avril 28, 2024
LA SOCIÉTÉ "MY MEDIA GROUP " SOCIÉTÉ ÉDITRICE DU QUOTIDIEN "DAKARTIMES" DERKLE CITE MARINE N° 37. EMAIL: courrierdkt@gmail.com. SITE WEB: www.dakartimes.net.
Sécurité

GUERRE EN UKRAINE : PERSPECTIVES POUR 2024

A l’issue de la première année de guerre, j’avais fait un point sur l’état des forces des deux belligérants. Je concluais en écrivant : « L’incertitude demeure mais, d’un point de vue militaire, il ne faut sans doute pas s’attendre à une évolution rapide du rapport de force en faveur d’un côté ou de l’autre compte tenu des atouts et des faiblesses respectifs des deux protagonistes ». Malgré la contre-offensive ukrainienne déclenchée début juin, il est possible de constater que c’est effectivement ce qui s’est passé et la ligne de front n’a que peu évolué depuis le mois de mars 2023 alors même que l’optimisme était plutôt du côté ukrainien que du côté russe en début dernière.. Le ton et l’ambiance ont changé et cette année 2024 s’ouvre avec des perspectives moins réjouissantes pour Kiev. Outre l’échec de la contre-offensive qui a consommé beaucoup d’hommes et de matériels, de grosses incertitudes demeurent sur les livraisons d’armes par l’Occident et la tension sur les effectifs ukrainiens est plus forte que jamais. Il est donc temps de refaire un point sur les forces et les faiblesses militaires des deux camps en ce début d’année 2024 et d’envisager les conséquences que cela pourrait avoir.

L’ARMÉE UKRAINIENNE

Elle tient toujours tête à l’adversaire russe mais on commence à manifester un certain essoufflement. Cette armée manque cruellement de réserves. Toutes les brigades sont sur le front et, pour contrer une attaque ou concentrer des forces en un point, elle est obligée de dégarnir un autre secteur. Aujourd’hui elle n’est clairement plus en position pour attaquer et doit se préserver en se mettant en position défensive. C’est ce que souhaite son chef d’état-major, le général Zaloujny, mais le président Zelensky ne le voit pas comme ça. Il s’est politiquement tellement engagé à chasser l’armée russe de tous les territoires occupés, Crimée comprise, qu’il est contraint à une logique très offensive, au moins en paroles. La tension est de plus en plus palpable entre le chef de l’État et son chef d’état-major, ce qui n’est jamais bon pour la cohérence d’une armée.. L’opération sur la rive gauche du Dniepr a, par exemple, été décidée par Zelensky contre l’avis de Zaloujny et elle a coûté cher aux brigades de troupes de marine qui y ont été engagées. Il reste à savoir si Zelensky va remplacer son chef d’état-major ou s’il va le garder compte tenu de la forte popularité dont celui-ci jouit, tant au sein des troupes que de la population. Cette opposition entre les deux individus est à surveiller de près car elle peut avoir une influence importante sur l’efficacité de l’armée ukrainienne. Il existe un vrai risque politique à ce niveau-là.

FORCES DE L’ARMÉE UKRAINIENNE

– Agilité : les troupes ukrainiennes gardent toujours une plus grande agilité que leur adversaire et disposent d’une plus grande souplesse tactique. Néanmoins, on peut constater une certaine difficulté à exploiter, sur le plan stratégique, cette relative supériorité. Des succès tactiques locaux, même s’ils sont spectaculaires, ne suffisent pas à gagner une guerre et l’armée ukrainienne n’arrive pas à structurer suffisamment cet avantage pour peser réellement sur le rapport de forces.

– Les drones : si les forces ukrainiennes ont bénéficié d’un certain avantage au début de la guerre par l’usage des drones, c’est beaucoup moins le cas aujourd’hui. Si avantage elles ont encore, il est maintenant très ténu et on observe une certaine parité à ce niveau sur le front.

