mai 19, 2024
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OUVRAGE DU COLONEL ABDOUL AZIZ NDAO : La fin du régime de Mouammar Kadhafi

À partir de décembre 2010, le monde arabe a été secoué par une vague de protestations appelée le Printemps arabe, qui était une recherche de démocratie dans les pays concernés. Cette révolution a balayé d’un revers de la main des régimes supposés très forts comme celui de Moubarak en Égypte ou de Ben Ali en Tunisie.

Le Maroc a su résister par son système traditionnel et ses relations substantielles avec l’Occident. La légitimité du roi du Maroc ne pose aucun problème au peuple marocain et le système reste assez fort pour survivre. La royauté est une fierté des Marocains et les tentatives de putsch ont toujours échoué.

L’Algérie a plus ou moins résisté par la puissance de son système et surtout, les luttes de clans qui ont été âpres après lamort de Boumediene. Les forces armées algériennes, du fait de la guerre d’indépendance, ont toujours su trouver les moyens de soutenir la légalité du régime.

Pendant quarante ans, le Président Kadhafi a été à la tête de la Libye, et pourtant ce pays n’était pas concerné par le Printemps arabe. Les Libyens ne sont pas nombreux, moins de deux millions d’habitants, mais à la différence des autres pays du Maghreb, le pays est très riche de son pétrole et la population en bénéficie et en profite. La personnalité fantasque du colonel Kadhafi, ses folies ainsi que ses digressions, ne concernaient pas les Libyens et ne les préoccupaient pas.

La rente pétrolière, leur bien-être et les projets panafricains mettaient la Libye hors de portée des revendications sociales des autres pays arabes et expliquaient l’acceptation de ce régime particulier. Nicolas Sarkozy va profiter du Printemps arabe pour détruire le régime libyen, dérangé par la politique libyenne avant-gardiste, révolutionnaire et panafricaniste, etsouhaitant ardemment maintenir la Françafrique.

Certains évoquent d’autres raisons plus mafieuses dont le financement de sa campagne de 2012. Toujours est-il que la France prend l’initiative et le prétexte de défendre des populations libyennes massacrées par le colonel pour justifier une intervention.

Malgré une opposition timide de l’Italie, avec la complicité des Américains et de l’OTAN qui appuient l’opération, la France détruit le régime du panafricaniste Kadhafi. Je juge la complicité et le silence des États africains pathétiques et abjects pour ce que Mouammar Kadhafi a représenté pour tous les peuples d’Afrique.

Mouammar Kadhafi a été le seul président africain à avoir eu une ambition pour l’Afrique et le seul à avoir voulu faire de la coopération sud-sud une réalité. Quand il était au pouvoir, les investissements faits dans les pays du Sahel ont été colossaux comme l’ont été les appuis à l’Union africaine. La recherche d’une monnaie africaine forte a été une démarche constante du colonel.

Je regrette le voyage du Président Wade à Benghazi. C’est une trahison envers l’Afrique et le panafricanisme et surtout, une manipulation honteuse de Sarkozy. Wade voulait peut-être retrouver les grâces de la Françafrique après avoir bénéficié des largesses du colonel.

Quoi qu’il en soit, le Président Kadhafi, traqué comme un animal par les services spéciaux français, est sauvagement assassiné dans un lugubre tunnel du sud de la Libye. Ce crime marque la fin du Sahel tel que vécu depuis des millénaires et démontre la nullité géopolitique du Président Sarkozy.

Le Président Kadhafi avait bâti son système de sécurité sur deux aléas qui lui ont permis de présider la Libye pendant plus de quarante ans : une forte présence féminine et une armée noire. Toute personne est surprise et impressionnée par le nombre de femmes dans les forces de défense et de sécurité libyennes. Les femmes, oubliées dans le monde arabe, martyrisées et sans droit dans les pays arabes sont mises en valeur et responsabilisées en Libye.

Entouré et escorté par des femmes chargées de sa sécurité, le Président Kadhafi a joué un rôle majeur dans la valorisation des femmes en Afrique. Certes cette idée éloignait de lui toute menace physique sur sa personne, une femme n’ayant aucune chance de le remplacer. Cependant, cette stratégie donnait à la femme un rôle et une innovation certaine dans toute l’Afrique. L’armée libyenne était composée à plus de 75 % de militaires noirs, originaires des différents pays sahéliens qui faisaient frontière avec ce pays. Cela m’avait beaucoup surpris lors de ma première visite en Libye.

