mai 4, 2024
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LES TRAITES BILATERAUX D’INVESTISSEMENTS (TBI) PROTEGENT LES INVESTISSEURS ETRENGERS : Diomaye ne peut annuler aucun contrat pétrolier, minier ou gazier

Le Sénégal a conclu des Traités bilatéraux d’investissementsavec 28 pays dont les investisseurs sont protégés. Une annulation unilatérale des contrats signés par les grandes entreprises entrainerait des risques énormes contre le Sénégal.

Face aux récentes déclarations du président de la République du Sénégal, Diomaye FAYE sur son intention d’annuler, d’auditer ou de renégocier des contrats, il est devenu nécessaire d’apporter quelques éclairages. Le Sénégal évolue dans un système international régi par des règles. Il a pris des engagements vis-à-vis des Etats, des entreprises ou des Organisations. Aucun Chef d’Etat sénégalais ne peut se permettre de remettre en cause cet ordre établi, au risque d’être exposé à des sanctions sévères.

Le Sénégal a signé plusieurs de traités bilatéraux d’investissement (TBIs). Jusqu’en 2016, le total des TBIssignés était de 28, «dont 21 avec des pays non-africains, en majorité européens; 14 de ces TBIs sont entrés en vigueur, mais celui avec l’Ile Maurice est le seul en vigueur ayant été signé avec un pays africain » nous informe Monsieur Mouhamadou Madana KANE dans une étude publiée en 2016.

Monsieur KANE ajoute que «le TBI sénégalais le plus ancien a été signé avec la Suisse en 1962 (entré en vigueur en 1964), et le plus récent avec le Canada en 2014 (non encore en vigueur) ».

Son étude portait sur «la contribution des TBI au flux des investissements directs étrangers (IDE) au Sénégal ; la promotion des investissements ; la protection des investissements; les obligations de traitement ; les dérogations aux obligations de traitement ; les clauses de garantie des investissements ; les clauses de règlement des litiges entre Etats et investisseurs ; les affaires CIRDI sur le fondement des TBIs impliquant le Sénégal ; les rapports entre les TBIs et le Code sénégalais des investissements ; et enfin la durée de validité des TBIs sénégalais ».

De l’avis de Monsieur Kane, «les TBIs conclus par le Sénégal contiennent tous des dispositions visant à accorder aux investisseurs étrangers une certaine protection en incorporant l’obligation de l’Etat d’accueil de l’investissement d’accorder un traitement juste et équitable et une protection et sécurité pleines et entières ».

Par ailleurs, il a souligné que «les obligations relatives au traitement des investissements sont celles qui exigent de l’Etat d’accueil d’accorder aux investisseurs étrangers, d’une part, un traitement similaire à celui accordé aux ressortissants nationaux (traitement national) et, d’autre part, un traitement non moins favorable que celui accordé aux ressortissants de pays tiers (traitement de la nation la plus favorisée). Ces obligations sont prévues dans tous les TBIs sénégalais en vigueur ».

……………..En cas de litige avec une entreprise américaine comme Kosmos…………………

Le rédacteur du rapport a pris l’exemple des TBIs signés avec une entreprise américaine. Il écrit  que la clause de règlement des différends du TBI avec les Etats-Unis (article 7) présente trois particularités. D’abord, c’est le seul traité parmi ceux étudiés à définir ce qu’il faut entendre par «différend relatif à un investissement » (« investment dispute »), en précisant qu’il s’agit de tout différend relatif à : (a) l’interprétation ou l’application d’un accord d’investissement entre l’Etat d’accueil et l’investisseur ressortissant de l’autre partie contractante ; (b) l’interprétation ou l’application d’une autorisation d’investissement délivrée par l’Etat d’accueil ; (c) ou la violation alléguée d’un droit de l’investisseur en vertu du TBI. Ainsi, au vu des points (a) et (b), on peut souligner que la clause de règlement des litiges ne vise pas uniquement les différends résultant d’une violation du TBI.

La deuxième particularité résulte du fait que l’article 7 ne dicte pas aux parties les moyens de régler leur litige à défaut d’un règlement amiable. En effet, la clause se contente de renvoyer aux modes de règlement des litiges préalablement définis par les parties en litige.

De surcroît, en vertu de l’article 7.3, le recours à l’arbitrage ou la conciliation CIRDI ne semble imposé que si, au-delà de la période de règlement amiable de 6 mois, les parties au litige n’ont, d’une part, pas recouru au mode de règlement des litiges qu’elles ont souscrite et, d’autre part, pas soumis leur litige aux juridictions nationales compétentes de l’Etat partie au litige. Ainsi, à la différence des autres TBIs sénégalais, le recours au CIRDI n’est pas automatique.