– Le renseignement : c’est toujours le point le plus important de l’aide occidentale et c’est notamment ce renseignement qui rend possible les frappes dans la profondeur. Les Ukrainiens dépendent certes beaucoup des Occidentaux mais ils peuvent espérer que cette aide perdure même si l’aide matérielle venait à fortement ralentir. Cette abondance et cette qualité du renseignement permet à l’armée ukrainienne quelques jolis coups tactiques lors de frappes dans la profondeur. C’est ainsi qu’ils peuvent porter des coups sévères à la flotte de la mer Noire ou frapper loin à l’intérieur du territoire russe jusqu’à Moscou ou Saint Petersbourg. Ils bénéficient aussi des capacités occidentales de préparation de mission pour contourner et déjouer les défenses russes, programmer les missiles de type Scalp/Storm Shadow et augmenter ainsi les chances de succès des attaques. Néanmoins, malgré ces indéniables succès tactiques, cela a très peu d’impact sur le champ de bataille. Par exemple, quand bien même ils arriveraient à couler complètement la flotte de la mer Noire, cela ne leur apporterait pas un avantage significatif. Celle-ci n’a que des coups à prendre dans cette guerre et bien peu à donner ; elle est d’une maigre utilité pour l’armée russe, si ce n’est à servir de plateforme de lancement à des missiles de croisière ou pour les approvisionnements par voie maritime. Et encore, concernant ce dernier point, les forces russes peuvent avoir recours à des navires civils. De leur côté, les Ukrainiens n’ayant aucune marine, ils ne peuvent pas occuper l’espace ainsi laissé libre, sans compter que l’aviation russe est toujours en mesure d’interdire l’accès de la mer Noire si elle le souhaite.

– Les livraisons d’armes et de munitions : elles restent vitales pour les Ukrainiens mais leur rythme baisse et il pourrait encore diminuer. De grosses incertitudes demeurent à ce sujet et, si c’est encore un atout, cette dépendance pourrait rapidement devenir un énorme point faible. La montée en cadence de la production nationale ukrainienne est très nette, elle aurait triplée, mais elle n’est pas encore assez importante pour compenser la probable réduction des livraisons et surtout cette capacité de production est très vulnérable aux frappes russes.

– La force morale : les Ukrainiens sont sans doute toujours davantage motivés que leur adversaire mais on sent quand même poindre une lassitude et une fatigue, surtout chez ceux qui sont au front. L’avantage sur ce point n’est sans doute plus aussi marqué qu’il y a un an.

FAIBLESSES DE L’ARMÉE UKRAINIENNE

– Hétérogénéité des troupes : cet aspect s’est encore aggravé au cours de l’année qui vient de s’écouler. Les pertes ont été importantes et de nombreuses brigades, formées par les Occidentaux, ont été complétées par des hommes n’ayant pas suivi l’entraînement en Occident, voire n’ayant pas eu d’entraînement du tout. Ils ne peuvent donc pas capitaliser sur le gain d’expérience acquis au combat. La majorité des mobilisés ne reçoit qu’une formation très limitée et forge son expérience directement au front. La grande diversité des matériels en service dans l’armée ukrainienne accentue encore cette hétérogénéité.

– Les effectifs : c’est peut-être un des points les plus critiques aujourd’hui. L’armée ukrainienne peine à compenser ses pertes et encore plus à monter en puissance. Aujourd’hui, elle n’aurait plus l’avantage en termes d’effectifs. Le président Zelensky va devoir prendre rapidement des décisions en la matière en élargissant la base des mobilisables et en rendant cette mobilisation bien plus systématique. Seulement les volontaires se font rares et cette mobilisation pourrait engendrer de fortes oppositions, voire même des troubles sociaux. Les images de plus en plus fréquentes d’enrôlements « musclés » en sont un indice. Seulement le président ukrainien n’a guère le choix : il lui faut mobiliser les 500 000 hommes nécessaires s’il compte toujours reprendre par la force l’ensemble des territoires perdus.

– Hétérogénéité du matériel : cette faiblesse ne fait que croître à mesure que le temps passe, que le matériel est utilisé et que les besoins en maintenance augmentent. Non seulement les Ukrainiens font état d’une certaine fragilité du matériel occidental, notamment au niveau de l’électronique, mais en plus ils peinent à recevoir les pièces détachées nécessaires, même pour la maintenance la plus basique. Par exemple, les militaires ukrainiens doivent adapter des plaquettes de freins de véhicules de gamme civile pour les installer comme ils peuvent sur les nombreuses versions de véhicules qu’ils ont reçus. Ces bricolages engendrent des taux de disponibilité assez faibles des matériels et une charge logistique de plus en plus importante.