De génération en génération et pendant plus de quarante ans, ces Noirs avaient pu, pour les forces armées libyennes et les ambitions du colonel, intégrer et évoluer dans la société libyenne. Ils avaient pu gravir les échelons et être des cadres respectés, honorés et admis par les Libyens, et ce, tant que le régime durait. Ils étaient très bien payés et n’avaient aucun problème avec les Libyens parce qu’ils étaient considérés comme des Libyens de souche. Ils garantissaient la pérennité du régime, étant également impensable qu’un général noir remplace le colonel à la tête du pays.

La chute du colonel voulue et programmée par Sarkozy ne pouvait prévoir le rejet puis la chasse de ces militaires du territoire libyen. Le système détruit a laissé la place à un nouveau système, et cela se manifeste par une guerre civile opposant les bandes rivales à qui Sarkozy a abandonné la Libye.

Son parrain mort, l’armée noire de Kadhafi devient vite orpheline. Sans but ni homogénéité, sans âme et sans idéal, elle n’est plus libyenne. Bannie, traquée, elle devient un symbole de la déchéance du projet fou et idéalisé d’un sociopathe. La recherche d’espaces de survie dans les pays d’origine est une nouvelle nécessité de cette horde noire et une réalité que le Sahel devra prendre en compte sans s’y être réellement préparé.

L’Algérie, la Tunisie et l’Égypte ne sont pas concernées par le désastre humain qui se dessine. Ces pays n’ont rien à voir avec cette horde, orpheline et désemparée. En outre, leurs armées sont assez structurées pour faire face à un assaut et obligent ainsi la horde à se diriger vers le Sahel.

Les armées françaises étaient au Niger et au Tchad et ont été un bouclier contre cette armée errante et défaite sans pour autant qu’il y ait un contrôle sur son arsenal très riche et diversifié avec des armes de dernière génération. Le Niger et le Tchad ont ainsi pu faire face et s’opposer à l’entrée de la horde dans leur pays. Il y aura quelques percées et entrées mais elles n’auront pas l’impact que subira le Mali.

Avec armes et bagages, l’armée noire de Kadhafi, en bandes et sous diverses appellations, profitant des conflits réels sur le sol malien, s’y engouffre. Parfois, elle s’allie aux Touareg et renforce la rébellion contre l’État central. Parfois, elle s’installe et s’allie aux groupes djihadistes réfugiés dans le sud du désert algérien et allié d’Al-Qaïda ; souvent, elle est manipulée par l’État islamique attaqué en Syrie et en Irak. Quoi qu’il en soit, elle donne de nouvelles idées au radicalisme musulman qui y trouve un nouvel intérêt après ses déboires au Moyen-Orient.

La mauvaise prise en compte et l’appréciation erronée de la communauté internationale engendrent des conséquences inimaginables dans un Mali surpris et anéanti par une sauvagerie nouvelle et difficile. D’un conflit touareg géré avec plus ou moins de réussite, le Mali est attaqué de toutes parts par une nébuleuse terroriste où tous les maux du pays se réveillent et s’accumulent.

Le paludisme permanent et maîtrisé du temps du Président Alpha Oumar Konaré est remplacé par un cancer généralisé accentué par des reins défaillants et une crise asthmatique causée par le virus Sanogo, un jeune capitaine qui se prend pour Sankara.

Conscient alors des erreurs et bêtises de son prédécesseur à l’Élysée, François Hollande essayera, par l’opération Serval,de sauver le Mali et l’Afrique de l’Ouest. L’armée française stoppe l’avancée des hordes qui, sous diverses appellations, veulent faire sombrer Bamako, et par là, tout le Sahel. Serval n’est pas seulement une idée généreuse de la France mais la correction de la destruction de la Libye. Elle a pour ce moment stoppé l’élan islamiste dans le Sahel mais ne l’a pas détruit. CHAPITRE 2 DU LIVRE : «LE SAHEL : Terre des conflits » du Colonel Abdoul Aziz NDAO

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