et politique américain. Par Meressa K Dessu et

Ibrahim Sanda Barrie (Chercheurs à l’ISS Afrique)

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