– Trous capacitaires : malgré l’arrivée en 2023 de missiles à longue portée et la livraison de quelques F-16 prévue pour 2024, l’armée ukrainienne souffre toujours de lacunes capacitaires importantes par rapport à la Russie. Ce n’est pas la petite vingtaine de F-16 qui va modifier le rapport de force dans le domaine aérien, surtout que, même s’ils sont plus modernes que les MIG-29 et SU-27 dont dispose l’Ukraine aujourd’hui, ils restent inférieurs aux SU-35 et SU-30 russes qui leur feront face. De même, les quelques dizaines de missiles longue portée livrés, même s’ils peuvent faire très mal à Moscou, ne peuvent rivaliser avec la production de l’industrie russe dans le domaine.

– Infrastructures détériorées : à mesure que la guerre dure, les infrastructures ukrainiennes souffrent de plus en plus, ce qui impacte lourdement les capacités logistiques (transport ferroviaire) et productives du pays, malgré les efforts pour les remettre en état.

– Économie en souffrance : le pays vit toujours largement sous perfusion des subsides occidentaux et les risques de diminution de l’aide financière sont aujourd’hui plus élevés qu’il y a un an (la situation économique des pays européens est plus que tendue), ce qui augmente le risque de provoquer un effondrement de l’État.

L’année 2023 aura été une année difficile pour l’armée ukrainienne qui en est sortie fragilisée, même si elle continue à courageusement résister à son agresseur.  L’année 2024 est une année à haut risque pour cette armée qui doit absolument reprendre du « muscle » pour espérer continuer sa lutte, car le courage ne suffit pas.

L’ARMÉE RUSSE

Malgré les prédictions de certains « experts », l’armée russe est très loin de s’être effondrée. Au contraire, elle semble être aujourd’hui dans une position plus favorable qu’il y a un an. La Russie ne semble pas avoir de grosses difficultés à garnir les rangs, même si c’est au prix de primes très conséquentes versées aux volontaires. Sa production industrielle, ainsi que l’aide de l’Iran et de la Corée du Nord lui assurent de ne manquer ni de munitions, ni de matériel. Elle semble ainsi en mesure de compenser globalement ses pertes. Contrairement à l’Ukraine, ses points forts n’ont pas été remis en cause, même si elle a beaucoup entamé le stock de matériels et de munitions qu’elle possédait avant la guerre.

FORCES DE L’ARMÉE RUSSE

– Capacités globales : les forces armées russes disposent pratiquement de l’ensemble des capacités militaires d’une grande puissance, avec du matériel globalement performant  : aviation de chasse, bombardiers stratégiques, hélicoptères de combat, missiles, défense anti-aérienne, force terrestre blindée, artillerie, flotte de surface, flotte sous-marine… Malgré les pertes qu’elle a subies, l’armée russe possède encore des capacités militaires bien supérieures à celles de l’Ukraine.

– Une industrie de l’armement souveraine : la Russie produit chez elle la très grande majorité de son matériel militaire. Elle dépend encore de fournitures extérieures pour certains composants, mais qui sont souvent peu critiques, et des alternatives peuvent être trouvées sur le marché. En conséquence et malgré les sanctions occidentales, la production de missiles modernes (Iskander, Kalibr, KH-101, KH-47…), drones, aéronautique militaire, blindés et munitions a augmenté en 2023. Néanmoins, la Russie doit également compter sur l’appui de ses alliés pour lui fournir des munitions (Corée du Nord, Iran) et/ou certains composants (Chine, Indonésie, Inde) nécessaires à sa production militaire.

– Une autonomie énergétique : la Russie étant un gros producteur de pétrole et de gaz, elle est assurée de ne jamais être à court en énergie, tant pour son industrie que pour le ravitaillement en carburant de ses troupes. On l’oublie souvent mais c’est un des éléments indispensables pour donner à un État la capacité de soutenir un conflit dans la durée.

– Une économie résiliente : malgré les lourdes sanctions appliquées par les pays occidentaux, l’économie russe résiste même si elle en subit des effets. En réalité, ce n’est pas vraiment une surprise : historiquement les sanctions économiques sont rarement efficaces pour infléchir la politique d’un pays. Quand elles le sont, c’est parce que les pays visés sont très isolés sur la scène internationale et ont peu de ressources naturelles et industrielles, ce qui n’est clairement pas le cas de la Russie.

– Une dissuasion nucléaire puissante : le fait que la Russie soit une des deux plus importantes puissances nucléaires a un impact direct sur les soutiens dont peut bénéficier l’Ukraine. Il est probable que, si la Russie n’avait pas été une puissance nucléaire, les pays occidentaux se seraient engagés bien plus directement aux côtés de Kiev. Cette dissuasion permet aussi à la Russie de préserver l’intégrité de son territoire de toute agression extérieure.

