octobre 20, 2025
LA SOCIÉTÉ "MY MEDIA GROUP " SOCIÉTÉ ÉDITRICE DU QUOTIDIEN "DAKARTIMES" DERKLE CITE MARINE N° 37. EMAIL: courrierdkt@gmail.com. SITE WEB: www.dakartimes.net.
Economie

ROBERT BOURGI : « Jamais Macky Sall n’a dit du mal du tandem Diomaye-Sonko, ni avec ses interlocuteurs africains, ni avec moi »

Dans cette interview exclusive accordée au podcast « BOSS » de H5 Motivation, avec l’animateur vedette, Aziz, avocat et figure influente des relations franco-africaines, révèle des secrets qu’il n’avait jamais partagé en 30 ans. L’homme y évoque ses relations « incestueuses » entre Paris et certains régimes africains, qualifiant ces liens de troubles et opaques. Bourgi n’omet pas de parler de ces valises de billets en franc CFA prétendument offertes au parti gaulliste, suggérant des pratiques de financement politique douteuses. Robert Bourgi en a profité pour analyser l’actualité socio-politique du Sénégal que dirige le tandem Diomaye-Sonko, tout en revenant sur les relations entre ces deux et l’ancien président Macky Sall. Bourgi fait ici un témoignage rare et percutant sur la Françafrique, ses réseaux d’influence, et les non-dits du pouvoir.

Ses relations avec les chefs d’Etat africains

« Je ne dois de l’argent à personne. Il n’est pas question pour moi de rembourser quoi que ce soit. Pour rembourser, il faut avoir pris de l’argent. Je n’ai jamais caché que les 11 chefs d’État pour lesquels j’ai travaillé… j’ai travaillé cinq décennies durant avec les chefs d’État depuis la Mauritanie jusqu’à Badolité.

J’ai fait un travail solide. J’étais l’intermédiaire entre ces chefs d’État et les autorités politiques françaises. Cela pendant pratiquement cinq décennies.

Il y a des boîtes de communication. J’invite vos auditeurs, vos abonnés à se renseigner auprès des grandes agences de communication, leur demander de s’adresser à ces boîtes. Tous les chefs d’État africains, tous… alors qu’il y a aujourd’hui en Afrique des publicitaires de premier ordre, des nationaux. Ils sont écartés tous.

J’ai plaidé la cause de plusieurs publicitaires africains. Et s’ils écoutent cette interview, ils se manifesteront auprès de vous. Et les chefs d’État ont écarté mes doléances. Ils ne veulent que le blanc. Et des boîtes de communication qui coûtent très cher. Et la plupart du temps, ces boîtes de communication sont payées moitié blanc — excusez-moi le terme — et moitié black.

J’invite tous vos abonnés à s’adresser à l’administration fiscale française. Ils verront que tout a été déclaré. Mais je sais ce qui taraude vos abonnés, et je le comprends. C’est ce que j’ai dénoncé moi-même en septembre 2011 : le financement des autorités politiques françaises par les chefs d’État africains. Je l’ai dénoncé.

Quand on dénonce quelque chose, Aziz, c’est qu’on n’est pas d’accord. Et j’ai payé lourd. Quand j’ai dénoncé ça, à la stupeur du monde politique français, j’ai pris lourd. J’ai été suspendu de l’ordre des avocats. Un an ferme, un an sursis. On m’a suspendu de la Légion d’honneur que j’avais vraiment gagnée en étant allé à Téhéran libérer Clotilde Reiss, qui était détenue dans les geôles des mollahs.

Et j’ai une personnalité de premier ordre qui a nettoyé par le vide tout ce qui était le côté sombre de la France-Afrique : c’est Eva Joly. Eva Joly a été la patronne du pôle financier à Paris pendant une dizaine d’années. Et tout le monde est passé sous les fourches caudines d’Eva Joly.

Roland Dumas, président du Conseil constitutionnel, assis dans sa voiture entre Eva Joly et Laurence Vichnievsky… c’était une image abominable. D’autres ministres, ambassadeurs, préfets… la plupart du temps, ils ont fait de la prison. »

Bourgi-Sarkozy

« En janvier 2023, Mediapart a organisé une conférence que j’ai coanimée avec Eva Joly. Mediapart est impitoyable, mais ses dirigeants sont mes amis : Plenel et Fabrice Arfi, que j’admire. Le travail qu’ils font est admirable. Je ne vais pas me faire que des amis du côté de la Sarkozie.

