Le fentanyl, drogue très addictive et souvent surdosée, est responsable de 70% des morts par overdose aux États-Unis. Sa consommation est la première cause de mortalité chez les 18-45 ans.
Pendant longtemps, le fentanyl circulant aux États-Unis provenait essentiellement de Chine. Mais, en 2019, sous la pression de Donald Trump, Pékin en a interdit la production dans le pays. Mais des groupes criminels chinois ont pris le relais et selon le Congress Research Center américain, les précurseurs chimiques sont dorénavant exportés au Mexique, où ils sont transformés en fentanyl avant d’être introduits clandestinement aux États-Unis. Ces composants sont souvent légaux en Chine, où ils sont utilisés dans le milieu médical comme antidouleurs, ce qui complique les poursuites judiciaires à l’encontre des trafiquants.
Le Mexique est la porte d’entrée numéro un aux Etats-Unis de cet opioïde. A la tête de ce trafic, on trouve les deux principales organisations criminelles mexicaines : les cartels de Sinaloa et de Jalisco « Nouvelle génération ». Dans des laboratoires de plus en plus sophistiqués, ces groupes produisent d’importantes quantités de fentanyl avant de les faire passer sur le sol américain.
Le 8 avril au matin, alors que le président américain vient de lancer sa guerre tarifaire contre le reste du monde, et en particulier contre la Chine, un message singulier est posté sur le compte X de Zhao Dashuai. Il y est question de vols assurant la liaison entre Pékin et Culiacan (Mexique) et de la riposte chinoise qui pourrait prendre différentes formes. En pièce jointe figure une capture d’écran composée majoritairement d’idéogrammes, mais où l’on devine qu’il s’agit d’horaires de vols d’écran composée majoritairement d’idéogrammes, mais où l’on devine qu’il s’agit d’horaires de vols.
De voir associées la ville de Culiacan, localité emblématique du cartel de Sinaloa, et la Chine laisse clairement penser qu’il s’agit d’une menace à peine voilée concernant le fentanyl, cet opioïde synthétique cinquante fois plus puissant que l’héroïne, qui fait des ravages aux États-Unis.
Une rapide recherche indique que le compte X en question appartient au People’s Armed Police Propaganda Bureau. Un compte qui déclare officiellement relayer la propagande de Pékin et qui compte plus de 128 000 abonnés. Cela a le mérite d’être clair.
Mais – quel crédit peut-on accorder à un tel Post ? Une étude détaillée de la capture d’écran permet d’isoler les références d’une liaison aérienne régulière de la compagnie Hainan Airlines entre Tijuana et Pékin (HU7925). Donc rien à voir avec Culiacan.
Dans le courant de l’après-midi du même jour, un nouveau message était posté. Cette fois, la menace était beaucoup plus claire : il y était indiqué que « les Américains devraient faire attention aux pilules qu’ils avaleraient tant que Donald Trump ne reviendrait pas sur sa décision de taxer la Chine ». Le message était accompagné d’une capture d’écran d’un texte en anglais indiquant six contre-mesures que prenait la Chine en réponse à cette guerre des taxes. Une d’elle était surlignée : il s’agissait de mettre fin à l’accord conclu avec les États-Unis concernant l’interdiction de la fabrication de fentanyl en Chine.
Si la menace était très claire, il n’en restait pas moins qu’il pouvait s’agir de « simple propagande ». La capture d’écran provenait d’un compte WeChat intitulé Niutan Qin. Il se trouve que ce compte appartient à un dénommé Liu Hong, rédacteur en chef adjoint de l’agence Xinhua, qui compte plusieurs millions d’abonnés. Compte tenu du contexte, on peut donc accorder un certain crédit à ce message, d’autant qu’un article du Global Times y fait référence.
Il est certain que si le trafic de fentanyl à destination des États-Unis devait s’accroitre, les conséquences seraient dramatiques pour la population américaine. Une importante vague de décès par overdose judicieusement exploitée par la propagande chinoise pourrait lourdement peser sur la popularité de Donald Trump et sa politique, qui d’ailleurs commence à susciter des inquiétudes, y compris dans les rangs des Républicains.
Par Alain CHARRET (CF2R)