FAIBLESSES DE L’ARMÉE RUSSE

– Structure de commandement « soviétique » : l’armée russe garde toujours bon nombre de caractéristiques de l’Armée rouge. La structure très rigide et verticale d’un commandement très centralisé laisse encore peu de place aux initiatives tactiques, ce qui a un impact sur la réactivité des forces, même si une certaine évolution semble s’observer. L’encadrement est également insuffisant au niveau subalterne, avec un corps de sous-officiers encore trop limité. Par sa structure monolithique, c’est une armée qui réagit, apprend et s’adapte plus lentement que son adversaire mais elle apprend et progresse malgré tout et on reste assez loin des vagues humaines sacrifiées comme cela est parfois présenté dans nos médias.

– Des soldats faiblement entraînés et mal équipés : par rapport à la fin 2022, l’évolution est difficile à mesurer. De nouveaux matériels arrivent sur le front, comme les T-90M ou les T-80 BVM, mais ils restent accompagnés de chars très anciens comme les T-62M et les T-55 sortis de leur stockage. Ces derniers sont davantage utilisés pour faire de l’appui feu indirect en tant qu’artillerie de première ligne. L’équipement individuel des soldats russes paraît avoir peu évolué, bien que l’utilisation de drones suicides FPV en première ligne semble s’être généralisée. La formation des soldats fraîchement engagés serait de quelques mois, 3 à 6 mois selon les spécialités. Cela reste relativement peu mais cela donne une certaine homogénéité à la troupe. Il reste des unités d’élites qui bénéficient encore d’un très bon niveau et d’équipements de qualité, mais elles ont subi de lourdes pertes et leurs effectifs ont pratiquement été divisés par deux depuis le début de la guerre. Le niveau tactique des troupes russes reste inférieur à celui des Occidentaux, voire même probablement à certaines unités ukrainiennes, même si la différence tend à diminuer. Cette faiblesse tactique continue à majorer les pertes sur le terrain.

– Déficit d’outils de commandement et de contrôle : les lacunes en moyens de communication, notamment en moyensprotégés, nuisent toujours à la remontée des renseignements, à la diffusion des ordres et donc à la réactivité des forces, même si certains progrès sont à noter de ce côté-là.

– Une logistique encore fragile : malgré une amélioration par rapport au début de la guerre, cela reste un des points faibles de l’armée russe. Cependant, la guerre de tranchées tend à atténuer cette faiblesse et la chaîne logistique semble tenir.

– Une armée qui ne peut pas faire beaucoup plus : s’il y a un an, on pouvait juger que l’armée russe pouvait mobiliser davantage d’hommes, aujourd’hui cette possibilité est largement bridée par le manque de matériels. Si l’armée russe disposait de très larges stocks d’armes et d’équipements, cette situation n’est plus vraie. Les réserves ont largement été entamées et la Russie n’est plus en capacité d’équiper rapidement des centaines de milliers d’hommes supplémentaires. L’apport du matériel repose maintenant en grande partie sur la vitalité industrielle du pays qui atteint elle aussi ses limites. Son armée actuelle est encore correctement approvisionnée, elle ne manque ni de camions, ni de chars, ni de missiles, ni de munitions, mais elle n’est pas capable d’augmenter brutalement ni durablement le volume de feu qu’elle peut délivrer. Tout pic de feu doit être préparé par une économie de munitions en amont.

– Une force morale plus faible : c’est un point toujours très difficile à évaluer mais il est probable que la motivation des Russes dans cette guerre reste inférieure à celles des Ukrainiens. La vie quotidienne des Russes reste peu impactée même si les frappes dans la profondeur, essentiellement grâce à des missiles « Low Cost », sont maintenant quotidiennes. La Russie, en raison de la multiplication de ses tirs, ne peut plus assurer une certaine sanctuarisation de son territoire malgré la richesse de sa défense sol/air, désormais mise à rude épreuve, de manière quasi continue.

L’armée russe souffre toujours de certaines faiblesses structurelles profondes  qui nuisent à ses capacités militaires et elle a maintenant consommé une grande partie de son stock de munitions et de matériel. La Russie n’est sans doute plus en mesure d’assurer le même volume de feu qu’au début de la guerre et elle doit maintenant doser l’utilisation de ses munitions afin d’être en mesure de tenir dans le temps. Elle doit garder l’équilibre entre ce qu’elle produit ou arrive à acheter à l’Iran et à la Corée du Nord et ce qu’elle consomme. Néanmoins, elle garde toujours un net avantage dans ce domaine sur son adversaire.