Il y avait environ 500 personnes. Quand ils ont vu que j’étais là, peut-être qu’il y avait de vos abonnés dans la salle. Un homme s’est levé et, comme sous le régime de la Terreur pendant la Révolution française, il m’a lancé : “Comment se fait-il que Robert Bourgi, l’homme de la France-Afrique…” et patati patata… Les anathèmes les plus terribles.

J’ai souri. Je me suis demandé quelle allait être la réponse d’Eva Joly. Elle a dit : “Je vais vous répondre très franchement. J’ai dirigé le pôle financier pendant des années. Sachez que jamais je n’ai eu à auditionner Robert Bourgi. Ni moi, ni aucun de mes collègues. Son nom n’a jamais été cité.”

Alors qu’Eva Joly, entre l’Angolagate, l’affaire Elf et les autres affaires sombres de la France-Afrique, en a fait tomber des têtes. Combien de responsables de la droite française ai-je visité à la prison de la Santé ?

Je ne dois rien. Tout a été déclaré. Je ne me plains pas. C’est vrai que j’ai eu des émoluments assez conséquents. Mais par rapport à ce que touchaient les agences officielles de communication de la place de Paris, c’était peanuts.

Je les renvoie aux impôts. Mais que les jeunes soient choqués par ce que j’ai dénoncé, je le comprends tout à fait. Mais jeunes auditeurs, ce que j’ai fait, personne d’autre ne l’aurait fait. Personne d’autre.

Je me suis mis face à tous ceux qui comptaient dans le personnel politique français de 1986 à 2007. Et j’ai tout dit. Il fallait avoir le courage de le faire. Mais c’est moi qui ai dénoncé ça en septembre 2011. Que je les rassure : cela préexistait à Robert Bourgi. Cela a toujours existé.

Ça a existé du temps du président Mitterrand. Ça a existé du temps de monsieur Pompidou. Ça a existé du temps du général de Gaulle. Ça a existé du temps du RPF en 1946. Et sans doute bien avant, à ceux qui s’intéressent à l’histoire de France.

Mais de dénoncer, j’ai été le premier et sans doute le dernier à le faire. Et j’invite ces jeunes auditeurs, fort justement choqués, à éviter que leurs dirigeants ne tombent dans le même piège. »

Sa vision du Sénégal et l’avenir du pays avec le duo Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye

« Les jeunes sénégalais, vous êtes dans l’erreur. Ou bien vous ne savez pas me lire, ou bien vous ne savez pas m’écouter, mais je crois que vous ne voulez pas m’écouter.

Je n’ai jamais, jamais, jamais dit du mal d’Ousmane Sonko. Diomaye, je ne le connaissais pas. J’ai toujours dit qu’Ousmane Sonko avait un charisme exceptionnel, une intelligence hors norme, et qu’il était un patriote.

J’ai dit cela même autour du président Macky Sall, auquel je suis très lié. Cet attachement se terminera lorsque Allah me rappellera à lui.

Le 24 septembre 2023, Macky Sall m’a fait venir au palais. Il m’a dit : “Je ne ferai pas un troisième mandat, même si j’y ai droit. Je te demande de le garder pour toi et de n’en informer que Nicolas Sarkozy, qui informera Macron. Moi, je l’annoncerai au peuple sénégalais début juillet, puis j’irai à la Mecque.”

Je lui ai demandé s’il avait bien pesé sa décision. Il m’a répondu : “C’est pesé, grand frère. Il est temps que je m’en aille. Je ne veux pas qu’il y ait d’autres morts parmi les jeunes Sénégalais.”

J’ai applaudi le succès du tandem Sonko–Diomaye. Ils ont commencé le Ramadan en prison et l’ont terminé au palais. C’est extraordinaire.

Mais je leur ai aussi adressé une lettre ouverte, les appelant à plus de souplesse pour éviter le déchirement du tissu social sénégalais. La reddition des comptes est justifiée, mais elle ne doit pas devenir un règlement de comptes.

Jamais Macky Sall n’a dit du mal de ce tandem, ni avec ses interlocuteurs africains, ni avec moi. Il souffre de voir son beau-frère en prison, ainsi que des compagnons de route.

J’ai envoyé mes mémoires au président Diomaye, qui m’a répondu par une lettre gentille. J’ai aussi envoyé mes mémoires à Sonko, mais je n’ai pas eu de réponse — peut-être qu’il n’a pas de timbre ou d’enveloppe.

Des journalistes m’ont demandé si ce tandem allait tenir. J’ai vu tant de tandems se déchirer… Je souhaite que celui-ci ne se déchire pas. »

 

Morceaux choisis par Abdou Karim MBAYE

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *