mai 2, 2024
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Sécurité

Nigeria : les enlèvements de masse se multiplient

DÉCRYPTAGE. En quelques années, le kidnapping est devenu un vrai business, entretenu par les gangs et les islamistes entre motivations économiques et idéologiques.

Le raid contre l’école de Kuriga, dans l’Etat de Kaduna, dans le nord-ouest, fait suite à un autre enlèvement massif, dans le nord-est, la semaine dernière, avec plus de cent personnes toujours portées disparues. © Sunday Alamba/AP/SIPA

C’est un nouveau kidnapping de masse qui vient rappeler combien les enlèvements contre rançon constituent un fléau au Nigeria. Derniers faits en date : au moins 15 élèves d’une école islamique dans l’Etat de Sokoto au nord-ouest du vaste Nigeria ont été enlevés par des hommes armés, d’après plusieurs sources notamment locales, plus tôt cette semaine, jeudi, près de 280 enfants ont été kidnappés dans l’enceinte de leur établissement dans l’Etat de Kaduna, dans le nord-ouest du pays. Ces nouveaux rapts interviennent dans un contexte très critique pour le géant ouest-africain confronté à de graves problèmes d’insécurité, avec des gangs et des bandits qui sévissent sur les mêmes terrains que les djihadistes. Ils ont fait des enlèvements un business lucratif, qui alimente un vaste réseau de groupes criminels et islamistes. D’après la société spécialisée, SBM Intelligence, de juillet 2022 à juillet 2023, au moins 3 620 personnes ont été enlevées au Nigeria et les ravisseurs avaient réclamé pas moins de 5 milliards de nairas, soit 6,4 millions de dollars, de rançon.

Gunmen attacked a school in northwestern Nigeria and abducted hundreds of children as they were about to startclasses Thursday. (AP Graphic)/GFX1381/24067779662425//2403072300© Kevin S. Vineys/AP/SIPA / SIPA / Kevin S. Vineys/AP/SIPA

Depuis quelques années, les kidnappings de masse ciblant des écoles sont récurrents dans la région de Kaduna. Le problème est également récurrent dans l’est du Nigeria, notamment dans l’État de Borno, où plusieurs dizaines de femmes ont été enlevées, selon les autorités, dans la région de Ngala, une localité proche de la frontière camerounaise. Des femmes et des jeunes filles parties chercher du bois et qui ne seraient jamais revenues dans le camp de déplacés où elles vivent. La semaine dernière, des enfants ont également été kidnappés dans cette même région. Généralement, les familles sont bien souvent livrées à elles-mêmes lorsqu’il s’agit de négocier avec ces différents groupes pour payer les rançons qu’ils réclament.

 

Quel est le contexte sécuritaire ?

Si au début des années 2000, les ravisseurs ciblaient des travailleurs étrangers du secteur pétrolier dans la riche région pétrolière du delta du Niger, mais le phénomène s’est amplifié après l’apparition du groupe djihadiste BokoHaram dans le nord-est du Nigeria dès 2009.

Aujourd’hui, divers groupes sont impliqués dans ces enlèvements. Parmi lesquels les gangs armés, connus sous le nom de bandits, qui ont émergé dans le nord du Nigeria. Ces groupes ont évolué au cours des deux dernières décennies, passant de brigands itinérants souvent impliqués dans des vols de bétail et des raids locaux à des bandes organisées de criminels impliquées dans le trafic de drogue et d’armes. Ces groupes se livrent désormais à des enlèvements massifs de villageois et surtout d’écoliers contre rançon, mettant en danger l’avenir de millions d’enfants.

La région du nord, et en particulier le nord-est, est également en proie aux groupes armés issus de l’État islamique en Afrique de l’Ouest (ISWAP), rivaux de Boko Haram, tristement célèbre pour l’enlèvement de 276 écolières à Chibok en 2014. Ce groupe cible particulièrement les filles et les jeunes femmes, qui vivent souvent dans des internats ou des foyers universitaires.

Le pays est également pris dans le piège des violences extrémistes et les affrontements communautaires.

 

Quel est l’impact de la crise économique sur l’accélération des enlèvements ?

Les experts estiment que la crise économique qui sévit au Nigeria est bien à l’origine d’une augmentation du nombre des enlèvements. En effet, la plus grande économie d’Afrique de l’Ouest est dans une situation économique plus difficile que jamais. Depuis le Covid-19, puis la guerre russe en Ukraine, le pays a été plongé dans une spirale inflationniste et une crise monétaire aux conséquences considérables.

Nombre des rapts sont motivés par le désespoir économique et utilisés comme un moyen de gagner rapidement de l’argent. Pour les experts, les enlèvements sont devenus l’industrie la plus florissante du Nigeria. Les kidnappeurs demandent généralement de l’argent en guise de rançon, même si parfois ils exigent des denrées alimentaires, des motos et même parfois de l’essence, selon la presse locale, en échange de la libération des personnes enlevées. Les motos sont « un outil économique simple et moins exigeant pour de nombreux jeunes chômeurs du Nord et relativement faciles à utiliser pour des attaques terroristes », explique SBM Intelligence dans son rapport.

Dans de rares cas les enlèvements ont une motivation politique. Les analystes voient dans les enlèvements perpétrés, en particulier par Boko Haram, un moyen de montrer sa capacité de nuisance tant au gouvernement qu’à la population nigériane.

Que font les autorités ?

Dans les années 2000, les gouvernements successifs ont privilégié les négociations avec les ravisseurs et l’amnistie. Mais au fil du temps, cette politique a été délaissée surtout face aux hommes de Boko Haram qui se cachent dans les forêts. Désormais les gangs et bandits font de même pour échapper aux autorités.

Plus récemment une loi a bien été votée en 2022. Elle interdit aux familles et communautés, qui avaient pris l’habitude de mettre leurs économies en commun pour financer les rançons, de ne plus verser de l’argent aux ravisseurs, sous peine d’au moins 15 ans d’emprisonnement.

L’un des piliers de l’action gouvernementale consiste également à obliger tout détenteur d’une carte SIM à s’enregistrer afin de pouvoir tracer et retrouver les ravisseurs. Malgré les promesses répétées de contrôler la situation, les efforts du gouvernement restent insuffisants, les défis logistiques et la faiblesse du renseignement nigérian sont souvent pointés du doigt. En début d’année, le chef de l’État, Bola Tinubu, a promis de s’attaquer aux causes profondes des attaques. Dire que la situation est désastreuse serait un euphémisme…

Par le Point Afrique

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