*

L’année 2023 aura été difficile pour les deux camps qui ont chacun subi de lourdes pertes. Néanmoins, la position de la Russie semble meilleure. Malgré les pertes, elle peut revendiquer un – modeste – gain territorial net en 2023, malgré la contre-offensive de Kiev. L’Ukraine a, de son côté, perdu une grande partie de ses capacités offensives qui ont été consommées pendant l’été et elle est maintenant dans une situation délicate. Elle doit reconstituer ses effectifs et recompléter son armée en matériels et surtout en munitions.

Seulement l’Ukraine reste extrêmement dépendante du soutien occidental et il existe aujourd’hui d’importantes incertitudes quant à la poursuite de celui-ci. Outre les critiques de concernant cette aide aux Etats-Unis, la situation internationale a évolué depuis le 7 octobre dernier avec l’attaque terroriste d’une rare violence du Hamas contre Israël qui a été suivie par une riposte de l’État hébreu, elle aussi d’une très grande violence. Les conséquences de cette nouvelle guerre dépassent largement la seule bande de Gaza et ont déclenché des tensions en mer Rouge comme avec Téhéran, et une partie du gouvernement israélien, à commencer par son Premier ministre, semble tentée d’élargir le conflit. En conséquence, la guerre en Ukraine n’est plus la seule source d’attention pour les Occidentaux et devient « un problème parmi d’autres ».

L’aide matérielle occidentale est maintenant contrainte par des stocks au plus bas en Europe. La guerre menée par Israël absorbe également une part non négligeable des stocks américains de munitions et l’industrie occidentale de l’armement peine à monter en puissance. Plusieurs pays européens sont entrés officiellement en récession, à commencer par la France qui, en plus, est très endettée. La question peut alors se poser : l’aide financière et matérielle à l’Ukraine pourra-t-elle être maintenue compte tenu dans de telles conditions ? Il ne faut pas oublier que l’industrie de défense n’augmente sa production que si, et seulement si, elle reçoit des commandes fermes et conséquentes dans la durée. Aucune incantation ne peut y pallier quand bien même elle vient du président.

En 2024, l’Ukraine aura trois gros défis à relever :

– être capable de reconstituer ses forces par une large mobilisation qui apparaît cependant difficile ne serait-ce que pour des considérations financières ;

– régler les dissensions entre le président et son chef d’état-major, ce qui constitue aujourd’hui le risque le plus important de déstabilisation de l’armée ;

– s’assurer un soutien matériel et financier continu de la part des Occidentaux.

Et même si toutes ces conditions se trouvaient réunies, il ne faudra sans doute pas s’attendre à ce que l’Ukraine puisse entreprendre de larges offensives avant 6 à 8 mois, même avec l’arrivée de quelques F-16. De son côté, faute d’être en mesure d’augmenter suffisamment son potentiel militaire, la Russie ne pourra probablement pas faire beaucoup plus que continuer à exercer une pression constante sur le front et de grignoter du terrain dès que l’armée ukrainienne montrera des failles. Il est possible que nous assistions en 2024 à une stabilisation du front avec moins de grandes actions offensives qu’en 2023. On risque d’assister, par contre, à une augmentation des frappes ukrainiennes sur la profondeur russe grâce aux missiles « Low Cost » que Kiev produit maintenant en masse en réponse aux Shahed utilisés par les Russes. Cela n’aura aucun impact sur le conflit mais cela montrera aux Ukrainiens et aux Occidentaux que Kiev continue le combat.

En revanche, si l’Ukraine n’arrive pas à régler ses trois principaux problèmes, il est aussi possible que des négociations s’ouvrent à terme avec la Russie, surtout si la situation de l’armée ukrainienne se dégradait rapidement et qu’elle se retrouve proche de la rupture, ce qui paraît peu probable. Bien entendu ce ne sont là que des hypothèses au vu de la situation actuelle et en aucun cas des prévisions fiables. Nul doute que l’année 2024 nous réservera quelques surprises susceptibles de remettre en cause tout ou partie de ces projections.

OLIVIER DUJARDIN

 

Leave feedback about this

  • Quality
  • Price
  • Service

PROS

+
Add Field

CONS

+
Add Field
Choose Image
Choose Video
WP2Social Auto Publish Powered By : XYZScripts.com
X