Enfin, la troisième particularité de la clause de règlement des litiges du TBI avec les Etats-Unis tient au fait qu’elle contient une disposition excluant son applicabilité à certains litiges, notamment ceux résultant des activités de l’agence américaine d’import-export ou d’arrangements spécifiques en matière de prêts, garanties et assurances en vertu desquels les parties ont convenu d’autres moyens de règlement des différends (article 7.6). Cette disposition semble avoir été introduite au bénéfice exclusif des Etats-Unis.

…………………………………………….. ENCADRE… ENCADRE……………………………

A l’issue de la revue des 14 TBIs sénégalais en vigueur, les conclusions suivantes semblent s’imposer :

Absence d’un modèle sénégalais de TBI : tant d’un point de vue formel que substantiel, il est impossible de conclure à l’existence d’un modèle sénégalais de TBI, en raison d’un manque d’uniformité tant dans la rédaction que le contenu des différentes dispositions.

Absence de lien évident entre TBI et flux d’investissements: les pays d’origine des principaux investisseurs au Sénégal ne sont majoritairement pas ceux avec qui le Sénégal a conclu des TBIs. Sur 20 pays classés, seuls 5 bénéficient d’un TBI en vigueur avec le Sénégal.

Imprécision du contenu des obligations de traitement : les obligations de traitement sont généralement énoncées de manière générique sans aucune précision ou délimitation de leur champ d’application. Le caractère général des dispositions élargit les fondements d’engagement de la responsabilité de l’Etat.

Non-généralisation des dérogations aux obligations de traitement : certains TBIs ne prévoient pas de dérogation relative à la participation à une union douanière ou zone économique régionale. De plus, très peu de TBIS prévoient explicitement la possibilité pour l’Etat de prendre des mesures discriminatoires dans un but d’intérêt public (santé, sécurité, économie, ordre public, moralité publique).

Absence d’un droit pour l’Etat de réguler les investissements admis sur son territoire : seul le TBI avec la Turquie consacre explicitement le droit pour l’Etat de réguler les investissements, notamment dans un but de sécurité publique (article 4).

Absence de dispositions portant obligations de l’investisseur : aucun des TBIs étudiés ne consacre expressément les obligations de l’investisseur. Les TBIs leur accordent beaucoup de droits, sans consacrer leurs obligations.

Disparité des clauses de règlement des différends : il n’existe pas de clause type de règlement des litiges dans les TBIs sénégalais, ce qui constitue une source d’insécurité juridique et juridictionnelle.

Plusieurs leçons à tirer des litiges sénégalais devant le CIRDI : l’imprécision de la rédaction des clauses de règlement des différends, le manque de mise en cohérence de l’ensemble des dispositions des TBIs et l’absence d’une définition soignée du terme « investissement » ont conduit les tribunaux arbitraux à se déclarer compétents dans l’affaire Millicom c. Sénégal, alors que ce dernier avait soulevé des moyens d’incompétence portant sur ces points.

Manque de cohérence avec le Code des investissements : sur certains points, l’intention du législateur sénégalais, tel qu’exprimée dans le Code des investissements, n’a pas été reproduite dans les TBIs, ce qui crée des incohérences à certains niveaux entre le Code et les TBIs.

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Recommandations pratiques faites

Les 4 recommandations suivantes visent à pallier les faiblesses de la pratique sénégalaise en matière de TBIs telles qu’identifiées dans les précédentes conclusions.

Recommandation 1 : Élaborer un modèle sénégalais de TBI à la lumière des conclusions du présent rapport. Il s’agit, d’une part, d’essayer de corriger les incohérences et d’uniformiser les dispositions afin d’atténuer les risques de litiges et, d’autre part, de consacrer expressément le droit de l’Etat de réguler les investissements ainsi que les obligations de l’investisseur, afin de prendre en charge les intérêts spécifiques de développement économique durable.

Recommandation 2 : Envisager de renégocier les TBIs dont la première durée de validité de 10 ans a expiré, afin de moderniser ces derniers à la lumière des conclusions du présent rapport et des nouveaux enjeux de développement.

Recommandation 3 : Définir un cadre politique pouvant servir de feuille de route en matière de conclusion de TBIs. Il s’agit d’identifier les critères précis, d’ordre économique, juridique et politiques devant être remplis et mis en perspective à chaque fois que l’entrée en négociation d’un TBI est envisagée par le Sénégal.

Recommadation 4 : Mettre en cohérence les TBIs avec le Code des investissements et les autres législations nationales pertinentes (code minier, code pétrolier etc.). Il s’agit de s’assurer que les politiques publiques nationales consignées dans des lois ou codes spécifiques, sont dûment prises en compte dans les TBIs. Charles GUEYE

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